Ils nous refont la Controverse de Nétzarim ! (1ère partie)
jeudi, 22 mai 2014
Par Stéphane Juffa
avec Hevi Pekoz
Jeudi dernier, le 15 mai 2014, entre 13h45 et 14h59, des policiers israéliens appartenant à l’unité des gardes-frontières ont tiré à balles réelles sur des jeunes palestiniens dans le village de Bitunia, proche du centre d’incarcération israélien d’Ofer, dans la région de Ramallah dans les territoires palestiniens contestés. Ils commémoraient avec d’autres civils le 66ème anniversaire de la Nakba (désastre), à savoir la création de l’Etat d’Israël.
Suite à ces tirs, deux des jeunes ont trouvé la mort, un troisième est grièvement blessé, alors que le quatrième, qui préfèrerait conserver l’anonymat, n’aurait été que légèrement touché au coude.
C’est du moins la version que soutiennent les dirigeants de l’Autorité Palestinienne, l’ensemble des media arabes1, la quasi-totalité de la presse française ainsi que l’AFP, et l’ONG israélienne spécialisée dans la défense des droits de l’homme, B’tselem.
Cette dernière a été la première à diffuser
deux documents vidéo filmés par les caméras de surveillance d’un témoin oculaire du nom de Fahar Zaïd.
Ces images montrent la mort de deux des victimes, Nadim Siyam Nawarah, 17 ans, du village de Mazra al Qiblyah et de Mohamad Mahmoud Salameh, surnommé Abou Daher, 17 ans, originaire de Ramallah.
Nous n’avons pas trouvé d’images montrant l’incident supplémentaire durant lequel Mohamad ‘Azzah, 15 ans, aurait été grièvement blessé et serait actuellement traité dans l’unité de soins intensifs de l’hôpital de Ramallah.
Sur les images qui nous sont proposées, on distingue que des affrontements violents ont lieu entre des manifestants et les forces israéliennes qui restent en permanence hors du champ des caméras. Il est toutefois à signaler que les deux victimes qui apparaissent sur les films semblent se promener paisiblement sur la scène des affrontements et n’exécutent aucun mouvement offensif ou provocateur au moment où ils sont fauchés par des balles. Leur mains sont nues, ils ne portent apparemment ni pierres ni cocktails Molotov.
Sur les deux scènes disponibles, la première constatation que nous pouvons faire, forts de l’expérience que nous avons acquise en décortiquant l’affaire Dura de septembre 2000, consiste à affirmer que ces deux jeunes gens ont été visés depuis une distance respectable, de l’ordre de plusieurs dizaines de mètres voire plus.
Contrairement à la Controverse de Nétzarim, Tsahal et les responsables israéliens n’ont pas été pris au dépourvu et ont entamé immédiatement une enquête fouillée afin de déterminer les circonstances et l’authenticité des faits. Ils ont notamment interpelé très rapidement le physicien et expert en balistique Nahum Shahaf afin de lui demander son concours. Shahaf est le spécialiste dont l’interview sur la Ména niant la mort de Mohamed Dura avait provoqué la polémique concernant la mise en scène de Fr2, une polémique qui se poursuit jusqu’à nos jours, 14 ans et demi après les événements.
Fait extrêmement rare, le procureur général de l’Etat d’Israël, Yehouda Weinstein, a ordonné à l’avocat général de l’armée, Danny Efroni, de le tenir informé des progrès de l’enquête. D’habitude, le procureur général ne se mêle pas des enquêtes se déroulant au-delà de la ligne verte.
Selon des indiscrétions fournies par les milieux de l’enquête, celle-ci serait pratiquement bouclée et Tsahal devrait rapidement en fournir les conclusions.
Celles-ci seront donc publiées bien plus tôt que ne l’espérait l’adjoint au secrétaire général de l’ONU au département des affaires politiques de cette organisation, Oscar Fernandez-Taranco, ainsi que Jen Psaki, la porte-parole du Département d’Etat US, qui appelaient de leurs vœux une investigation transparente et approfondie.
Nous, de déplorer la forme de leurs requêtes, - et particulièrement, celle de Fernandez-Taranco -, qui, dans leur énoncé paraissent endosser la version palestinienne du double assassinat, alors qu’ils ne peuvent ignorer leur propension à fabriquer des mises en scène visant à démontrer la "sauvagerie des soldats hébreux".
C’est également le cas du Monde et de son correspondant permanent en Israël, Laurent Zecchini, connu pour sa haine féroce de l’Etat hébreu, qui ne prend pas la précaution élémentaire d’attendre la fin de l’enquête pour stigmatiser Israël2, de manière dévoyée, contraire en tous points à notre déontologie.
Et ils ont tort, car avant même la remise du rapport des enquêteurs, il est possible, sur la base d’éléments objectifs et scientifiques, de démontrer que l’Affaire de Bitunia procède également d’une mise en scène.
La plupart desdits éléments ont été recueillis par Nahum Shahaf qui nous en a fait part au cours d’une longue discussion ; le physicien est convaincu, par-delà tout doute sensé, que nous sommes à nouveau en présence d’un faux.
La première incongruité, et elle est de taille, tient dans le fait que l’enquête a établi que les policiers n’ont, à aucun moment de la journée du jeudi 15 mai, fait usage de balles réelles. Ils n’ont eu recours qu’à des balles en caoutchouc et à des grenades lacrymogènes pour disperser les émeutiers.
Reste que les deux adolescents qui "ont été tués", Nadim Siyam Nawarah et Mohamad Mahmoud Salameh, n’ont pas été fauchés au faîte d’une altercation violente, et que des balles en caoutchouc n’ont pas pu causer les blessures ayant entrainé leur "mort".
Mais l’antisémitisme régnant dans certains milieux politiques, intellectuels et surtout médiatiques, n’aura aucune vergogne à rejeter une investigation effectuée par des experts israéliens.
Ce qui suit sera plus difficile à nier, à commencer par la chronologie des incidents. En effet, selon le codage-temps des caméras (visible sur les vidéos de B’tselem) ainsi que les témoignages palestiniens, les "assassinats" se seraient déroulés à une heure et quart d’intervalle : Nadim Nawarah serait décédé et son camarade Mohamad ‘Azzah grièvement blessé sur le coup des 13 heures 45, tandis que Mohamad Salameh aurait trouvé la mort à 14h 59.
Or les propres statistiques de B’tselem montrent que les décès de Palestiniens en Cisjordanie dus à la confrontation avec l’Etat hébreu ne sont pas des évènements anodins, puisqu’il n’y a eu "que" 82 cas durant les cinq dernières années.
Dès lors, si des membres des forces de l’ordre israéliennes avaient perpétré un acte criminel à 13h 45, largement couvert par de nombreux reporters et cameramen étrangers sur place, cela aurait donné lieu à un remue-ménage majeur côté israélien.
L’hypothèse selon laquelle la même unité aurait à nouveau remis le couvert une heure et quart plus tard en exécutant un second civil palestinien innocent et ne présentant aucun danger imminent pour sa sécurité manque totalement de crédibilité.
Dans la même considération, on argumentera que quatre jeunes palestiniens absolument paisibles, étant atteints dans les mêmes circonstances et au même endroit à 75 minutes d’intervalles, cela est totalement déraisonnable.
Un cerveau normalement constitué appartenant à une personne de bonne foi se demandera ce qu’est venu faire Mohamad Salameh, adoptant la même démarche tranquille que les premières victimes, sur le lieu d’un assassinat, tout en sachant que les policiers israéliens retranchés sur place avaient la gâchette assez facile pour abattre des personnes non-armées, sans la moindre provocation.
Mais même si cette succession d’évènements est aussi incroyable qu’incohérente, elle ne constitue pas encore une preuve de la mise en scène d’un point de vue juridico-scientifique.
Ce qui en constitue une est l’attitude des deux "victimes" immédiatement après avoir été impactées par les balles. D’abord les deux ont exactement la même réaction, celle d’amortir leur chute en plaçant les bras en avant, exactement comme on apprend à le faire dans n’importe quel cours d’art martiaux pour débutants.
Là où cela se corse pour les faussaires, et nous sommes absolument formels sur ce point après avoir consulté Nahum Shahaf et aussi d’autres spécialistes tant en Israël qu’à l’étranger, c’est que chuter de cette façon est absolument impossible lorsque l’on vient d’être transpercé par des balles ; le corps exerce alors un mouvement dans le sens opposé à la direction du projectile, puis s’affaisse d’un coup, sans que la personne mortellement atteinte n’ait la faculté d’amortir sa chute.
Et ceci constitue une preuve incontournable que tous les spécialistes dignes de ce nom confirmeront sans la moindre réserve.
Mais ce n’est pas tout. Comme dans l’affaire Dura, et c’est très clair sur les images vidéos, les adolescents mortellement atteints par des balles ne saignent pas ; et cela c’est également et totalement impossible dans de tels cas de figure.
Sur cette image du photographe Abbas Momani de l'AFP et de Getty Images, les auteurs de la mise en scène ont bien teinté de rouge la partie extérieure des phalanges d’un secouriste, mais cela ne fait qu’accentuer le doute quant à l’imposture, car on ne distingue pas de sang liquide entre les doigts de cette personne, ni sur les habits du "mort" encore agonisant, pas plus qu’à l’emplacement de la blessure ou sous son corps. Cela aussi sent le bidonnage à plein nez.
Autre étrangeté extraordinaire de cette affaire, le moribond en question se nomme Mohamed Oudeh ; son nom, rapporté par Momani et repris par des centaines de media dans le monde, n’est pas celui, ni de près ni de loin, des deux morts ou des blessés de Bitunia. Les mêmes media et de nombreuses chaînes TV ont montré l’enterrement de Mohamed Oudeh, suivi par des centaines de partisans fanatisés arborant les couleurs de l’islam, sans que l’on sache ce qu’il a à voir avec l’incident.
Un mort très hygiénique. Un mort en trop dans le décompte final, une erreur de tournage
Ils nous refont la Controverse de Nétzarim ! (2ème partie)
Analyse
jeudi, 22 mai 2014
Par Stéphane Juffa
avec Hevi Pekoz
Les enquêteurs ont également pu se procurer les rapports médicaux rédigés par le Dr. Saliba de l’hôpital de Ramallah. A nouveau, et même si cela aurait aidé à établir l’authenticité de la "sauvagerie de la soldatesque israélienne", aucune autopsie n’a été pratiquée sur les corps ; de plus, les rapports d’examens sont lapidaires et manquent cruellement de professionnalisme et de détails. Tous les experts en médecine légale ayant eu le loisir de les consulter ont immédiatement fait part de remarques identiques.
Au niveau de ces observations, un autre point les a émus ; il concerne la blessure qu’aurait subi Mohamad ‘Azzah : une balle entrée à deux centimètres du thorax et ressortie dans la partie inférieure de l’abdomen, en physique cela ne se peut pas.
Malgré les ressemblances troublantes, il existe toutefois une énorme différence entre les circonstances de la Controverse de Nétzarim et celle de Bitunia. Elle consiste en cela que le territoire dans lequel Mohamed Dura aurait été tué, Gaza, sous contrôle du Hamas, est absolument inaccessible aux enquêteurs israéliens et occidentaux.
Ce n’est pas le cas de la Cisjordanie, où les Israéliens, s’ils le désirent, disposent de la possibilité d’effectuer tous les examens nécessaires pour faire la lumière et rétablir la vérité.
Par exemple, sur les images à disposition, on distingue au moins cinq reporters-cameramen, qui se ruent littéralement, en quelques secondes, sur les victimes à terre. On se demande d’ailleurs, comme à Nétzarim et à Al-Dirat, ce que faisaient autant de journalistes, si près d’évènements dramatiques qui ne s’étaient pas encore produits. Lors, à Bitunia, il ne fait aucun doute que ces confrères ont tourné des images prépondérantes pouvant aider à l’établissement des faits, et nous ne doutons pas que les enquêteurs les aient priés de leur remettre une copie de ce qu’ils ont filmé.
La justice israélienne, qui s’est emparée de l’affaire sans tarder, ainsi que les enquêteurs de la police et de l’Armée peuvent aussi demander à examiner Mohamad ‘Azzah, toujours en traitement à l’hôpital de Ramallah situé à 14 km à peine de Jérusalem.
Et puis, puisque les obsèques des deux jeunes "tués" ont déjà eu lieu sans être examinés par un anatomopathologiste, si la justice israélienne devait demander une autopsie, elle pourrait sans doute exiger l’exhumation des corps. Tous ceux que la vérité préoccupe avant tout autre chose ne feraient pas valoir d’états d’âme devant la réalisation d’un acte somme toute banal dans une procédure criminelle.
Il existe un autre élément distinctif intéressant dans cette affaire : les autorités palestiniennes ont dévoilé l’identité des "victimes". Si elles sont effectivement décédées, Ramallah fera tout son possible afin d’établir sa bonne foi, et, dans les circonstances qui gouvernent ce cas, ce n’est vraiment pas une tâche difficile.
Dans le cas inverse, les figurants qui apparaissent sur les vidéos devront être soustraits à l’opiniâtreté de la justice israélienne ; cela n’est pas une mince affaire, surtout en tenant compte du nombre élevé de témoins et d’individus qui ont dû participer à l’élaboration de la mise en scène.
Les enquêteurs ont à plancher sur les hypothèses suivantes :
* Les policiers israéliens ont effectivement assassiné les deux civils palestiniens
* Nawarah et Salameh sont morts mais sous des balles palestiniennes
* Les Palestiniens ont utilisé les noms et les identités de personnes effectivement mortes durant la même période mais lors d’une autre occurrence, comme un accident de voiture, par exemple, et ils n’ont aucun lien réel avec les acteurs que l’on voit sur les films de Zaïd.
* On est en présence d’une mise en scène
Dans le premier cas, les policiers devraient être jugés et probablement passer le restant de leurs jours sous les verrous.
Le second porterait un coup sérieux à la propagande d’incitation à la haine de Palestiniens à l’encontre d’Israël, qui iraient jusqu’à sacrifier la vie de leurs enfants pour incommoder leurs voisins juifs.
Le troisième, plus difficile à démontrer, confirmerait qu’il existe effectivement une industrie de la victimisation chez les Palestiniens, à un niveau plus sophistiqué que les autorités et les services israéliens ne se le figurent.
A la Ména, nous sommes persuadés que c’est le cas, particulièrement après avoir dévoilé
l’imposture de l’AFP, le 25 janvier 2012, dans le village d’Al-Dirat. A cette occasion l’agence semi-officielle française avait prétendu, photos de l’un de ses photographes palestiniens à l’appui (là aussi), qu’un tracteur agricole conduit par un soldat de Tsahal ainsi que sa remorque étaient passés sur le corps d’un ouvrier palestinien. Sami El Soudi avait retrouvé le quidam vivant quelques heures après être passé sous une demi-douzaine de tonnes, chez lui, à son domicile. Il avait été choisi par les metteurs en scène car son corps gardait les séquelles visibles d’un (vrai) accident plus ancien et il a, lui aussi, fait l’objet d’un rapport médical bidon de la part de médecins hospitaliers palestiniens.
Dans le quatrième scénario, il appartiendrait à tous ceux qui ont accusé Israël précocement et sans discernement de retourner à l’école de la réserve et de la prudence.
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