L'économie israélienne est considérée comme un modèle exemplaire de ''sortie de crise'', les chiffres sont bons, et la politique économique fait l'objet d'un exceptionnel consensus.
Comment se fait- il dans ce cas que
les écarts sociaux comptent parmi les plus importants du monde développé et que la croissance économique, loin de les combler, semble augmenter le nombre des pauvres ?
L'économie se juge-t-elle seulement à ses performances chiffrées ? Ne faudrait il pas la mesurer aussi - d'abord - à ses effets sur le niveau de vie de la population et sur la cohésion sociale ?
Une formidable imposture - La paupérisation de la société israélienne
L'absence d'alternative à la politique économique actuelle est un phénomène qui doit nous interpeller :
croirait-on qu'il n'y a aucun rapport entre l'économique et le social?
Qu'il n'y a qu'une seule politique économique possible ?
Ou peut être pense-t-on que la paupérisation de la société israélienne est un sacrifice indispensable à la croissance?
Avez vous essayé d'émettre une critique de la politique économique israélienne devant des intellectuels d'habitude sceptiques et virulents ? Eux aussi sont persuadés qu'il n'existe pas d'alternative à la politique menée, et qu'il s'agit d'une affaire de spécialistes.
Le titre du supplément économique d'un des grands journaux : ''l'argent'' est symptomatique d'une conception néo-libérale de l'économie, pour laquelle il faut laisser faire les lois du marché ainsi que et la finance, laquelle constitue le véritable moteur de l'économie.
... Comme si la finance n'était pas à l'origine de la plus grave crise qu'a connu le monde depuis 1929!
On cherche à faire croire :
que l'économie fonctionne en vertu de règles mécaniques qui lui sont propres qu'il ne faut pas entraver par des règlementations inutiles.que les impératifs de la politique économique sont incompréhensibles au commun des mortels qu'il faut confier la gestion de l'économie à des spécialistes.
Il s'agit d'une formidable imposture :
Toutes les grandes découvertes de la science économiques de ces dernières années ont montré que les prétendues ''lois'' du libre échange ne fonctionnent pas dans la réalité. Les règles fondamentales de la politique économique économie sont simples : lisez par exemple les livres de Joseph Stiglitz, prix Nobel de l'économie ayant exercé les plus hautes responsabilités de la politique économique américaine et mondiale .
Vous serez surpris de leur simplicité. La politique économique est la création et la mobilisation des ressources dans le but de réaliser les objectifs définis par des choix politiques.
Prétendre qu'il faut être un spécialiste pour mener la politique économique revient à confisquer le pouvoir des hommes politiques élus.
Le renoncement du pouvoir politique à diriger la politique économique permet aux agents économiques privés les plus puissants d'organiser les richesses à leur seul profit et sans contrôle. C'est ce qui se produit en Israël.
Il importe de dénoncer l'imposture et de rappeler :
1. qu'il n'y a pas une seule et unique politique économique permettant la croissance économique, mais plusieurs.
2. que la croissance n'est pas un but en soi.
3. que l'objectif et les critères d'évaluation de la politique économique ne peuvent se limiter au chiffre de la croissance, puisque la politique économique est au service des hommes –et non l'inverse.
4. qu'il n'y a pas de fatalité en économie, et que cette dernière n'est pas une divinité qui exige des sacrifices de vies humaines.
La richesse du pays réside dans la qualité de ses ressources humaines. La paupérisation de la société israélienne qui se traduit par l'exclusion de toute une partie du peuple, prive le pays d'une partie de ces ressources et constitue un handicap pour son avenir.
Il est donc urgent que la politique économique fasse l'objet de débats publics, et que des alternatives soient proposées.
*Brigitte Ullmo-BLIAH est avocate à Jérusalem
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