Re: La Communaute Juive de Mazagan,Messages & Photos
Posté par:
chiswick (IP enregistrè)
Date: 30 janvier 2007 : 01:26
Bonjour à tous les Mazaganais,
Je suis ravie de vous écrire à nouveau.
Mustapha Jmahri avec qui je suis en contact a écrit un article sur El Jadida. J'ai pensé que cela ferait plaisir, à bon nombre d'entre vous,de le lire.
A bientôt,
Chiswick
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Dans Atlasblue.mag :
Un reportage sur la renaissance d’El Jadida
Le magazine Atlasblue.mag, dans sa nouvelle livraison n° 13 de janvier- février 2007 a publié un reportage réalisé par Mustapha Jmahri sur la ville d’El Jadida. Intitulé « La renaissance d’El Jadida », ce reportage est illustré de belles photos en couleur avec une traduction en anglais et un résumé en arabe. En couverture, une photo du port vu de la mer avec la Cité Portugaise à l’horizon.
Edité bimensuellement par Asa Editions à Paris pour le compte de la compagnie Atlas Blue filiale du Groupe Royal Air Maroc, ce magazine de bord est offert aux clients.
Voici ci-après le texte du reportage :
La renaissance d’El Jadida
Au centre du Maroc sur les rives de l’Atlantique, El Jadida jouit d’une position stratégique. Cité au passé prestigieux, la mythique Mazagan est aujourd’hui une agglomération de 200.000 habitants environ alors que sa population ne dépassait guère 4.000 habitants quatre siècles auparavant. Décidément, El Jadida ne peut échapper à son destin : devenir une métropole.
El Jadida est née d’un noyau : la cité portugaise. Située sur une rade sûre, c’était l’escale préférée des navigateurs anciens Phéniciens, Carthaginois et Romains. Elle a abrité des colonies européennes diverses : italiennes, françaises, maltaises, sardes, arméniennes, espagnoles, allemandes et anglaises. Vers 1815, le nom d’El Jadida lui fut attribué par le sultan Moulay Abderrahmane. Elle en avait connu d’autres : Portus Rutilis, Rusibis, el Brija, el Mahdouma, Mazagà o pour les Portugais et Mazagan pour les Français.
Autour d’une forteresse
Cité cosmopolite, ouverte aux musulmans, aux juifs et aux chrétiens, elle a su conjuguer les apports des peuples faisant d’elle un carrefour civilisateur remarquable. Et aujourd’hui encore, la cité portugaise joue son rôle de milieu ouvert et tolérant en attirant les Européens amateurs des battisses du passé réhabilitées en riads privés. Classée par l’UNESCO au Patrimoine mondial de l’Humanité, cette cité est aujourd’hui le seul ensemble complet d’architecture manuelienne conservé en dehors des terres lusitaniennes. D’aspect militaire, cette forteresse conserve presque intégralement l’ensemble de ses vestiges. Les murailles à l’extérieur ont 14 mètres de haut, percées de nombreuses meurtrières et contiennent une soixantaine de soupiraux. Les cinq puissants bastions défendant la forteresse sont édifiés en forme de feuille de trèfle dont trois sont tournés vers la terre et deux vers la mer.
Au cœur de la ville, la ville vit au rythme du marché aux épices et la kissaria avec ses petites boutiques de couturiers traditionnels de jellabas, éternellement accroupis sur des nattes usées. Extra-muros, la place Khattabi, fière de ses palmiers centenaires, donne un air de fraîcheur aux belles maisons de style ibérique dont certaines abritent des chambres d’hôtes, formule d’hébergement inconnue dans cette ville il y a encore quelques années.
Plus loin, le visiteur fait face à un vrai château auvergnat, dit « château rouge », construit dans les années 1920 par Marcel Buisson, un ingénieur français qui craignait le dépaysement. Aux alentours, un calme mystère plane sur les manufactures abandonnées, depuis presque un siècle, à l’usure sur la côte brumeuse.
La richesse du patrimoine
El Jadida a su garder son âme malgré les contraintes du présent et les impératifs de la mondialisation. Son identité plurielle est reflétée par de riches vestiges : la citerne, lieu fascinant qui fut le cadre de tournage de grands films tel Othello, l’église paroissiale Notre-Dame de l’Assomption avec sa charpente en bois, la mosquée de 1823, unique au Maroc par son minaret pentagonal et la synagogue Amiel jouxtant l’ancienne église espagnole.
La valeur historique de la ville est sublimée par le phare Sidi Bouafi construit en 1914 par des prisonniers militaires allemands, le ksar el Bacha au style andalou et les grandes demeures des familles juives dans les ruelles de Merchane et Isac Hamou. L’une de ses battisses appartenant à la famille Znaty s’enorgueillit de seize pièces, une grandeur phénoménale par rapport aux dimensions « étudiées » des appartements modernistes.
Enfin, El Jadida, c’est aussi un port. En débarquant sur la baie de Mazagan, à l’aube du XVIe siècle, le Duc de Bragance y trouva une petite tour de garde-côte abandonnée et s’exclama : « Voici le meilleur port du monde ». Grâce à ce port, les Portugais ont pu conquérir Mazagan et y rester pendant 267 ans. Le vieux port d’El Jadida constituait, bien avant Casablanca, le mouillage le plus sûr de toute la côte atlantique. Aujourd’hui, il est totalement dédié à la pêche sur les 150 km du littoral de la province alors que Jorf Lasfar, à 17 km d’El Jadida, demeure le fleuron des ports minéraliers de toute l’Afrique.
Une ville qui bouge
El Jadida s’agrandit à une vitesse vertigineuse. Déjà , depuis une décennie, la ville est à la recherche de son temps perdu. Une octogénaire se rappelle avec nostalgie le temps où les rues de la ville devenaient désertes dès le coucher du soleil. Mais l’époque de la petite cité de retraités en quête de tranquillité est bien révolue. Aujourd’hui El Jadida veut devenir le deuxième pôle économique du Maroc après Casablanca. Des avantages alléchants ont drainé vers elle des multinationales et les chantiers de construction prolifèrent partout sur la route en direction de Marrakech et sur la route vers Safi. Les prix des terrains ne cessent de grimper. Chaque jour les tentacules du béton s’allongent, comme une pieuvre, et dominent les champs de figuiers et les prairies autrefois aux couleurs des coquelicots. L’enjeu est important et les jeux sont faits.
Peut-être que le hasard fait bien les choses mais pas à El Jadida. Déjà personne ne croit l’histoire de la coïncidence qui aurait conduit les Portugais en 1502 vers la baie de Mazagan, comme le signalent certaines sources. La raison est plus raisonnable : la richesse du terroir. Hier comme aujourd’hui, c’est l’appât du gain qui fait tourner la roue de l’économie. Ville ouverte à l’arrière-pays généreux : agriculture variée, tourisme vert et culturel naissant, perle de plages vierges - El Jadida attise les convoitises.
Mustapha Jmahri