Bonne nouvelle pour les amis de la liberté religieuse en Israël : l’Etat semble vouloir financer les rabbins des courants non orthodoxes.
Si la nouvelle s’annonce effective, elle est très importante car elle représente une révolution dans le traitement des différents courants du judaïsme en Israël.
Jusqu’ici, l’Etat avait négocié avec l’orthodoxie une forme de monopole financier et juridique qui rendait extrêmement difficile la possibilité d’un judaïsme pluraliste et l’existence de courants non orthodoxes. En effet, le système israélien est un système de concorda, c’est-à-dire que la religion est financé officiellement par l’Etat. Il existe ainsi des rabbins dans toutes les agglomérations qui sont fonctionnaires. Il existe des rabbins dans les administrations (prison, aéroport, armée…). Ce sont ainsi des milliers de rabbins qui sont entretenus par l’Etat (4000 environ). Il en est de même pour les bâtiments et les institutions. Les synagogues, les mikvaot (bains rituels), les écoles, l’administration religieuse… tout cela est financé par l’Etat et donc l’argent public.
Le scandale vient du fait du monopole du courant orthodoxe qui puise une grande part de sa puissance de cet état de fait profondément antidémocratique. De leur côté, les courants non orthodoxes doivent tout financer par eux-mêmes, c’est-à-dire que leurs membres doivent payer deux fois : une fois pour l’orthodoxie à travers leurs impôts et une fois pour leur communauté d’adhésion. Il va de soi qu’il est très difficile de financer quoi que ce soit hors de l’orthodoxie dans de telles conditions. On en arrive à un paradoxe : Israël est le seul pays au monde où la majorité du judaïsme (les 2/3 des juifs du monde ne sont pas orthodoxes et préfèrent les autres courants d’après les sondages) se trouve soumise à une ségrégation sévère !
Si cela fait des années que les courants non orthodoxes mènent diverses batailles juridiques pour faire connaître leurs droits. La bataille est longue, mais peu à peu les choses s’améliorent.
Un accord a été trouvé pour que dans des agglomérations agricoles (une action avait été menée par un kibboutz affilié au mouvement juif progressiste) il y ait une autre possibilité de financement que celle d’un rabbin orthodoxe. La cour suprême a également indiqué qu’il fallait appeler la personne, homme ou femme, « rabbin de mouvement non orthodoxe » (au départ l’administration voulait employer le pléonasme « dirigeants de la communauté » afin d’éviter d’employer le mot rabbin et de ne pas vexer les orthodoxes).
Normalement ce financement passe par le ministère des affaires religieuses, mais le ministre (rabbin orthodoxe) a menacé de démissionner plutôt que d’exécuter l’ordre de la haute cour ; on est donc passé par le ministère de la culture… (ce qui est plutôt flatteur pour les mouvements non orthodoxes vu le niveau du ministère des affaires religieuses, mais ce qui relève d’une belle hypocrisie de la part de l’Etat).
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mai 2012