LA RAFLE DE JÉSUS
L’étoile jaune de toile, cousue solidement,
Sur son coeur palpitait
Mais je suis chrétien ! clamait-il
Aux gardiens de l’ordre nouveau
Avant je portais une croix,
Pas une étoile !
Et les sbires du pire à venir, de ricaner
Jésus a été dénoncé par les siens, bons paroissiens
Cueilli à la sortie de l’église
Et, ouste, dans l’autobus
Direction Drancy
Voyage aller, presque gratuit
Manque le retour
Dans l’immense cour, une foule si dense
Et personne pour le reconnaître !
Ici Babel, grouillante de cris et de langues
Nul pour le comprendre
Et pourtant, tant de Juifs
Tant d’étoiles en ce firmament de ciment !
Un scribe galonné, inscrivant des noms
Et soigneusement, les empilant
en colonnes noires
le sang de sa plume d’acier grinçante
tachant le papier blanc
Eclaboussant au hasard infâme
Quelques noms
Jésus ?
Oui, Jésus, de Nazareth, en Palestine
Né en l’an zéro
Profession ?
Messie
Pressons, pressons,
Vous n’êtes pas le dernier !
Et ainsi, de Drancy, Jésus partit
En un train d’enfer
Aux horaires si précis
Avec sur sa tête, une couronne barbelée
Poèmes d’Ilan Braun, extraits du recueil (inédit)
« Labyrinthes. De la Terre au Ciel », 2003
Pour d'autres poèmes, voir le site où j'ai trouvé celui-ci (Mémoire juive et Déportation - Littérature et Shoa) :
[
pagesperso-orange.fr]
Lili Braun