LES MESURES ANTISEMITES
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Bien qu'epargne par l'occupation allemande, le Maroc doit s'aligner sur la politique autoritaire et antisemite du regime de Vichy, de juillet 1940 a novembre 1942.
Le Protectorat met ainsi en place les statuts discriminatoires etablis par l'Etat francais, en 1940 et 1941, qui excluent les juifs de l'enseignement, de la fonction publique et les ecartent de secteurs majeurs de la vie economique. A Casablanca, par exemple, 26 avocats juifs sur 30 sont radies du barreau et 13 medecins sur 16 sont rayes de l'ordre. Parallelement, 10 000 juifs algeriens, vivant au Maroc, sont prives de leur nationalite francaise et relegues au statut d' ? indigene ?.
En aout 1941, les israelites nouvellement installes dans les ? quartiers europeens ? des villes marocaines depuis 1939, sont contraints, en theorie, de quitter les lieux . A Casablanca, une decision du pacha, en 1937, leur ayant interdit la nouvelle medina, ils n'ont d'autre choix que de s'entasser dans le mellah (quartier juif de l'ancienne medina) ou de quitter la ville.
Ces mesures discriminatoires frappent aussi les enfants israelites. Abraham Serfaty, alors sur les bancs du Lyc?e Lyautey de Casablanca, racontera plus tard : " s'il n'y eut pas d'arrestations, nous eumes cependant droit aux interdits et exclusions. Ainsi ma soeur dut-elle quitter le Lycee, le numerus clausus qui la frappait m'ayant en revanche epargne. " Le soir, certains professeurs bravent ces mesures iniques et assurent des cours clandestins a ces jeunes victimes de l'antisemitisme ! Il faudra attendre 1943 pour que tous les eleves juifs retrouvent les bancs de leur classe et leurs camarades.
Enfin, quelques centaines de juifs francais et etrangers, d'Europe centrale essentiellement, sont internes dans des ? camps de s?jour surveille ?, veritables camps de travail, repartis sur le territoire marocain, comme a El Jadida, Ain Leuh, Beni Mellal, Bou Arfa, Tadla, Mrirt, Tazmamart, Agdz, et Ghbila. Ils y cotoient d'autres detenus francais et marocains, des socialistes, des communistes et des francs-macons.
Neanmoins, ces internements ne concernent pas les juifs marocains et ne presentent pas de caracteres systematique et massif pour les autres. Aucun juif dans le royaume cherifien n'est deporte dans les camps de concentration et d'extermination nazis en Europe, echappant ainsi au plus terrible genocide de l'Histoire, surnomme la Shoah, qui entraine la mort de plus de 6 millions de juifs. Si les israelites du Maroc ont ainsi pu eviter le sort dramatique de leurs coreligionnaires d'Europe, ils le doivent en grande partie a la protection du sultan Sidi Mohammed ben Youssef et aux amenagements de la politique antisemite, qu'ont du lui conceder les autorites du Protectorat, fideles a Vichy. Vichy, dont l'autorite s'efface progressivement au Maroc apres le d?barquement des Americains, en novembre 1942, et avec elle toutes les mesures discriminatoires a l'encontre des juifs.
Pres de 250 000 juifs marocains ont donc globalement traverse les annees 1940-1942 " a l'abri de toute persecution, la majorite d'entre eux ignorant l'existence de camps de travail force qui etaient mis en place au Maroc par le Regime de Vichy. (...) Les juifs marocains avaient subi un certain nombre de mesures comme l'inventaire des biens, mais ils n'ont jamais eete inquietes grace a la protection salvatrice de feu SM Mohammed V, alors que des juifs francais et etrangers avaient ete incarceres en secret par les autorites du Protectorat. " (Serge Berdugo, secretaire general du Conseil des communautes israelites du Maroc, lors du 60e anniversaire de la Shoah, le 30 janvier 2005).