Le Centre mondial bahá'í, situé dans la région d'Acre-Haïfa en Israël, est le centre à la fois spirituel et administratif de cette religion, depuis que Bahá'u'lláh y a été exilé en 1868. Le Mausolée - dernière demeure - du Báb sur le Mont Carmel à Haïfa et celui de Bahá'u'lláh près d'Acre sont les deux lieux les plus saints au monde pour les bahá'ís.
LE BÁB
Siyyid 'Alí-Muhammad, appelé le Báb - « la Porte » en arabe - est né à Chiráz, en Iran, en 1819. C'est un descendant du prophète Mahomet, et sa piété et sa dévotion lui vaudront très tôt l'admiration de ses professeurs et des membres de sa famille.
La Perse du XIXe siècle est saisie d'une ferveur messianique, les musulmans attendant l'apparition du « Seigneur de l'Age ». C'est dans ce climat que, pour la première fois, le Báb se déclare être un Messager de Dieu. C'était le 23 mai 1844.
Il fonde un religion distincte, la Foi bábíe, avec ses propres lois, décrets et œuvres mystiques et doctrinales. Au milieu d'une désintégration morale généralisée, Il appelle, en contraste, à une réforme morale et spirituelle de la société persane. Il insiste sur la nécessité d'élever le rang de la femme et d'améliorer le sort des pauvres. Il encourage l'acquisition d'une éducation et des sciences utiles. Toutefois, le thème essentiel dont traite le Báb dans ses enseignements, c'est la venue imminente d'un autre Messager de Dieu, au rang plus élevé que le sien et qui inaugurera l'ère de paix et de justice attendue par les juifs, les chrétiens, les musulmans et les croyants des autres grandes religions du monde. Le Báb désigne cette figure comme « Celui que Dieu rendra manifeste ». C'est en ces termes qu'Il annonce la venue de Bahá'u'lláh. En proclamant une religion entièrement nouvelle, Il aida ses fidèles à se libérer du carcan de la société traditionnelle et à se préparer à la venue du « Promis de tous les âges ».
La mission du Báb aura été de courte durée - six années en tout - mais ce laps de temps lui aura permis de gagner à sa cause des milliers de fidèles. La plupart des bábís ne l'ont jamais rencontré, mais ont cru en lui en lisant ses écrits, largement diffusés. Les bábís feront l'objet d'impitoyables persécutions aux mains des autorités de l'époque, qui voyaient une menace dans ces conversions à la nouvelle religion. Le clergé, que l'appel du Báb à un renouveau spirituel inquiétait, persuada les autorités laïques que l'appel du Báb à une réforme sociale pouvait mener à une agitation sociale. Les bábís, témoignant d'un remarquable héroïsme, seront ainsi torturés et mis à mort par milliers à cause de leur foi.
Le 9 juillet 1850, après trois ans d'incarcération, le Báb est conduit dans la ville de Tabriz et fusillé devant un public de 10.000 personnes, dans des circonstances pour le moins inhabituelles, largement rapportées par la presse occidentale de l'époque. Lorsque les gardes viennent le chercher dans sa cellule, Il est en pleine conversation avec son secrétaire et les avertit qu'« aucune puissance au monde » ne pourra le faire taire avant qu'il n'ait terminé tout ce qu'il a à dire. Un régiment composé de 750 soldats arméniens font alors feu, mais une fois la fumée dissipée, le Báb a disparu. Il est retrouvé dans sa cellule, finissant de dicter ses instructions à son secrétaire. A l'arrivée des gardes, Il leur annonce calmement : « C'est à vous maintenant, faites votre travail ». Mais le régiment refuse de renouveler l'expérience et on fait appel à un autre régiment qui, lui, ne manquera pas sa cible.
La dépouille du Báb sera déplacée et cachée par ses fidèles pendant de nombreuses années, jusqu'au jour où elle est finalement transportée en Terre sainte. Là, conformément aux instructions de Bahá'u'lláh, elle est enterrée sur le Mont Carmel, à l'endroit précis qu'Il avait désigné pour l'érection du Mausolée. En 1909, elle est donc ensevelie dans ce Mausolée d'apparence simple, qui sera plus tard embelli. Il faudra attendre 1953 pour voir terminée la célèbre superstructure au dôme doré qu'est le Mausolée du Báb. C'est, pour les bahá'ís, l'un des deux lieux les plus saints au monde.
Regard sur la vie et la mission du Báb >
BAHÁ'U'LLÁH
Bahá'u'lláh signifie la « Gloire de Dieu » en arabe. C'est le titre qu'adopte le fondateur de la Foi bahá'íe, Mírzá ?usayn-'Alí (1817-1892). Né dans une famille de la noblesse persane au XIXe siècle, Bahá'u'lláh est encore un jeune homme lorsqu'il refuse le poste politique qu'on lui offre et choisit de consacrer ses richesses à soulager les pauvres et les malades. Très tôt, il épouse la cause du Báb - « la Porte » - un jeune marchand de Chiráz qui déclare être porteur d'une religion nouvelle destinée à renouveler la société persane. Le Báb annonce aussi la venue imminente d'un autre Messager de Dieu, appelé à accomplir les prophéties du judaïsme, du christianisme, de l'islam et des autres grandes religions du monde, et à inaugurer une ère de paix et de justice pour tous les peuples. En 1850, au lendemain de l'exécution du Báb par les autorités, un grand nombre de ses fidèles, les bábís, se tourneront vers Bahá'u'lláh.
En 1852, Bahá'u'lláh est emprisonné à Téhéran pour ses activités de bábí, et c'est là, au fond de sa cellule, qu'Il recevra les premiers signes de sa mission, telle que prédite par le Báb. Une fois libéré, il est exilé à Bagdad et, en 1863, il y déclare être le Messager divin longtemps attendu. La vaste majorité des bábís le reconnaissent : la communauté bahá'íe est née.
Tout au long de ses 40 années d'exil aux mains des autorités persanes et ottomanes, de Bagdad à Constantinople, puis à Andrinople, et enfin en 1868, à la colonie pénitentière ottomane d'Acre, en Palestine - aujourd'hui en Israël, Bahá'u'lláh révèlera plus de 100 volumes d'écrits mystiques, d'enseignements éthiques et sociaux, et de lois et ordonnances divinement inspirés. Il s'adressera également aux rois et aux dirigeants de son temps, parmi lesquels le Schah de Perse, le Sultan de Turquie, le Pape Pie IX, le Kaiser Wilhelm I d'Allemagne, la Reine Victoria, l'Empereur Franz Joseph d'Autriche, Napoléon III et les chefs des gouvernements occidentaux, leur annonçant la Révélation dont il est porteur. Il les exhortera à traiter leurs sujets avec justice et compassion, en les avertissant que s'ils manquaient de le faire, ils perdraient leur pouvoir.
Deux thèmes clés résument le message de Bahá'u'lláh : l'unité mondiale et la justice. Il enseigne qu'il n'y a qu'un seul Dieu qui révèle sa volonté aux hommes par l'intermédiaire d'une série d'Enseignants divins parmi lesquels Abraham, Moïse, Jésus-Christ, Mahomet, Krishna, Bouddha et Zoroastre. Si les enseignements sociaux des grandes religions qu'ils ont fondées varient en fonction du moment et de l'endroit auxquels ils étaient destinés, l'essence spirituelle de toutes les religions est la même : le but de tous les êtres humains est de connaître et d'adorer leur Créateur. En cet âge, l'humanité est capable de reconnaître l'unicité de Dieu, de sa religion et de la famille humaine. Bahá'u'lláh enseigne aussi que l'homme et la femme sont égaux et que la science et la religion sont en harmonie dans leurs enseignements; il prescrit l'abolition des extrêmes de richesse et de pauvreté, l'éducation obligatoire pour tous, et le choix d'une langue auxiliaire internationale pour faciliter la communication et la compréhension entre les peuples.
Avant son décès, en 1892, Bahá'u'lláh donnera des instructions pour assurer sa succession à la tête de la communauté bahá'íe, et perpétuer ainsi son unité en la préservant des schismes. Il nommera, pour ce faire, son fils aîné, 'Abbás Effendi - qui se fera appeler 'Abdu'l-Bahá ou « le Serviteur de Dieu » - et le désignera comme l'unique interprète autorisé de ses écrits. Cet acte permettra à la communauté bahá'íe de maintenir son unité fermement intacte tout au long du premier siècle de son existence, face aux défis tant internes qu'externes qu'elle devra relever.
'ABDU'L-BAHÁ
'Abbás Effendi, appelé « 'Abdu'l-Bahá » - le « Serviteur de Dieu » en arabe - naît le 23 mai 1844, la même nuit où le Báb déclare sa mission pour la première fois. Il est le fils aîné de Bahá'u'lláh et n'a que 8 ans lorsque son père est incarcéré pour la première fois. Il l'accompagnera tout au long de ses 40 années d'exil et de captivité, et à mesure qu'il avancera en âge, il deviendra son plus proche compagnon mais aussi son bras droit, son bouclier et son représentant auprès des dirigeants politiques et religieux de l'époque. Le savoir de 'Abdu'l-Bahá, son esprit de service et sa manière de diriger confèreront un grand prestige à la communauté des exilés bahá'ís.
Après le décès de Bahá'u'lláh, le 29 mai 1892, 'Abdu'l-Bahá prend la direction de la communauté bahá'íe, suivant ainsi les ordres de Bahá'u'lláh. Cette nomination formelle par Bahá'u'lláh règle ainsi la question qui a longtemps tourmenté les autres religions, celle de la succession du fondateur. En rédigeant son testament, Bahá'u'lláh empêchait l'apparition de schismes et jetait de solides fondations pour le développement et le progrès ultérieurs de sa Foi en préservant l'intégrité de ses enseignements.
Bahá'u'lláh avait conféré à 'Abdu'l-Bahá le titre de « Centre de l'Alliance » et avait enjoint à tous les bahá'ís de se tourner vers lui. 'Abdu'l-Bahá devenait ainsi le seul interprète autorisé des enseignements de son père et il les explicitera. En sa qualité de guide infaillible et d'architecte d'une communauté en rapide expansion, il élargira les doctrines des institutions administratives de cette Foi et en mettra en évidence les aspects essentiels. Ce faisant, il se consacrera à donner également aux fidèles, de par sa façon de vivre, un exemple de vie tel que requis par les enseignements bahá'ís.
En 1911, au sortir de 40 années de captivité et de souffrances, 'Abdu'l-Bahá est enfin libre de se rendre en Occident. Il y visitera l'Europe et l'Amérique du Nord, et devant toutes sortes d'auditoires, il expliquera dans les moindres détails le remède que Bahá'u'lláh a prescrit pour le renouveau moral et spirituel de la société. Il se disait « héraut de la paix et de la réconciliation » et « avocat de l'unité de l'humanité ». Très acclamé dans la presse et par les personnalités et les dirigeants de la société, il fera néanmoins comprendre que sa plus grande gloire est d'être « 'Abdu'l-Bahá » - le serviteur de Bahá'u'lláh - et que les enseignements de son père sont la source de toutes ses paroles et de tous ses actes.
'Abdu'l-Bahá meurt le 28 novembre 1921, à Haïfa. Ses funérailles sont suivies par quelque dix mille personnes d'origine juive, chrétienne, musulmane et aussi bahá'íe. « Exemple vivant du sacrifice de soi », « pilier de la paix », guide de l'humanité sur « le chemin de vérité », voilà quelques-uns des nombreux hommages qui lui seront rendus.
Comme Bahá'u'lláh, 'Abdu'l-Bahá rédigea un testament où il nommait, pour lui succéder, l'aîné de ses petits-fils, Shoghi Effendi, que l'on appellera « le Gardien de la Foi bahá'íe ». Ce faisant, il préservait à son tour l'unité de la communauté bahá'íe et assurait son développement et son avancée.