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LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 24 novembre 2005 : 23:27

En ?crivant son c?l?bre conte en 1697, Charles Perrault se doutait-il que Cendrillon serait si largement reprise ? la sc?ne ?

Histoire simple, heureuse et touchante, ce conte a inspir? de tr?s nombreuses d?adaptations .

il y avait Jacob et Wilhelm Grimm
Charles Perrault
Hans Christian Andersen


et le petit chaperon rouge,
le petit pouce
le chat botte
la belle au bois dormant

Le Petit Chaperon rouge est le conte dont la fortune reste la plus grande,
maintes fois remani?, r?invent?, adapt? selon les traditions, les r?gions, le go?t de l??poque, les langues,le public auquel il s?adresse.

Depuis trois si?cles, chaque illustrateur offre sa propre vision du c?l?bre conte.
Le Chaperon est tour ? tour jeune fille ou fillette, timide ou d?lur?e, coquine ou sage, craintive ou volontaire?
Deux sc?nes sont les plus frequentent:
la rencontre du loup, inqui?tante ou joyeuse, pr?sageant le drame ou n?en laissant rien para?tre ;

et la sc?ne du lit, avec la d?voration cruelle . j'avais tres peur de cette fin attroce!

soly





Re: LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 24 novembre 2005 : 23:32

"Hans Christian Andersen"

Po?te et romancier danois, n? ? Odense le 2 avril 1805, mort le 5 ao?t 1875 ? Rolighed.

Son p?re, descendant d?une riche famille, ?tai tomb? dans une mis?re telle qu?il s??tait fait cordonnier pour vivre et qu?il avait d?, le jour de son mariage, acheter dans une vente publique un catafalque, dont il fit un lit.
C?est sur cette couche ?trange que Hans Christian vint au monde. Orphelin de bonne heure, il entra en apprentissage dans diverses fabriques; mais les m?tiers qu?on essayait de lui apprendre lui inspiraient une vive r?pulsion. Tout son z?le, toute son attention, il les gardait pour les heures qu?il allait de temps ? autre passer ? l??cole des pauvres, ou pour les instants employ?s ? la lecture d?ouvrages qu?on lui pr?tait. Son ambition supr?me ?tait d?entrer au th??tre; il apprenait par c?ur des fragments de com?die ou d?op?ra qu?il d?bitait devant des voisins. Encourag? par les ?loges de ces auditeurs il partit pour Copenhague, emportant pour tout viatique treize rixdalers (trente-trois francs environ). Arriv? dans la capitale, Andersen se pr?senta dans un th??tre de drame; le directeur le trouva trop maigre et refusa de l?engager. Quelque temps apr?s, Andersen qui s??tait mis ? travailler le chant perdit sa voix; il r?solut alors de se faire danseur, mais cette tentative n?eut pas plus de succ?s que les pr?c?dentes. Sur ces entrefaites quelques essais po?tiques, parmi lesquels L?Enfant mourant, attir?rent sur lui l?attention d?Oelenschlaeger, d?Ingermann, du conseiller Collin, qui le firent entrer dans un petit gymnase. Andersen commen?a alors ? apprendre ce que savent la plupart des ?coliers de douze ans; il en avait dix-neuf. Il sortit du coll?ge et, sur la recommandation de ses protecteurs, obtint une bourse pour l?universit? de Copenhague; il avait alors vingt-trois ans. En 1830, il publiait son premier recueil de po?sies qui eut un brillant succ?s. Un an plus tard ses Fantaisies et Esquisses le mettaient au rang des plus grands po?tes du Nord, et lui valaient du roi une pension gr?ce ? laquelle il put visiter l?Allemagne, la Suisse, la France et l?Italie. Il rapporta de ce dernier pays un roman en deux volumes intitul? L?Improvisateur. Apr?s avoir donn? au th??tre Le Mul?tre, drame en quatre actes qui eut beaucoup de succ?s, apr?s avoir publi? la m?me ann?e (1840) le Livre d?images sans images, Andersen partit pour visiter l?Orient; ? son retour en Danemark, il retra?a les principaux souvenirs de ce voyage dans Le Bazar du po?te (1842). Aigri par des critiques et des jalousies litt?raires, il quitta de nouveau sa patrie et parcourut l?Allemagne, la France, l?Angleterre et la Su?de, s?arr?tant seulement dans ses voyages pour publier des romans, des com?dies et des contes. Andersen ?tait commandeur de l?ordre du Danebrog. Ses principaux ouvrages sont, par ordre chronologique : Po?sies (1830); Fantaisies et Esquisses (1831); Esquisses de voyage, L?Improvisateur (1834); Le Bazar du po?te (1842); Conte de ma vie; O-R ? roman dont le titre original d?signe la maison de r?clusion d?Odense (1835); Rien qu?un violoniste (1837); Livre d?images sans images (1840); trois volumes de Contes; Ahasverus, drame philosophique, etc., etc. Les ?uvres compl?te d?Andersen ont ?t? publi?es ? Leipzig, en 1848; elles comprennent 35 volumes, la plupart d?entre elles ont ?t? traduites en fran?ais par MM. Marmier, Soldi, Minssen, Caralp, Jungerssen, P. Royer et Mme Lebrun. La plus populaire de toutes est le Livre d?images sans images, suite d?entretiens de l?auteur avec la Lune; celle-ci vient rendre visite chaque soir au po?te dans sa mansarde; elle lui d?crit les paysages qu?elle a vus de Copenhague aux bords du Gange, du Groenland au Sahara; elle lui dit les contes qu?elle a recueillis ? Venise, dans les ruines de Pomp?i ou sur les rives du fleuve Jaune : ? Peins ce que je te raconte, dit-elle, et tu auras un beau livre d?images. ? Andersen a suivi le conseil et il a ?crit une s?rie de tableaux pleins de chaleur et de couleur, empreints d?une gr?ce po?tique et d?un charme ?trange et doux. Ses Contes ont aussi beaucoup contribu? ? populariser en Europe le nom d?Andersen; ils n?offrent aucune analogie avec les r?cits f?eriques de Perrault, de Mme d?Aulnoy ou des autres conteurs fran?ais. Bien que le fantastique et le merveilleux y jouent le plus souvent un r?le consid?rable, leur allure humoristique, leur port?e philosophique les font parfois ressembler ? des satires plus qu?? des contes d?enfants. Ce qui domine dans toutes les ?uvres d?Andersen, ce qui constitue sa mani?re, c?est la raillerie enjou?e du XVIIIe si?cle alli?e ? la po?sie m?lancolique et r?veuse du Nord et ? une richesse de couleur et d?imagination que le po?te semble avoir rapport?e de ses voyages en Orient.

soly

Re: LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 24 novembre 2005 : 23:37



le chat botte de Charles Perrault

Un meunier ne laissa pour tous biens ? trois enfants qu'il avait, que son moulin, son ?ne et son chat. Les partages furent bient?t faits, ni le notaire, ni le procureur n'y furent point appel?s. Ils auraient eu bient?t mang? tout le pauvre patrimoine. L'a?n? eut le moulin, le second eut l'?ne, et le plus jeune n'eut que le chat. Ce dernier ne pouvait se consoler d'avoir un si pauvre lot: ?Mes fr?res, disait-il, pourront gagner leur vie honn?tement en se mettant ensemble; quant ? moi, lorsque j'aurai mang? mon chat, et que je me serai fait un manchon de sa peau, il faudra que je meure de faim.? Le chat qui entendait ce discours, mais qui n'en fit pas semblant, lui dit d'un air pos? et s?rieux: ?Ne vous affligez point, mon ma?tre, vous n'avez qu'? me donner un sac, et me faire faire une paire de bottes pour aller dans les broussailles, et vous verrez que vous n'?tes pas si mal partag? que vous croyez.? Quoique le ma?tre du chat n'y croyait gu?re, il lui avait vu faire tant de tours de souplesse, pour prendre des rats et des souris, comme quand il se pendait par les pieds, ou qu'il se cachait dans la farine pour faire le mort, qu'il ne d?sesp?ra pas d'en ?tre secouru dans sa mis?re. Lorsque le chat eut ce qu'il avait demand?, il se botta bravement et, mettant son sac ? son cou, il en prit les cordons avec ses deux pattes de devant, et s'en alla dans une garenne o? il y avait grand nombre de lapins. Il mit du son et des lasserons dans son sac, et s'?tendant comme s'il e?t ?t? mort, il attendit que quelque jeune lapin peu instruit encore des ruses de ce monde, vint se fourrer dans son sac pour manger ce qu'il y avait mis. ? peine fut-il couch?, qu'il eut satisfaction; un jeune ?tourdi de lapin entra dans son sac, et le ma?tre chat tirant aussit?t les cordons le prit et le tua sans mis?ricorde. Tout fier de sa proie, il s'en alla chez le roi et demanda ? lui parler. On le fit monter ? l'appartement de sa majest? o?, ?tant entr? il fit une grande r?v?rence au roi, et lui dit: ?Voil?, sire, un lapin de garenne que monsieur le Marquis de Carabas (c'?tait le nom qu'il lui prit en gr? de donner ? son ma?tre), m'a charg? de vous pr?senter de sa part. -- Dis ? ton ma?tre, r?pondit le roi, que je le remercie, et qu'il me fait plaisir.? Une autre fois, il alla se cacher dans du bl?, tenant toujours son sac ouvert; et lorsque deux perdrix y furent entr?es, il tira les cordons, et les prit toutes deux. Il alla ensuite les pr?senter au roi, comme il avait fait avec le lapin de garenne. Le roi re?ut encore avec plaisir les deux perdrix, et lui fit donner ? boire. Le chat continua ainsi pendant deux ou trois mois ? porter de temps en temps au roi du gibier de la chasse de son ma?tre. Un jour qu'il sut que le roi devait aller ? la promenade sur le bord de la rivi?re avec sa fille, la plus belle princesse du monde, il dit ? son ma?tre: ?Si vous voulez suivre mon conseil, votre fortune est faite; vous n'avez qu'? vous baigner dans la rivi?re ? l'endroit que je vous montrerai, et ensuite me laisser faire.? Le Marquis de Carabas fit ce que son chat lui conseillait, sans savoir ? quoi cela serait bon. Pendant qu'il se baignait, le roi vint ? passer, et le chat se mit ? crier de toute ses forces: ?Au secours, au secours, voil? Monsieur le Marquis de Carabas qui se noie!? ? ce cri, le roi mit la t?te ? la porti?re, et reconnaissant le chat qui lui avait apport? tant de fois du gibier, il ordonna ? ses gardes qu'on all?t vite au secours de Monsieur le Marquis de Carabas. Pendant qu'on retirait le pauvre marquis de la rivi?re, le chat s'approcha du carrosse, et dit au roi que dans le temps que son ma?tre se baignait, il ?tait venu des voleurs qui avaient emport? ses habits, quoiqu'il e?t cri? au voleur de toute ses forces; le dr?le les avait cach?s sous une grosse pierre. Le roi ordonna aussit?t aux officiers de sa garde-robe d'aller chercher un de ses plus beaux habits pour monsieur le Marquis de Carabas. Le roi lui fit mille caresses, et comme les beaux habits qu'on venait de lui donner relevaient sa bonne mine (car il ?tait beau, et bien fait de sa personne), la fille du roi le trouva fort ? son gr?, et le Marquis de Carabas ne lui eut pas jet? deux ou trois regards fort respectueux, et un peu tendres, qu'elle en devint amoureuse ? la folie. Le roi voulut qu'il mont?t dans son carrosse, et qu'il f?t de la promenade. Le chat ravi de voir que son dessein commen?ait ? r?ussir, prit les devants, et ayant rencontr? des paysans qui fauchaient un pr?, il leur dit: ?Bonnes gens qui fauchez, si vous ne dites au roi que le pr? que vous fauchez appartient ? Monsieur le Marquis de Carabas, vous serez tous hach?s menu comme chair ? p?t?.? Le roi ne manqua pas ? demander aux faucheurs ? qui ?tait ce pr? qu'ils fauchaient. ?C'est ? monsieur le Marquis de Carabas?, dirent-ils tous ensemble, car la menace du chat leur avait fait peur. ?Vous avez l? un bel h?ritage, dit le roi au Marquis de Carabas. -- Vous voyez, sire, r?pondit le marquis, c'est un pr? qui ne manque point de rapporter abondamment toutes les ann?es.? Le ma?tre chat, qui allait toujours devant, rencontra des moissonneurs, et leur dit: ?Bonnes gens qui moissonnez, si vous ne dites que tous ce bl? appartient ? monsieur le Marquis de Carabas, vous serez tous hach?s menu comme chair ? p?t?.? Le roi, qui passa un moment apr?s, voulut savoir ? qui appartenaient tout ce bl? qu'il voyait. ?C'est ? monsieur le Marquis de Carabas?, r?pondirent les moissonneurs, et le roi s'en r?jouit encore avec le marquis. Le chat, qui allait devant le carrosse, disait toujours la m?me chose ? tous ceux qu'il rencontrait; et le roi ?tait ?tonn? des grands biens de monsieur le Marquis de Carabas. Le ma?tre chat arriva enfin dans un beau ch?teau dont le ma?tre ?tait un ogre, le plus riche qu'on ait jamais vu, car toutes les terres par o? le roi avait pass? ?taient sous la d?pendance de ce ch?teau. Le chat, qui eut soin de s'informer qui ?tait cet ogre, et ce qu'il savait faire, demanda ? lui parler, disant qu'il n'avait pas voulu passer si pr?s de son ch?teau, sans avoir l'honneur de lui faire la r?v?rence. L'ogre le re?ut aussi civilement que le peut un ogre, et le fit reposer. ?On m'a assur?, dit le chat, que vous aviez le don de vous changer en toute sorte d'animaux, que vous pouviez, par exemple, vous transformer en lion, en ?l?phant? -- Cela est vrai, r?pondit l'ogre brusquement, et pour vous le montrer, vous allez me voir devenir lion.? Le chat fut si effray? de voir un lion devant lui, qu'il gagna aussit?t les goutti?res, non sans peine et sans p?ril, car ses bottes ne valaient rien pour marcher sur les tuiles. Quelques temps apr?s le chat, ayant vu que l'ogre avait quitt? sa premi?re forme, descendit, et avoua qu'il avait eu bien peur. ?On m'a assur? encore, dit le chat, mais je ne saurais le croire, que vous aviez aussi le pouvoir de prendre la forme des plus petits animaux, par exemple, de vous changer en un rat, en une souris; je vous avoue que je tiens cela tout ? fait impossible. -- Impossible? reprit l'ogre, vous allez voir?, et aussit?t il se changea en une souris qui se mit ? courir sur le plancher. Le chat ne l'eut pas plus t?t aper?ue qu'il se jeta dessus et la mangea. Cependant le roi, qui vit en passant le beau ch?teau de l'ogre, voulut y entrer. Le chat, qui entendit le bruit du carrosse qui passait sur le pont-levis, courut au-devant, et dit au roi: ?Votre majest? soit la bienvenue dans le ch?teau de monsieur le Marquis de Carabas.
-- Comment Monsieur le Marquis, s'?cria le roi, ce ch?teau est encore ? vous! Il n'y a rien de plus beau que cette cour et que tous ces b?timents qui l'environnent: voyons-en l'int?rieur, s'il vous pla?t.? Le marquis donna la main ? la jeune princesse, et suivant le roi qui montait le premier, ils entr?rent dans une grande salle o? ils trouv?rent une magnifique collation que l'ogre avait fait pr?parer pour ses amis qui devaient venir le voir ce m?me jour, mais qui n'avaient pas os? entrer, sachant que le roi y ?tait. Le roi, charm? des bonnes qualit?s de monsieur le Marquis de Carabas, de m?me que sa fille qui en ?tait folle, et voyant les grands biens qu'il poss?dait, lui dit, apr?s avoir bu cinq ou six coupes: ?Il ne tiendra qu'? vous, Monsieur le Marquis, que vous ne soyez mon gendre.? Le marquis, faisant de grandes r?v?rences, accepta l'honneur que lui faisait le roi; et le m?me jour ?pousa la princesse. Le chat devint grand seigneur, et ne courut plus apr?s les souris que pour se divertir.

vous n'allez jamais croire que ces histoires me passionnent

soly

Re: LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 24 novembre 2005 : 23:40



Lepetit chaperon rouge de Charles Perrault


Il ?tait une fois une petite fille de village, la plus jolie qu'on e?t su voir; sa m?re en ?tait folle, et sa m?re-grand plus folle encore. Cette bonne femme lui fit faire un petit chaperon rouge, qui lui seyait si bien, que partout on l'appelait le petit chaperon rouge.

Un jour sa m?re, ayant cuit et fait des galettes, lui dit: ?Va voir comment se porte ta m?re-grand, car on m'a dit qu'elle ?tait malade, porte-lui une galette et ce petit pot de beurre.? Le petit chaperon rouge partit aussit?t pour aller chez sa m?re-grand, qui demeurait dans un autre village. En passant dans un bois elle rencontra comp?re le loup, qui eut bien envie de la manger, mais il n'osa, ? cause de quelques b?cherons qui ?taient dans la for?t. Il lui demanda o? elle allait; la pauvre enfant, qui ne savait pas qu'il est dangereux de s'arr?ter ? ?couter un loup, lui dit: ?Je vais voir ma m?re-grand, et lui porter une galette avec un petit pot de beurre que ma m?re lui envoie. -- Demeure-t-elle bien loin? lui dit le loup. -- Oh! oui, dit le petit chaperon rouge, c'est par del? le moulin que vous voyez tout l?-bas, l?-bas, ? la premi?re maison du village. -- Eh bien!, dit le loup, je veux y aller voir aussi; je m'y en vais par ce chemin-ci, et toi par ce chemin-l?, et nous verrons qui plus t?t y sera.? Le loup se mit ? courir de toute sa force par le chemin qui ?tait le plus court, et la petite fille s'en alla par le chemin le plus long, s'amusant ? cueillir des noisettes, ? courir apr?s des papillons, et ? faire des bouquets des petites fleurs qu'elle rencontrait. Le loup ne fut pas longtemps ? arriver ? la maison de la m?re-grand; il heurte: Toc, toc. ?Qui est l?? -- C'est votre fille le petit chaperon rouge (dit le loup, en contrefaisant sa voix) qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que ma m?re vous envoie.? La bonne m?re-grand, qui ?tait dans son lit, car elle se trouvait un peu mal, lui cria: ?Tire la chevillette, la bobinette cherra.? Le loup tira la chevillette, et la porte s'ouvrit. Il se jeta sur la bonne femme, et la d?vora en moins de rien; car il y avait plus de trois jours qu'il n'avait mang?. Ensuite il ferma la porte, et s'alla coucher dans le lit de la m?re-grand, en attendant le petit chaperon rouge, qui quelque temps apr?s vint heurter ? la porte. Toc, toc. ?Qui est l???. Le petit chaperon rouge, qui entendit la grosse voix du loup, eut peur d'abord, mais croyant que sa m?re-grand ?tait enrhum?e, r?pondit: ?C'est votre fille le petit chaperon rouge, qui vous apporte une galette et un petit pot de beurre que ma m?re vous envoie.? Le loup lui cria, en adoucissant un peu sa voix: ?Tire la chevillette, la bobinette cherra.? Le petit chaperon rouge tira la chevillette, et la porte s'ouvrit. Le loup, la voyant entrer, lui dit en se cachant dans le lit sous la couverture: ?Mets la galette et le petit pot de beurre sur la huche, et viens te coucher avec moi.? Le petit chaperon rouge se d?shabille, et va se mettre dans le lit, o? elle fut bien ?tonn?e de voir comment sa m?re-grand ?tait faite en son d?shabill?. Elle lui dit: ?Ma m?re-grand que vous avez de grands bras! -- C'est pour mieux t'embrasser ma fille. -- Ma m?re-grand que vous avez de grandes jambes! -- C'est pour mieux courir mon enfant. -- Ma m?re-grand que vous avez de grandes oreilles! -- C'est pour mieux ?couter mon enfant. -- Ma m?re-grand que vous avez de grands yeux! -- C'est pour mieux voir mon enfant. -- Ma m?re-grand que vous avez de grandes dents! -- C'est pour te manger?. Et en disant ces mots, le m?chant loup se jeta sur le petit chaperon rouge, et la mangea.


c'est cette fin qui m'a toujours fait peur
soly

Re: LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 24 novembre 2005 : 23:44



Barbe bleue de Charles Perrault

Il ?tait une fois un homme qui avait de belles maisons ? la ville et ? la campagne, de la vaisselle d'or et d'argent, des meubles en broderie, et des carrosses tout dor?s; mais par malheur cet homme avait la barbe bleue: cela le rendait si laid et si terrible, qu'il n'?tait ni femme ni fille qui ne s'enfuit devant lui. Une de ses voisines, dame de qualit?, avait deux filles parfaitement belles. Il lui en demanda une en mariage, et lui laissa le choix de celle qu'elle voudrait lui donner. Elles n'en voulaient point toutes deux, et se le renvoyaient l'une ? l'autre, ne pouvant se r?soudre ? prendre un homme qui e?t la barbe bleue. Ce qui les d?go?tait encore, c'est qu'il avait d?j? ?pous? plusieurs femmes, et qu'on ne savait pas ce que ces femmes ?taient devenues. Barbe Bleue, pour faire connaissance, les mena avec leur m?re, et trois ou quatre de leurs meilleures amies, et quelques jeunes gens du voisinage, ? une de ses maisons de campagne, o? on demeura huit jours entiers. Ce n'?tait que promenades, que parties de chasse et de p?che, que danses et festins, que collations: on ne dormait point, et on passait toute la nuit ? se faire des malices les uns aux autres; enfin tout alla si bien, que la cadette commen?a ? trouver que le ma?tre du logis n'avait plus la barbe si bleue, et que c'?tait un fort honn?te homme. D?s qu'on fut de retour ? la ville, le mariage se conclut. Au bout d'un mois, Barbe Bleue dit ? sa femme qu'il ?tait oblig? de faire un voyage en province, de six semaines au moins, pour une affaire de cons?quence; qu'il la priait de se bien divertir pendant son absence, qu'elle fit venir ses bonnes amies, qu'elle les men?t ? la campagne si elle voulait, que partout elle fit bonne ch?re: ?Voil?, lui dit-il, les clefs des deux grands garde-meubles, voil? celles de la vaisselle d'or et d'argent qui ne sert pas tous les jours, voil? celles de mes coffres-forts, o? est mon or et mon argent, celles des coffrets o? sont mes pierreries, et voil? le passe-partout de tous les appartements. Pour cette petite clef-ci, c'est la clef du cabinet au bout de la grande galerie de l'appartement bas: ouvrez tout, allez partout, mais pour ce petit cabinet, je vous d?fends d'y entrer, et je vous le d?fends de telle sorte, que s'il vous arrive de l'ouvrir, il n'y a rien que vous ne deviez attendre de ma col?re?. Elle promit d'observer exactement tout ce qui lui venait d'?tre ordonn?; et lui, apr?s l'avoir embrass?e, il monte dans son carrosse, et part pour son voyage. Les voisines et les bonnes amies n'attendirent pas qu'on les envoy?t chercher pour aller chez la jeune mari?e, tant elles avaient d'impatience de voir toutes les richesses de sa maison, n'ayant os? y venir pendant que le mari y ?tait, ? cause de sa barbe bleue qui leur faisait peur. Les voil? aussit?t ? parcourir les chambres, les cabinets, les garde-robes, toutes plus belles et plus riches les unes que les autres. Elles mont?rent ensuite aux garde-meubles, o? elles ne pouvaient assez admirer le nombre et la beaut? des tapisseries, des lits, des sofas, des cabinets, des gu?ridons, des tables et des miroirs, o? l'on se voyait depuis les pieds jusqu'? la t?te, et dont les bordures, les unes de glace, les autres d'argent et de vermeil dor?, ?taient les plus belles et les plus magnifiques qu'on e?t jamais vues. Elles ne cessaient d'exag?rer et d'envier le bonheur de leur amie, qui cependant ne se divertissait point ? voir toutes ces richesses, ? cause de l'impatience qu'elle avait d'aller ouvrir le cabinet de l'appartement bas. Elle fut si press?e de sa curiosit?, que sans consid?rer qu'il ?tait malhonn?te de quitter sa compagnie, elle y descendit par un petit escalier d?rob?, et avec tant de pr?cipitation, qu'elle pensa se rompre le cou deux ou trois fois. ?tant arriv?e ? la porte du cabinet, elle s'y arr?ta quelque temps, songeant ? la d?fense que son mari lui avait faite, et consid?rant qu'il pourrait lui arriver malheur d'avoir ?t? d?sob?issante; mais la tentation ?tait si forte qu'elle ne put la surmonter: elle prit donc la petite clef, et ouvrit en tremblant la porte du cabinet. D'abord elle ne vit rien, parce que les fen?tres ?taient ferm?es; apr?s quelques moments, elle commen?a ? voir que le plancher ?tait tout couvert de sang caill?, et que dans ce sang gisaient les corps de plusieurs femmes mortes et attach?es le long des murs (c'?tait toutes les femmes que Barbe Bleue avait ?pous?es et qu'il avait ?gorg?es l'une apr?s l'autre). Elle pensa mourir de peur, et la clef du cabinet qu'elle venait de retirer de la serrure lui tomba de la main. Apr?s avoir un peu repris ses esprits, elle ramassa la clef, referma la porte, et monta ? sa chambre pour se remettre un peu, mais elle n'en pouvait venir ? bout, tant elle ?tait ?mue. Ayant remarqu? que la clef du cabinet ?tait tach?e de sang, elle l'essuya deux ou trois fois, mais le sang ne s'en allait point; elle eut beau la laver, et m?me la frotter avec du sablon et avec du gr?s, il y demeura toujours du sang, car la clef ?tait magique, et il n'y avait pas moyen de la nettoyer tout ? fait: quand on ?tait le sang d'un c?t?, il revenait de l'autre. Barbe Bleue revint de son voyage d?s le soir m?me, et dit qu'il avait re?u des lettres en chemin, qui lui avaient appris que l'affaire pour laquelle il ?tait parti venait d'?tre termin?e ? son avantage. Sa femme fit tout ce qu'elle put pour lui t?moigner qu'elle ?tait ravie de son prompt retour. Le lendemain il lui redemanda les clefs, et elle les lui donna. Mais d'une main si tremblante, qu'il devina sans peine tout ce qui s'?tait pass?. ?D'o? vient, lui dit-il, que la clef du cabinet n'est point avec les autres?

? Sans doute, dit-elle, que je l'ai laiss?e l?-haut sur ma table.

? Ne manquez pas, dit la Barbe bleue, de me la donner tant?t.? Apr?s l'avoir retard? le plus possible, il fallut apporter la clef. Barbe Bleue, l'ayant examin?e, dit ? sa femme: ?Pourquoi y a-t-il du sang sur cette clef?

? Je n'en sais rien, r?pondit la pauvre femme, plus p?le que la mort.

? Vous n'en savez rien, reprit Barbe Bleue, je le sais bien, moi; vous avez voulu entrer dans le cabinet! H? bien, Madame, vous y entrerez, et irez prendre votre place aupr?s des dames que vous y avez vues.? Elle se jeta aux pieds de son mari, en pleurant et en lui demandant pardon, avec toutes les marques d'un vrai repentir de n'avoir pas ?t? ob?issante. Elle aurait attendri un rocher, belle et afflig?e comme elle ?tait; mais Barbe Bleue avait le coeur plus dur qu'un rocher: ?Il faut mourir, Madame, lui dit-il, et tout ? l'heure.

? Puisqu'il faut mourir, r?pondit-elle, en le regardant, les yeux baign?s de larmes, donnez-moi un peu de temps pour prier Dieu.

? Je vous donne un quart d'heure, reprit Barbe Bleue, mais pas un moment de plus.? Lorsqu'elle fut seule, elle appela sa soeur, et lui dit: ?Ma soeur Anne (car elle s'appelait ainsi), monte, je te prie, sur le haut de la tour, pour voir si mes fr?res ne viennent point; ils m'ont promis qu'ils viendraient me voir aujourd'hui, et si tu les vois, fais-leur signe de se h?ter.? La soeur Anne monta sur le haut de la tour, et la pauvre afflig?e lui criait de temps en temps: ?Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir?? Et la soeur Anne lui r?pondait: ?Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l'herbe qui verdoie.? Cependant Barbe Bleue, tenant un grand couteau ? la main, criait de toute sa force ? sa femme: ?Descends vite, ou je monterai l?-haut.

? Encore un moment s'il vous pla?t?, lui r?pondait sa femme et aussit?t elle criait tout bas: ?Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir?? Et la soeur Anne r?pondait: ?Je ne vois rien que le soleil qui poudroie, et l'herbe qui verdoie.? ?Descends donc vite, criait la Barbe bleue, ou je monterai l?-haut.

? Je m'en vais?, r?pondait sa femme, et puis elle criait: ?Anne, ma soeur
Anne, ne vois-tu rien venir?

? Je vois, r?pondit la soeur Anne, une grosse poussi?re qui vient de ce c?t?-ci.

? Sont-ce mes fr?res?

? H?las! non, ma soeur, c'est un troupeau de moutons.

? Ne veux-tu pas descendre? criait la Barbe bleue.

? encore un moment?, r?pondait sa femme; et puis elle criait: ?Anne, ma soeur Anne, ne vois-tu rien venir?

? Je vois, r?pondit-elle, deux cavaliers qui viennent de ce c?t?-ci, mais ils sont bien loin encore. Dieu soit lou?, s'?cria-t-elle un moment apr?s, ce sont mes fr?res; je leur fais signe tant que je puis de se h?ter.? Barbe Bleue se mit ? crier si fort que toute la maison en trembla. La pauvre femme descendit, et alla se jeter ? ses pieds toute ?plor?e et toute ?chevel?e. ?Cela ne sert de rien, dit Barbe Bleue, il faut mourir.? Puis la prenant d'une main par les cheveux, et de l'autre levant le couteau en l'air, il allait lui trancher la t?te. La pauvre femme se tournant vers lui, et le regardant avec des yeux mourants, le pria de lui donner un petit moment pour se recueillir. ?Non, non, dit-il, recommande-toi bien ? Dieu?; et levant son bras... ? ce moment on heurta si fort ? la porte, que Barbe Bleue s'arr?ta tout court: on ouvrit, et aussit?t on vit entrer deux cavaliers qui, mettant l'?p?e ? la main, coururent droit ? Barbe Bleue. Il reconnut que c'?tait les fr?res de sa femme, l'un dragon et l'autre mousquetaire, de sorte qu'il s'enfuit aussit?t pour se sauver; mais les deux fr?res le poursuivirent de si pr?s, qu'ils l'attrap?rent avant qu'il p?t gagner le perron: ils lui pass?rent leur ?p?e au travers du corps, et le laiss?rent mort. La pauvre femme ?tait presque aussi morte que son mari, et n'avait pas la force de se lever pour embrasser ses fr?res. Il se trouva que Barbe Bleue n'avait point d'h?ritiers, et qu'ainsi sa femme demeura ma?tresse de tous ses biens. Elle en employa une partie ? marier sa soeur Anne avec un jeune gentilhomme, dont elle ?tait aim?e depuis longtemps; une autre partie ? acheter des charges de capitaine ? ses deux fr?res; et le reste ? se marier elle-m?me ? un fort honn?te homme, qui lui fit oublier le mauvais temps qu'elle avait pass? avec Barbe bleue.

celle-la aussi me faisait tres peur

soly


Re: LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 24 novembre 2005 : 23:47



Cendrillon de Charles Perrault


Il ?tait une fois un gentilhomme qui ?pousa en secondes noces une femme, la plus hautaine et la plus fi?re qu'on e?t jamais vue. Elle avait deux filles de son humeur, et qui lui ressemblaient en toutes choses. Le mari avait de son c?t? une jeune fille, mais d'une douceur et d'une bont? sans exemple; elle tenait cela de sa m?re, qui ?tait la meilleure femme du monde. Les noces ne furent pas plus t?t faites, que la belle-m?re fit ?clater sa mauvaise humeur; elle ne put souffrir les bonnes qualit?s de cette jeune enfant, qui rendaient ses filles encore plus ha?ssables. Elle la chargea des plus viles occupations de la maison: c'?tait elle qui nettoyait la vaisselle et les mont?es, qui frottait la chambre de madame, et celles de mesdemoiselles ses filles. Elle couchait tout en haut de la maison, dans un grenier, sur une m?chante paillasse, pendant que ses soeurs ?taient dans des chambres parquet?es, o? elles avaient des lits des plus ? la mode, et des miroirs o? elles se voyaient depuis les pieds jusqu'? la t?te.

La pauvre fille souffrait tout avec patience, et n'osait s'en plaindre ? son p?re qui l'aurait grond?e, parce que sa femme le gouvernait enti?rement. Lorsqu'elle avait fait son ouvrage, elle s'en allait au coin de la chemin?e, et s'asseoir dans les cendres, ce qui faisait qu'on l'appelait commun?ment dans le logis Cucendron. La cadette, qui n'?tait pas si malhonn?te que son a?n?e, l'appelait Cendrillon; cependant Cendrillon, avec ses m?chants habits, ne laissait pas d'?tre cent fois plus belle que ses soeurs, quoique v?tues tr?s magnifiquement.

Il arriva que le fils du roi donna un bal, et qu'il y invita toutes les personnes de qualit?: nos deux demoiselles en furent aussi invit?es, car elles faisaient grande figure dans le pays. Les voil? bien aises et bien occup?es ? choisir les habits et les coiffures qui leur si?raient le mieux; nouvelle peine pour Cendrillon, car c'?tait elle qui repassait le linge de ses soeurs et qui godronnait leurs manchettes: on ne parlait que de la mani?re dont on s'habillerait. ?Moi, dit l'a?n?e, je mettrai mon habit de velours rouge et ma garniture d'Angleterre.

? Moi, dit la cadette, je n'aurai que ma jupe ordinaire; mais par contre, je mettrai mon manteau ? fleurs d'or, et ma barri?re de diamants, qui n'est pas des plus indiff?rentes.? On envoya chercher la bonne coiffeuse, pour dresser les cornettes ? deux rangs, et on fit acheter des mouches de la bonne faiseuse: elles appel?rent Cendrillon pour lui demander son avis, car elle avait bon go?t. Cendrillon les conseilla le mieux du monde, et s'offrit m?me ? les coiffer; ce qu'elles voulurent bien. En les coiffant, elles lui disaient: ?Cendrillon, serais-tu bien aise d'aller au bal?

? H?las, mesdemoiselles, vous vous moquez de moi, ce n'est pas l? ce qu'il me faut.

? Tu as raison, on rirait bien si on voyait un cucendron aller au bal.? Une autre que Cendrillon les aurait coiff?es de travers; mais elle ?tait bonne, et elle les coiffa parfaitement bien. Elles furent pr?s de deux jours sans manger, tant elles ?taient emplies de joie. On rompit plus de douze lacets ? force de les serrer pour leur rendre la taille plus menue, et elles ?taient toujours devant leur miroir. Enfin l'heureux jour arriva, on partit, et Cendrillon les suivit des yeux le plus longtemps qu'elle put; lorsqu'elle ne les vit plus, elle se mit ? pleurer. Sa marraine, qui la vit toute en pleurs, lui demanda ce qu'elle avait: ?Je voudrais bien... je voudrais bien...? Elle pleurait si fort qu'elle ne put achever. Sa marraine, qui ?tait f?e, lui dit: ?Tu voudrais bien aller au bal, n'est-ce pas?

? H?las oui, dit Cendrillon en soupirant.

? H? bien, seras-tu bonne fille? dit sa marraine, je t'y ferai aller.? Elle la mena dans sa chambre, et lui dit: ?Va dans le jardin et apporte-moi une citrouille.? Cendrillon alla aussit?t cueillir la plus belle qu'elle put trouver, et la porta ? sa marraine, ne pouvant deviner comment cette citrouille pourrait la faire aller au bal. Sa marraine la creusa, et n'ayant laiss? que l'?corce, la frappa de sa baguette, et la citrouille fut aussit?t chang?e en un beau carrosse tout dor?. Ensuite elle alla regarder dans sa sourici?re, o? elle trouva six souris toutes en vie; elle dit ? Cendrillon de lever un peu la trappe de la sourici?re, et ? chaque souris qui sortait, elle lui donnait un coup de sa baguette, et la souris ?tait aussit?t chang?e en un beau cheval; ce qui fit un bel attelage de six chevaux, d'un beau gris de souris pommel?. Comme elle ?tait en peine de quoi elle ferait un cocher: ?Je vais voir, dit Cendrillon, s'il n'y a point quelque rat dans la rati?re, nous en ferons un cocher.

? Tu as raison, dit sa marraine, va voir.? Cendrillon lui apporta la rati?re, o? il y avait trois gros rats. La f?e en prit un d'entre les trois, ? cause de sa ma?tresse barbe, et l'ayant touch?, il fut chang? en un gros cocher, qui avait une des plus belles moustaches qu'on ait jamais vues.

Ensuite elle lui dit: ?Va dans le jardin, tu y trouveras six l?zards derri?re l'arrosoir, apporte-les-moi. Elle ne les eut pas plus t?t apport?s, que la marraine les changea en six laquais, qui mont?rent aussit?t derri?re le carrosse avec leurs habits chamarr?s, et qui s'y tenaient accroch?s, comme s'ils n'eussent fait autre chose toute leur vie. La f?e dit alors ? Cendrillon: ?H? bien, voil? de quoi aller au bal, n'es-tu pas bien aise?

? Oui, mais est-ce que j'irai comme ?a avec mes vilains habits?? Sa marraine ne fit que la toucher avec sa baguette, et en m?me temps ses habits furent chang?s en des habits de drap d'or et d'argent tout chamarr?s de pierreries; elle lui donna ensuite une paire de pantoufles de verre, les plus jolies du monde. Quand elle fut ainsi par?e, elle monta en carrosse; mais sa marraine lui recommanda instamment de ne pas d?passer minuit, l'avertissant que si elle demeurait au bal un moment de plus, son carrosse redeviendrait citrouille, ses chevaux des souris, ses laquais des l?zards, et que ses vieux habits reprendraient leur premi?re forme. Elle promit ? sa marraine qu'elle ne manquerait pas de sortir du bal avant minuit. Elle part, ne se sentant pas de joie. Le fils du roi, qu'on alla avertir qu'il venait d'arriver une grande princesse qu'on ne connaissait point, courut la recevoir; il lui donna la main ? la descente du carrosse, et la mena dans la salle o? ?tait la compagnie. Il se fit alors un grand silence; on cessa de danser, et les violons ne jou?rent plus, tant on ?tait attentif ? contempler les grandes beaut?s de cette inconnue. On n'entendait qu'un bruit confus: ?Ha, qu'elle est belle!? Le roi m?me, tout vieux qu'il ?tait, ne lassait pas de la regarder, et de dire tout bas ? la reine qu'il y avait longtemps qu'il n'avait vu une si belle et si aimable dame. Toutes les dames ?taient attentives ? consid?rer sa coiffure et ses habits, pour en avoir d?s le lendemain de semblables, pourvu qu'il se trouv?t des ?toffes assez belles, et des ouvriers assez habiles. Le fils du roi la mit ? la place d'honneur, et ensuite la prit pour la mener danser: elle dansa avec tant de gr?ce, qu'on l'admira encore davantage. On apporta une fort belle collation, dont le jeune prince ne mangea point, tant il ?tait occup? ? la contempler. Elle alla s'asseoir aupr?s de ses soeurs, et leur fit mille honn?tet?s: elle leur fit part des oranges et des citrons que le Prince lui avait donn?s, ce qui les ?tonna fort, car elles ne la connaissaient point. Lorsqu'elles causaient ainsi, Cendrillon entendit sonner onze heures trois quarts: elle fit aussit?t une grande r?v?rence ? la compagnie, et s'en alla le plus vite qu'elle put.

D?s qu'elle fut arriv?e, elle alla trouver sa marraine, et apr?s l'avoir remerci?e, elle lui dit qu'elle souhaiterait bien aller encore le lendemain au bal, parce que le fils du roi l'en avait pri?e. Comme elle ?tait occup?e ? raconter ? sa marraine tout ce qui s'?tait pass? au bal, les deux soeurs frapp?rent ? la porte; Cendrillon alla leur ouvrir: ?Que vous avez mis longtemps ? revenir!? leur dit-elle en b?illant, en se frottant les yeux, et en s'?tendant comme si elle n'e?t fait que de se r?veiller; elle n'avait cependant pas eu envie de dormir depuis qu'elles s'?taient quitt?es. ?Si tu ?tais venue au bal, lui dit une de ses soeurs, tu ne t'y serais pas ennuy?e: il y est venu la plus belle princesse, la plus belle qu'on puisse jamais voir; elle nous a fait mille civilit?s, elle nous a donn? des oranges et des citrons.? Cendrillon ne se sentait pas de joie: elle leur demanda le nom de cette princesse; mais elles lui r?pondirent qu'on ne la connaissait pas, que le fils du roi en ?tait fort en peine, et qu'il donnerait toutes choses au monde pour savoir qui elle ?tait. Cendrillon sourit et leur dit: ?Elle ?tait donc bien belle? Mon Dieu, que vous ?tes heureuses, ne pourrais-je point la voir? H?las! Mademoiselle Javotte, pr?tez-moi votre habit jaune que vous mettez tous les jours.

? Vraiment, dit Mademoiselle Javotte, je suis de cet avis! Pr?tez votre habit ? un vilain cucendron comme cela, il faudrait que je fusse bien folle.? Cendrillon s'attendait bien ? ce refus, et elle en fut bien aise, car elle aurait ?t? grandement embarrass?e si sa soeur e?t bien voulu lui pr?ter son habit. Le lendemain les deux soeurs furent au bal, et Cendrillon aussi, mais encore plus par?e que la premi?re fois. Le fils du roi fut toujours aupr?s d'elle, et ne cessa de lui conter des douceurs; la jeune demoiselle ne s'ennuyait point, et oublia ce que sa marraine lui avait recommand?; de sorte qu'elle entendit sonner le premier coup de minuit, lorsqu'elle ne croyait pas qu'il f?t encore onze heures: elle se leva et s'enfuit aussi l?g?rement qu'aurait fait une biche. Le prince la suivit, mais il ne put l'attraper; elle laissa tomber une de ses pantoufles de verre, que le prince ramassa bien soigneusement. Cendrillon arriva chez elle bien essouffl?e, sans carrosse, sans laquais, et avec ses m?chants habits, rien ne lui ?tant rest? de toute sa magnificence qu'une de ses petites pantoufles, la pareille de celle qu'elle avait laiss?e tomber. On demanda aux gardes de la porte du palais s'ils n'avaient point vu sortir une princesse; ils dirent qu'ils n'avaient vu sortir personne, qu'une jeune fille fort mal v?tue, et qui avait plus l'air d'une paysanne que d'une demoiselle.

Quand ses deux soeurs revinrent du bal, Cendrillon leur demanda si elles s'?taient encore bien diverties, et si belle dame y avait ?t?. Elles lui dirent que oui, mais qu'elle s'?tait enfuie lorsque minuit avait sonn?, et si promptement qu'elle avait laiss? tomber une de ses petites pantoufles de verre, la plus jolie du monde; que le fils du roi l'avait ramass?e, et qu'il n'avait fait que la regarder pendant tout le reste du bal, et qu'assur?ment il ?tait fort amoureux de la belle dame ? qui appartenait la petite pantoufle. Elles dirent vrai, car peu de jours apr?s, le fils du roi fit publier ? son de trompe qu'il ?pouserait celle dont le pied serait bien juste ? la pantoufle. On commen?a ? l'essayer aux princesses, ensuite aux duchesses, et ? toute la cour, mais inutilement. On la porta chez les deux soeurs, qui firent tout leur possible pour faire entrer leur pied dans la pantoufle, mais elles ne purent en venir ? bout. Cendrillon qui les regardait, et qui reconnut sa pantoufle, dit en riant: ?Que je voie si elle ne me serait pas bonne!? Ses soeurs se mirent ? rire et ? se moquer d'elle.

Le gentilhomme qui faisait l'essai de la pantoufle, ayant regard? attentivement Cendrillon, et la trouvant fort belle, dit que cela ?tait juste, et qu'il avait ordre de l'essayer ? toutes les filles. Il fit asseoir Cendrillon, et approchant la pantoufle de son petit pied, il vit qu'elle y entrait sans peine, et qu'elle y ?tait juste comme de cire. L'?tonnement des deux soeurs fut grand, mais plus grand encore quand Cendrillon tira de sa poche l'autre petite pantoufle qu'elle mit ? son pied. L?-dessus arriva la marraine qui, ayant donn? un coup de sa baguette sur les habits de Cendrillon , les fit devenir encore plus magnifiques que tous les autres.

Alors ses deux soeurs la reconnurent pour la belle dame qu'elles avaient vue au bal. Elles se jet?rent ? ses pieds pour lui demander pardon de tous les mauvais traitements qu'elles lui avaient fait souffrir. Cendrillon les releva, et leur dit, en les embrassant, qu'elle leur pardonnait de bon coeur, et qu'elle les priait de l'aimer bien toujours. On la mena chez le jeune prince, par?e comme elle ?tait: il la trouva encore plus belle que jamais, et peu de jours apr?s il l'?pousa. Cendrillon, qui ?tait aussi bonne que belle, fit loger ses deux soeurs au palais, et les maria d?s le jour m?me ? deux grands seigneurs de la cour.

soly

Re: LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 24 novembre 2005 : 23:50

Riquet ? la houppe de Charles Perrault


Il ?tait une fois une reine qui accoucha d'un fils, si laid et si mal fait, qu'on douta longtemps s'il avait forme humaine. Une f?e qui se trouva ? sa naissance assura qu'il ne laisserait pas d'?tre aimable, parce qu'il aurait beaucoup d'esprit; elle ajouta m?me qu'il pourrait, en vertu du don qu'elle venait de lui faire, donner autant d'esprit qu'il en aurait ? celle qu'il aimerait le mieux. Tout cela consola un peu la pauvre reine, qui ?tait bien afflig?e d'avoir mis au monde un si vilain marmot. Il est vrai que cet enfant ne commen?a pas plus t?t ? parler qu'il dit mille jolies choses, et qu'il avait dans toutes ses actions je ne sais quoi de si spirituel, qu'on en ?tait charm?. J'oubliais de dire qu'il vint au monde avec une petite houppe de cheveux sur la t?te, ce qui fit qu'on le nomma Riquet ? la houppe, car Riquet ?tait le nom de la famille.

Au bout de sept ou huit ans, la reine d'un royaume voisin accoucha de deux filles. La premi?re qui vint au monde ?tait plus belle que le jour: la reine en fut si aise, qu'on appr?henda que la trop grande joie qu'elle en avait ne lui fit mal. La m?me f?e qui avait assist? ? la naissance du petit Riquet ? la houppe ?tait pr?sente, et pour mod?rer la joie de la reine, elle lui d?clara que cette petite princesse n'aurait point d'esprit, et qu'elle serait aussi stupide qu'elle ?tait belle. Cela mortifia beaucoup la reine; mais elle eut quelques moments apr?s un bien plus grand chagrin, car la seconde fille dont elle accoucha se trouva extr?mement laide. ?Ne vous affligez point tant, Madame, lui dit la f?e; votre fille sera r?compens?e d'ailleurs, et elle aura tant d'esprit, qu'on ne s'apercevra presque pas qu'il lui manque de la beaut?. -- Dieu le veuille, r?pondit la reine, mais n'y aurait-il point moyen de faire avoir un peu d'esprit ? l'a?n?e qui est si belle? -- Je ne puis rien pour elle, Madame, du c?t? de l'esprit, lui dit la f?e, mais je puis tout du c?t? de la beaut?; et comme il n'y a rien que je ne veuille faire pour votre satisfaction, je vais lui donner pour don de pouvoir rendre beau qui lui plaira.? ? mesure que ces deux princesses devinrent grandes, leurs perfections cr?rent aussi avec elles, et on ne parlait partout que de la beaut? de l'a?n?e, et de l'esprit de la cadette. Il est vrai aussi que leurs d?fauts augment?rent beaucoup avec l'?ge. La cadette enlaidissait ? vue d'oeil, et l'a?n?e devenait plus stupide de jour en jour. Ou elle ne r?pondait rien ? ce qu'on lui demandait, ou elle disait une sottise. Elle ?tait avec cela si maladroite qu'elle n'e?t pu ranger quatre porcelaines sur le bord d'une chemin?e sans en casser une, ni boire un verre d'eau sans en r?pandre la moiti? sur ses habits. Quoique la beaut? soit un grand avantage chez une jeune femme, cependant la cadette l'emportait presque toujours sur son a?n?e dans toutes les soir?es. D'abord on allait du c?t? de la plus belle pour la voir et pour l'admirer, mais bient?t apr?s, on allait ? celle qui avait le plus d'esprit, pour lui entendre dire mille choses agr?ables, et on ?tait ?tonn? qu'en moins d'un quart d'heure l'a?n?e n'avait plus personne aupr?s d'elle, et que tout le monde s'?tait rang? autour de la cadette. L'a?n?e, quoique fort stupide, le remarqua bien, et elle e?t donn? sans regret toute sa beaut? pour avoir la moiti? de l'esprit de sa soeur. La reine, toute sage qu'elle ?tait, ne put s'emp?cher de lui reprocher plusieurs fois sa b?tise, ce qui pensa faire mourir de douleur cette pauvre princesse. Un jour qu'elle s'?tait retir?e dans un bois pour y plaindre son malheur, elle vit venir ? elle un petit homme fort laid et fort d?sagr?able, mais v?tu tr?s magnifiquement. C'?tait le jeune prince Riquet ? la houppe, qui ?tant devenu amoureux d'elle d'apr?s ses portraits qui circulaient par tout le monde, avait quitt? le royaume de son p?re pour avoir le plaisir de la voir et de lui parler. Ravi de la rencontrer ainsi toute seule, il l'aborde avec tout le respect et toute la politesse imaginables. Ayant remarqu?, apr?s lui avoir fait les compliments ordinaires, qu'elle ?tait fort m?lancolique, il lui dit: ?Je ne comprends point, Madame, comment quelqu'un aussi belle que vous l'?tes peut ?tre aussi triste que vous le paraissez; car, quoique je puisse me vanter d'avoir vu une infinit? de belles dames, je puis dire que je n'en ai jamais vu dont la beaut? approche de la v?tre. -- Cela vous pla?t ? dire, Monsieur?, lui r?pondit la princesse, et en demeure l?. ?La beaut?, reprit Riquet ? la houppe, est un si grand avantage qu'il doit tenir lieu de tout le reste; et quand on le poss?de, je ne vois pas qu'il y ait rien qui puisse nous affliger beaucoup. -- J'aimerais mieux, dit la princesse, ?tre aussi laide que vous et avoir de l'esprit, que d'avoir de la beaut? comme j'en ai, et ?tre b?te autant que je le suis. -- Il n'y a rien, Madame, qui marque davantage qu'on a de l'esprit, que de croire n'en pas avoir, et il est de la nature de ce bien-l?, que plus on en a, plus on croit en manquer. -- Je ne sais pas cela, dit la princesse, mais je sais bien que je suis fort b?te, et c'est de l? que vient le chagrin qui me tue. -- Si ce n'est que cela, Madame, qui vous afflige, je puis ais?ment mettre fin ? votre douleur. -- Et comment ferez-vous? dit la princesse. -- J'ai le pouvoir, Madame, dit Riquet ? la houppe, de donner de l'esprit autant qu'on en saurait avoir ? celle que je dois aimer le plus; et comme vous ?tes, Madame, celle-l?, il n'en tiendra qu'? vous que vous n'ayez autant d'esprit qu'on en peut avoir, pourvu que vous vouliez bien m'?pouser.? La princesse demeura toute interdite, et ne r?pondit rien. ?Je vois, reprit Riquet ? la houppe, que cette proposition vous fait de la peine, et je ne m'en ?tonne pas; mais je vous donne un an tout entier pour vous y r?soudre.? La princesse avait si peu d'esprit, et en m?me temps une si grande envie d'en avoir, qu'elle s'imagina que la fin de cette ann?e ne viendrait jamais; de sorte qu'elle accepta la proposition qui lui ?tait faite. Elle n'eut pas plus t?t promis ? Riquet ? la houppe qu'elle l'?pouserait dans un an ? pareil jour, qu'elle se sentit tout autre qu'elle n'?tait auparavant; elle se trouva une facilit? incroyable ? dire tout ce qui lui plaisait, et ? le dire d'une mani?re fine, ais?e et naturelle. Elle commen?a d?s ce moment une conversation galante et soutenue avec Riquet ? la houppe, o? elle brilla d'une telle force que Riquet ? la houppe crut lui avoir donn? plus d'esprit qu'il ne s'en ?tait r?serv? pour lui-m?me. Quand elle fut retourn?e au palais, toute la cour ne savait que penser d'un changement si subit et si extraordinaire, car autant qu'on lui avait entendu dire d'impertinences auparavant, autant lui entendait-on dire des choses bien sens?es et infiniment spirituelles. Toute la cour en eut une joie qui ne peut s'imaginer; il n'y eut que sa cadette qui n'en fut pas bien aise, parce que n'ayant plus sur son a?n?e l'avantage de l'esprit, elle ne paraissait plus aupr?s d'elle qu'une guenon fort d?sagr?able. Le roi se conduisait selon ses avis, et allait m?me quelquefois tenir le conseil dans son appartement. Le bruit de ce changement s'?tant r?pandu, tous les jeunes princes des royaumes voisins firent grands efforts pour s'en faire aimer, et presque tous la demand?rent en mariage; mais elle n'en trouvait point qui e?t assez d'esprit, et elle les ?coutait tous sans s'engager avec l'un d'eux. Cependant il en vint un si puissant, si riche, si spirituel et si bien fait, qu'elle ne put s'emp?cher d'avoir de la bonne volont? pour lui. Son p?re, s'en ?tant aper?u, lui dit qu'il la faisait la ma?tresse sur le choix d'un ?poux, et qu'elle n'avait qu'? se d?clarer. Comme plus on a d'esprit et plus on a de peine ? prendre une ferme r?solution sur cette affaire, elle demanda, apr?s avoir remerci? son p?re, qu'il lui donn?t du temps pour y penser. Elle alla par hasard se promener dans le m?me bois o? elle avait trouv? Riquet ? la houppe, pour r?ver plus commod?ment ? ce qu'elle avait ? faire. Dans le temps qu'elle se promenait, r?vant profond?ment, elle entendit un bruit sourd sous ses pieds, comme de plusieurs gens qui vont et viennent et qui agissent. Ayant pr?t? l'oreille plus attentivement, elle entendit que l'un disait: ?Apporte-moi cette marmite?; l'autre: ?Donne-moi cette chaudi?re?; l'autre: ?Mets du bois dans ce feu.? La terre s'ouvrit dans le m?me temps, et elle vit sous ses pieds comme une grande cuisine pleine de cuisiniers, de marmitons et de toutes sortes d'officiers n?cessaires pour faire un festin magnifique. Il en sortit une bande de vingt ou trente r?tisseurs, qui all?rent se camper dans une all?e du bois autour d'une table fort longue, et qui tous, la lardoire ? la main, et la queue de renard sur l'oreille, se mirent ? travailler en cadence au son d'une chanson harmonieuse. La princesse, ?tonn?e de ce spectacle, leur demanda pour qui ils travaillaient. ?C'est, Madame, lui r?pondit le plus apparent de la bande, pour le prince Riquet ? la houppe, dont les noces se feront demain.? La princesse, encore plus surprise qu'elle ne l'avait ?t?, et se ressouvenant tout ? coup qu'il y avait un an qu'? pareil jour elle avait promis d'?pouser le prince Riquet ? la houppe, elle pensa tomber de son haut. Ce qui faisait qu'elle ne s'en souvenait pas, c'est que, quand elle fit cette promesse, elle ?tait b?te, et qu'en prenant le nouvel esprit que le prince lui avait donn?, elle avait oubli? toutes ses sottises. Elle n'eut pas fait trente pas en continuant sa promenade, que Riquet ? la houppe se pr?senta ? elle, brave, magnifique, et comme un prince qui va se marier. ?Vous me voyez, dit-il, Madame, exact ? tenir ma parole, et je ne doute point que vous ne veniez ici pour ex?cuter la v?tre, et me rendre, en me donnant la main, le plus heureux de tous les hommes. -- Je vous avouerai franchement, r?pondit la princesse, que je n'ai pas encore pris ma d?cision l?-dessus, et que je ne crois pas pouvoir jamais la prendre comme vous la souhaitez. -- Vous m'?tonnez, Madame, lui dit Riquet ? la houppe. -- Je le crois, dit la princesse, et assur?ment si j'avais affaire ? un brutal, ? un homme sans esprit, je me trouverais bien embarrass?e. Une princesse n'a que sa parole, me dirait-il, et il faut que vous m'?pousiez, puisque vous me l'avez promis; mais comme celui ? qui je parle est l'homme du monde qui a le plus d'esprit, je suis s?re qu'il entendra raison. Vous savez que, quand j'?tais b?te, je ne pouvais n?anmoins me r?soudre ? vous ?pouser; comment voulez-vous qu'ayant l'esprit que vous m'avez donn?, qui me rend encore plus difficile en gens que je n'?tais, je prenne aujourd'hui une d?cision que je n'ai pu prendre dans ce temps-l?? Si vous pensiez tout de bon ? m'?pouser, vous avez eu grand tort de m'?ter ma b?tise, et de me faire voir plus clair que je ne voyais. -- Si un homme sans esprit, r?pondit Riquet ? la houppe, serait bien re?u, comme vous venez de le dire, ? vous reprocher votre manque de parole, pourquoi voulez-vous, Madame, que je n'en use pas de m?me, dans une chose o? il y va de tout le bonheur de ma vie? Est-il raisonnable que ceux qui ont de l'esprit soient d'une pire condition que ceux qui n'en ont pas? Pouvez-vous le pr?tendre, vous qui en avez tant, et qui avez tant souhait? d'en avoir? Mais venons au fait, s'il vous pla?t: ? la r?serve de ma laideur, y a-t-il quelque chose en moi qui vous d?plaise? ?tes-vous mal contente de ma naissance, de mon esprit, de mon humeur, et de mes mani?res? -- Nullement, r?pondit la princesse, j'aime en vous tout ce que vous venez de me dire. -- Si cela est ainsi, reprit Riquet ? la houppe, je vais ?tre heureux, puisque vous pouvez me rendre le plus aimable de tous les hommes. -- Comment cela se peut-il? lui dit la Princesse. -- Cela se fera, r?pondit Riquet ? la houppe, si vous m'aimez assez pour souhaiter que cela soit; et afin, Madame, que vous n'en doutiez pas, sachez que la m?me f?e qui au jour de ma naissance me fit le don de pouvoir rendre spirituelle qui me plairait, vous a aussi fait le don de pouvoir rendre beau celui que vous aimerez, et ? qui vous voudrez bien faire cette faveur. -- Si la chose est ainsi, dit la princesse, je souhaite de tout mon coeur que vous deveniez le prince du monde le plus beau et le plus aimable; et je vous en fais le don autant qu'il m'est possible.? La princesse n'eut pas plus t?t prononc? ces paroles, que Riquet ? la houppe parut ? ses yeux l'homme du monde le plus beau, le mieux fait, et le plus aimable qu'elle e?t jamais vu. Quelques-uns assurent que ce ne furent point les charmes de la f?e qui op?r?rent, mais que l'amour seul fit cette m?tamorphose. Ils disent que la princesse ayant fait r?flexion sur la pers?v?rance de son amant, sur sa discr?tion, et sur toutes les bonnes qualit?s de son ?me et de son esprit, ne vit plus la difformit? de son corps, ni la laideur de son visage, que sa bosse ne lui sembla plus que le bon air d'un homme qui fait le gros dos; et qu'au lieu que jusqu'alors elle l'avait vu boiter effroyablement, elle ne lui trouva plus qu'un certain air pench? qui la charmait; ils disent encore que ses yeux, qui ?taient louches, ne lui en parurent que plus brillants, que leur d?r?glement passa dans son esprit pour la marque d'un violent exc?s d'amour, et qu'enfin son gros nez rouge eut pour elle quelque chose de martial et d'h?ro?que. Quoi qu'il en soit, la princesse lui promit sur-le-champ de l'?pouser, pourvu qu'il en obtint le consentement du roi son p?re. Le roi ayant su que sa fille avait beaucoup d'estime pour Riquet ? la houppe, qu'il connaissait d'ailleurs pour un prince tr?s spirituel et tr?s sage, le re?ut avec plaisir pour son gendre. D?s le lendemain les noces furent faites, ainsi que Riquet ? la houppe l'avait pr?vu, et selon les ordres qu'il en avait donn?s longtemps auparavant.

soly

Re: LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 24 novembre 2005 : 23:53

La belle au bois dormant

Charles Perrault


Il ?tait une fois un roi et une reine qui ?taient si f?ch?s de n'avoir point d'enfants, si f?ch?s qu'on ne saurait dire. Ils all?rent ? toutes les eaux du monde, voeux, p?lerinages, menues d?votions; tout fut mis en oeuvre, et rien n'y faisait. Enfin pourtant la reine devint grosse, et accoucha d'une fille: on fit un beau bapt?me; on donna pour marraines ? la petite princesse toutes les f?es qu'on p?t trouver dans le pays (il s'en trouva sept), afin que chacune d'elles lui faisant un don, comme c'?tait la coutume des f?es en ce temps-l?, la princesse e?t par ce moyen toutes les perfections imaginables. Apr?s les c?r?monies du bapt?me toute la compagnie revint au palais du roi, o? il y avait un grand festin pour les f?es. On mit devant chacune d'elles un couvert magnifique, avec un ?tui d'or massif, o? il y avait une cuiller, une fourchette, et un couteau de fin or, garni de diamants et de rubis. Mais comme chacun prenait sa place ? table. On vit entrer une vieille f?e qu'on n'avait point pri?e parce qu'il y avait plus de cinquante ans qu'elle n'?tait sortie d'une tour et qu'on la croyait morte, ou enchant?e. Le roi lui fit donner un couvert, mais il n'y eut pas moyen de lui donner un ?tui d'or massif, comme aux autres, parce que l'on n'en avait fait faire que sept pour les sept f?es. La vieille crut qu'on la m?prisait, et grommela quelques menaces entre ses dents. Une des jeunes f?es qui se trouva aupr?s d'elle l'entendit, et jugeant qu'elle pourrait donner quelque f?cheux don ? la petite princesse, alla, d?s qu'on fut sorti de table, se cacher derri?re la tapisserie, afin de parler la derni?re, et de pouvoir r?parer autant qu'il lui serait possible le mal que la vieille aurait fait. Cependant les f?es commenc?rent ? faire leurs dons ? la princesse. La plus jeune lui donna pour don qu'elle serait la plus belle du monde, celle d'apr?s qu'elle aurait de l'esprit comme un ange, la troisi?me qu'elle aurait une gr?ce admirable ? tout ce qu'elle ferait, la quatri?me qu'elle danserait parfaitement bien, la cinqui?me qu'elle chanterait comme un rossignol, et la sixi?me qu'elle jouerait de toutes sortes d'instruments ? la perfection. Le rang de la vieille f?e ?tant venu, elle dit en branlant la t?te, encore plus de d?pit que de vieillesse, que la princesse se percerait la main d'un fuseau, et qu'elle en mourrait. Ce terrible don fit fr?mir toute la compagnie, et il n'y eut personne qui ne pleur?t. Dans ce moment la jeune f?e sortit de derri?re la tapisserie, et dit tout haut ces paroles: ?Rassurez-vous, roi et reine, votre fille n'en mourra pas: il est vrai que je n'ai pas assez de puissance pour d?faire enti?rement ce que mon ancienne a fait. La princesse se percera la main d'un fuseau; mais au lieu d'en mourir, elle tombera seulement dans un profond sommeil qui durera cent ans, au bout desquels le fils d'un roi viendra la r?veiller.? Le roi, pour t?cher d'?viter le malheur annonc? par la vieille, fit publier aussit?t un ?dit, par lequel il d?fendait ? tous de filer au fuseau, ni d'avoir des fuseaux chez soi sous peine de mort. Au bout de quinze ou seize ans, le roi et la reine ?tant all?s ? une de leurs maisons de plaisance, il arriva que la jeune princesse courant un jour dans le ch?teau, et montant de chambre en chambre, alla jusqu'au haut d'un donjon dans un petit galetas, o? une bonne vieille ?tait seule ? filer sa quenouille. Cette bonne femme n'avait point entendu parler des d?fenses que le roi avait faites de filer au fuseau. ?Que faites-vous l?, ma bonne femme? dit la princesse. - Je file, ma belle enfant, lui r?pondit la vieille qui ne la connaissait pas. - Ha! que cela est joli, reprit la princesse, comment faites-vous? Donnez-moi que je voie si j'en ferais bien autant.? Elle n'eut pas plus t?t pris le fuseau, que comme elle ?tait fort vive, un peu ?tourdie, et que d'ailleurs l'arr?t des f?es l'ordonnait ainsi, elle s'en per?a la main, et tomba ?vanouie. La bonne vieille, bien embarrass?e, crie au secours: on vient de tous c?t?s, on jette de l'eau au visage de la princesse, on la d?lace, on lui frappe dans les mains, on lui frotte les tempes avec de l'eau de la reine de Hongrie; mais rien ne la faisait revenir. Alors le roi, qui ?tait mont? au bruit, se souvint de la pr?diction des f?es, et jugeant bien qu'il fallait que cela arriv?t, puisque les f?es l'avaient dit, fit mettre la princesse dans le plus bel appartement du palais, sur un lit en broderie d'or et d'argent. On e?t dit d'un ange, tant elle ?tait belle; car son ?vanouissement n'avait pas ?t? les couleurs vives de son teint: ses joues ?taient incarnates, et ses l?vres comme du corail; elle avait seulement les yeux ferm?s, mais on l'entendait respirer doucement, ce qui montrait bien qu'elle n'?tait pas morte. Le roi ordonna qu'on la laiss?t dormir, jusqu'? ce que son heure de se r?veiller f?t venue. La bonne f?e qui lui avait sauv? la vie, en la condamnant ? dormir cent ans, ?tait dans le royaume de Mataquin, ? douze mille lieues de l?, lorsque l'accident arriva ? la princesse; mais elle en fut avertie en un instant par un petit nain, qui avait des bottes de sept lieues (c'?tait des bottes avec lesquelles on faisait sept lieues d'une seule enjamb?e). La f?e partit aussit?t, et on la vit au bout d'une heure arriver dans un chariot tout de feu, tra?n? par des dragons. Le roi lui alla pr?senter la main ? la descente du chariot. Elle approuva tout ce qu'il avait fait; mais comme elle ?tait grandement pr?voyante, elle pensa que quand la princesse viendrait ? se r?veiller, elle serait bien embarrass?e toute seule dans ce vieux ch?teau. Voici ce qu'elle fit: elle toucha de sa baguette tout ce qui ?tait dans ce ch?teau (hors le roi et la reine), gouvernantes, filles d'honneur, femmes de chambre, gentilshommes, officiers, ma?tres d'h?tel, cuisiniers, marmitons, galopins, gardes, suisses, pages, valets de pied; elle toucha aussi tous les chevaux qui ?taient dans les ?curies, avec les palefreniers, les gros m?tins de basse-cour, et Pouffe, la petite chienne de la princesse, qui ?tait aupr?s d'elle sur son lit. D?s qu'elle les eut touch?s, ils s'endormirent tous, pour ne se r?veiller qu'en m?me temps que leur ma?tresse, afin d'?tre tout pr?ts ? la servir quand elle en aurait besoin: les broches m?mes qui ?taient au feu toutes pleines de perdrix et de faisans s'endormirent, et le feu aussi. Tout cela se fit en un moment; les f?es n'?taient pas longues ? leur besogne. Alors le roi et la reine, apr?s avoir embrass? leur ch?re enfant sans qu'elle s'?veill?t, sortirent du ch?teau, et firent publier des d?fenses ? qui que ce soit d'en approcher. Ces d?fenses n'?taient pas n?cessaires, car il cr?t dans un quart d'heure tout autour du parc une si grande quantit? de grands arbres et de petits, de ronces et d'?pines entrelac?es les unes dans les autres, que b?te ni homme n'y aurait pu passer: en sorte qu'on ne voyait plus que le haut des tours du ch?teau, encore n'?tait-ce que de bien loin. On ne douta point que la f?e n'e?t encore fait l? un tour de son m?tier, afin que la princesse, pendant qu'elle dormirait, n'e?t rien ? craindre des curieux.

Au bout de cent ans, le fils du roi qui r?gnait alors, et qui ?tait d'une autre famille que la princesse endormie, ?tant all? ? la chasse de ce c?t?-l?, demanda ce que c'?tait que ces tours qu'il voyait au-dessus d'un grand bois fort ?pais; chacun lui r?pondit selon qu'il en avait ou? parler. Les uns disaient que c'?tait un vieux ch?teau o? il revenait des esprits; les autres que tous les sorciers de la contr?e y faisaient leur sabbat. La plus commune opinion ?tait qu'un ogre y demeurait, et que l? il emportait tous les enfants qu'il pouvait attraper, pour pouvoir les manger ? son aise, et sans qu'on le p?t suivre, ayant seul le pouvoir de se faire un passage au travers du bois. Le Prince ne savait qu'en croire, lorsqu'un vieux paysan prit la parole, et lui dit: ?Mon prince, il y a plus de cinquante ans que j'ai entendu dire de mon p?re qu'il y avait dans ce ch?teau une princesse, la plus belle du monde; qu'elle devait y dormir cent ans, et qu'elle serait r?veill?e par le fils d'un roi, ? qui elle ?tait r?serv?e.? Le jeune prince ? ce discours se sentit tout de feu; il crut sans h?siter qu'il mettrait fin ? une si belle aventure; et pouss? par l'amour et par la gloire, il r?solut de voir sur-le-champ ce qu'il en ?tait. ? peine s'avan?a-t-il vers le bois, que tous ces grands arbres, ces ronces et ces ?pines s'?cart?rent d'eux-m?mes pour le laisser passer: il marche vers le ch?teau qu'il voyait au bout d'une grande avenue o? il entra, et ce qui le surprit un peu, il vit que personne de ses gens ne l'avait pu suivre, parce que les arbres s'?taient rapproch?s d?s qu'il avait ?t? pass?. Il continuea donc son chemin: un prince jeune et amoureux est toujours vaillant. Il entra dans une grande avant-cour o? tout ce qu'il vit d'abord ?tait capable de le glacer de crainte: c'?tait un silence affreux, l'image de la mort s'y pr?sentait partout, et ce n'?tait que des corps ?tendus d'hommes et d'animaux, qui paraissaient morts. Il reconnut pourtant bien au nez bourgeonn? et ? la face vermeille des Suisses qu'ils n'?taient qu'endormis, et leurs tasses, o? il y avait encore quelques gouttes de vin, montraient assez qu'ils s'?taient endormis en buvant. Il passe une grande cour pav?e de marbre, il monte l'escalier, il entre dans la salle des gardes qui ?taient rang?s en haie, l'arme sur l'?paule, et ronflants de leur mieux. Il traverse plusieurs chambres pleines de gentilshommes et de dames, dormant tous, les uns debout, les autres assis; il entre dans une chambre toute dor?e, et il vit sur un lit, dont les rideaux ?taient ouverts de tous c?t?s, le plus beau spectacle qu'il e?t jamais vu: une princesse qui paraissait avoir quinze ou seize ans, et dont l'?clat resplendissant avait quelque chose de lumineux et de divin. Il s'approcha en tremblant et en admirant, et se mit ? genoux aupr?s d'elle. Alors comme la fin de l'enchantement ?tait venue, la princesse s'?veilla; et le regardant avec des yeux plus tendres qu'une premi?re vue ne semblait le permettre: ?Est-ce vous, mon prince? Lui dit-elle, vous vous ?tes bien fait attendre.? Le prince, charm? de ces paroles, et plus encore de la mani?re dont elles ?taient dites, ne savait comment lui t?moigner sa joie et sa reconnaissance; il l'assura qu'il l'aimait plus que lui-m?me. Ses discours furent mal rang?s, ils en plurent davantage: peu d'?loquence, beaucoup d'amour. Il ?tait plus embarrass? qu'elle, et l'on ne doit pas s'en ?tonner; elle avait eu le temps de songer ? ce qu'elle aurait ? lui dire, car il y a apparence (l'histoire n'en dit pourtant rien) que la bonne f?e, pendant un si long sommeil, lui avait procur? le plaisir des songes agr?ables. Enfin il y avait quatre heures qu'ils se parlaient, et ils ne s'?taient pas encore dit la moiti? des choses qu'ils avaient ? se dire.

Cependant tout le palais s'?tait r?veill? avec la princesse; chacun songeait ? faire sa charge, et comme ils n'?taient pas tous amoureux, ils mouraient de faim; la dame d'honneur, press?e comme les autres, s'impatienta, et dit tout haut ? la princesse que la viande ?tait servie. Le prince aida la princesse ? se lever; elle ?tait tout habill?e et fort magnifiquement; mais il se garda bien de lui dire qu'elle ?tait habill?e comme ma grand-m?re, et qu'elle avait un collet mont?: elle n'en ?tait pas moins belle. Ils pass?rent dans un salon de miroirs, et y soup?rent, servis par les officiers de la princesse; les violons et les hautbois jou?rent de vieilles pi?ces, mais excellentes, quoiqu'il y e?t pr?s de cent ans qu'on ne les jou?t plus; et apr?s souper, sans perdre de temps, le grand aum?nier les maria dans la chapelle du ch?teau, et la dame d'honneur leur tira le rideau: ils dormirent peu, la princesse n'en avait pas grand besoin, et le prince la quitta d?s le matin pour retourner ? la ville, o? son p?re devait ?tre en peine de lui. Le prince lui dit qu'en chassant il s'?tait perdu dans la for?t, et qu'il avait couch? dans la hutte d'un charbonnier, qui lui avait fait manger du pain noir et du fromage. Le roi son p?re, qui ?tait bon homme, le crut, mais sa m?re n'en fut pas bien persuad?e, et voyant qu'il allait presque tous les jours ? la chasse, et qu'il avait toujours une raison pour s'excuser, quand il avait couch? deux ou trois nuits dehors, elle ne douta plus qu'il n'e?t quelque amourette: car il v?cut avec la princesse plus de deux ans entiers, et en eut deux enfants, dont le premier, qui fut une fille, fut nomm?e l'Aurore, et le second un fils, qu'on nomma le Jour, parce qu'il paraissait encore plus beau que sa soeur. La reine dit plusieurs fois ? son fils, pour le faire s'expliquer, qu'il fallait se contenter dans la vie, mais il n'osa jamais lui confier son secret; il la craignait quoiqu'il l'aim?t, car elle ?tait de race ogresse, et le roi ne l'avait ?pous?e qu'? cause de ses grands biens; on disait m?me tout bas ? la cour qu'elle avait les inclinations des ogres, et qu'en voyant passer de petits enfants, elle avait toutes les peines du monde ? se retenir de se jeter sur eux; ainsi le prince ne voulut jamais rien dire. Mais quand le roi fut mort, ce qui arriva au bout de deux ans, et qu'il se vit le ma?tre, il d?clara publiquement son mariage, et alla en grande c?r?monie chercher la reine sa femme dans son ch?teau. On lui fit une entr?e magnifique dans la ville capitale, o? elle entra au milieu de ses deux enfants. Quelque temps apr?s, le roi alla faire la guerre ? l'empereur Cantalabutte son voisin. Il laissa la r?gence du royaume ? la reine sa m?re, et lui recommanda vivement sa femme et ses enfants: il devait ?tre ? la guerre tout l'?t?, et d?s qu'il fut parti, la reine-m?re envoya sa bru et ses enfants ? une maison de campagne dans les bois, pour pouvoir plus ais?ment assouvir son horrible envie. Elle y alla quelques jours apr?s, et dit un soir ? son ma?tre d'h?tel: ?Je veux manger demain ? mon d?ner la
petite Aurore. - Ah! Madame, dit le ma?tre d'h?tel. - Je le veux, dit la reine (et elle le dit d'un ton d'ogresse qui a envie de manger de la chair fra?che), et je veux la manger ? la sauce-robert.? Ce pauvre homme, voyant bien qu'il ne fallait pas se jouer d'une ogresse, prit son grand couteau, et monta ? la chambre de la petite Aurore: elle avait alors quatre ans, et vint en sautant et en riant se jeter ? son cou, et lui demander du bonbon. Il se mit ? pleurer, le couteau lui tomba des mains, et il alla dans la basse-cour couper la gorge ? un petit agneau, et lui fit une si bonne sauce que sa ma?tresse l'assura qu'elle n'avait jamais rien mang? de si bon. Il avait emport? en m?me temps la petite Aurore, et l'avait donn?e ? sa femme pour la cacher dans le logement qu'elle avait au fond de la basse-cour. Huit jours apr?s, la m?chante reine dit ? son ma?tre d'h?tel: ?Je veux manger ? mon souper le petit Jour.? Il ne r?pliqua pas, r?solu de la tromper comme l'autre fois; il alla chercher le petit Jour, et le trouva avec un petit fleuret ? la main, dont il faisait des armes avec un gros singe: il n'avait pourtant que trois ans. Il le porta ? sa femme qui le cacha avec la petite Aurore, et donna ? la place du petit Jour un petit chevreau fort tendre, que l'ogresse trouva admirablement bon.

Cela avait fort bien ?t? jusque-l?, mais un soir cette m?chante reine dit au ma?tre d'h?tel: ?Je veux manger la reine ? la m?me sauce que ses enfants.? Ce fut alors que le pauvre ma?tre d'h?tel d?sesp?ra de pouvoir encore la tromper. La jeune reine avait vingt ans pass?s, sans compter les cent ans qu'elle avait dormi: sa peau ?tait un peu dure, quoique belle et blanche; et le moyen de trouver dans la m?nagerie une b?te aussi dure que cela? Il prit la r?solution, pour sauver sa vie, de couper la gorge ? la reine, et monta dans sa chambre, dans l'intention de n'en pas faire ? deux fois; il s'excitait ? la fureur, et entra le poignard ? la main dans la chambre de la jeune reine. Il ne voulut pourtant point la surprendre, et il lui dit avec beaucoup de respect l'ordre qu'il avait re?u de la reine-m?re.

?Faites votre devoir, lui dit-elle, en lui tendant le cou; ex?cutez l'ordre qu'on vous a donn?; j'irai revoir mes enfants, mes pauvres enfants que j'ai tant aim?s?; car elle les croyait morts depuis qu'on les avait enlev?s sans rien lui dire.

?Non, non, Madame, lui r?pondit le pauvre ma?tre d'h?tel tout attendri, vous ne mourrez point, et vous pourrez revoir vos chers enfants, mais ce sera chez moi o? je les ai cach?s, et je tromperai encore la reine, en lui faisant manger une jeune biche en votre place.?
Il la mena aussit?t ? sa chambre, o? la laissant embrasser ses enfants et pleurer avec eux, il alla accommoder une biche, que la reine mangea ? son souper, avec le m?me app?tit que si c'e?t ?t? la jeune reine. Elle ?tait bien contente de sa cruaut?, et elle se pr?parait ? dire au roi, ? son retour, que les loups enrag?s avaient mang? la reine sa femme et ses deux enfants.

Un soir qu'elle r?dait comme d'habitude dans les cours et basses-cours du ch?teau pour y humer quelque viande fra?che, elle entendit dans une salle basse le petit Jour qui pleurait, parce que la reine sa m?re le voulait faire fouetter, parce qu'il avait ?t? m?chant, et elle entendit aussi la petite Aurore qui demandait pardon pour son fr?re. L'ogresse reconnut la voix de la reine et de ses enfants, et furieuse d'avoir ?t? tromp?e, elle commande d?s le lendemain au matin, avec une voix ?pouvantable, qui faisait trembler tout le monde, qu'on apport?t au milieu de la cour une grande cuve, qu'elle fit remplir de crapauds, de vip?res, de couleuvres et de serpents, pour y faire jeter la reine et ses enfants, le ma?tre d'h?tel, sa femme et sa servante: elle avait donn? ordre de les amener les mains li?es derri?re le dos. Ils ?taient l?, et les bourreaux se pr?paraient ? les jeter dans la cuve, Lorsque le roi, qu'on n'attendait pas si t?t, entra dans la cour ? cheval; il ?tait venu en poste, et demanda tout ?tonn? ce que voulait dire cet horrible spectacle; personne n'osait l'en instruire, quand l'ogresse, enrag?e de voir ce qu'elle voyait, se jeta elle-m?me la t?te la premi?re dans la cuve, et fut d?vor?e en un instant par les vilaines b?tes qu'elle y avait fait mettre. Le roi ne put s'emp?cher d'en ?tre f?ch?, car elle ?tait sa m?re; mais il s'en consola bient?t avec sa belle femme et ses enfants.

soly

Re: LES CONTES DE FEES QUI ONT BERCES NOTRE ENFANCE
Posté par: place de france (IP enregistrè)
Date: 25 novembre 2005 : 00:09

chers amis,avant l'arrivee de l'internet chez moi,je devorais les livres de
Guy Des Cars,qui est le plus grand auteur,pour moi,je possede presques tous ses livres,il me manque quelques uns quand meme.

et ceux de A.j. Cronin. et vous?

soly




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