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Et à l'eau tu retourneras - Saïd Sayagh
Posté par: darlett (IP enregistrè)
Date: 15 mai 2013 : 15:38

Et à l'eau tu retourneras

Saïd Sayagh

© L'Amourier éditions 2003









Propos du livre

Un narrateur adulte emprunte à l’enfant qu’il fut son regard, encore vierge et pur, pour retrouver ses eaux d’origine :
Je la revois encore aujourd’hui, gracile, riant, barbotant de toute sa joie dans le petit lac salé, à droite des sources d’où jaillissent les torrents qui font le fleuve.
– Elles sont froides, a-t-elle dit en berbère, à propos de l’eau, toujours plurielle dans sa langue.

Au gré des remous, il revoit des femmes libres tomber petit à petit sous la coupe d’hommes maniant un discours descendu du ciel, définitif, inaltérable, chargé de mises en garde et surtout d’hypocrisie. Les belles eaux limpides qui arrosent le Maroc depuis les hauteurs de l’Atlas se chargent d’humeurs pathogènes, de brumes aveuglantes et de vacarmes guerriers.
L’auteur, qui a rendu hommage à la constance de Lalla Zoulikha dans L’autre juive, salue, dans ce nouveau roman, le combat des femmes des montagnes nord-africaines contre l'asservissement et l’avilissement de leur culture.



Extrait

Ici, je sentais l’air frais passer par mes narines pour aller consoler doucement mes bronches enflammées.
Les plus gênés par le spectacle furent les citadins adultes. La scène devait confirmer leurs soupçons à propos des Berbères ; trop proches de la nature, superficiellement acquis aux contraintes et règles religieuses et, enclins aux plaisirs naturels inavouables.

Une petite fille qui me sembla avoir mon âge ou à peine plus âgée, dressa sa tête souriante pour attirer notre attention. Elle se mit à sautiller dans l’eau, gracieusement. Son visage fin, son corps gracile et nu lui donnaient une allure de libellule. Moi, je ne me regardais pas nu, même pas en cachette, même pas dans la pénombre épaisse et voluptueuse du hammam. Cela ne se faisait pas, c’est “ aïb ”, un défaut d’éducation !
Je la revois encore aujourd’hui, gracile, riant, barbotant de toute sa joie dans le petit lac salé, à droite des sources d’où jaillissent les torrents qui font le fleuve.
Je revois les cristaux de sel emprisonnant les couleurs, auréolant son petit corps frêle et vigoureux du même arc-en-ciel qui donnait au tronc de cèdre calciné, gisant au fond du petit lac, une impression de suspension irréelle et mouvante dans le vide aquatique. Son rire clair, sans trémolo, presque strident résonnait sur les parois de granit et de calcaire qui entourent le bassin encaissé d’où jaillissent les sources de l’Oum-Rbia, la mère de la verdure ou du printemps, le nom de l’oued, le fleuve. La petite fille plongeait la tête et la ressortait. Les gouttes d’eau fraîche retombaient comme des perles brillantes, de son menton doré par le soleil :
– Elles sont froides, a-t-elle dit en berbère, à propos de l’eau, toujours plurielle dans sa langue.
– Mahmma, ghiram, attention aux remous, lui lança une belle femme tatouée qui devait être sa mère.


[www.amourier.com]

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Biographie et bibliographie de l'auteur






Ouvrages chez L'Amourier

Et à l'eau tu retourneras (parution le 13 mai 2013)

L'auteur

Poète, romancier, calligraphe, historien, Saïd Sayagh est également agrégé d’arabe et enseigne à Montpellier. Ses premières calligraphies, ses poèmes comme ses romans naissent à l'adolescence, destinés aux jeunes filles qui font battre son cœur. Il a publié, en arabe et en français, aux éditions Ibis Presse L’autre juive. Il a traduit des poètes dont Mahmoud Darwish, Michel Eckhart-Elial, Salah Al Hamdani…

Bibliographie

Essai
La France et les frontières maroco-algériennes, 1873-1902, éd. du CNRS, 1986

Romans
L’autre juive, éd. IbisPress, 2009, réédition Ibis Presse, 2010
Et à l'eau tu retourneras, L'Amourier éditions, 2013


En revue
La petite ville au pied de l’Atlas, Revue Levant n°11, 2010

Traductions
Figures au présent, de Daniel Fauchon, traduction en arabe, éd. Ibis Presse, 2009
Les noms de l’exil, de Mahmoud Darwish, Revue Levant n°10, 2009
L’homme au rire scélérat, de Salah Al Hamdani, Revue Levant n°11, 2010

[www.amourier.com]



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