Excellente analyse Simonicci !
Felicitations pour marquer avec autant de precisions les similitudes aussi frappantes entre les deux religions.
Et c'est bien juste que parallelement aux guerres au Moyen Orient, il y avait toute l'agitation recente du Maroc nouvellement independant. Les Juifs n'ont pu garder l'esprit tranquille surtout suite a l'holocauste. Ils ont quittes en masse ce Maroc ou avaient vecu si longtemps et en paix leurs ancetres.
Haim Zafrani ecrit a ce sujet dans "Mille ans de vie Juive au Maroc" (p. 292-97)
Citation:"Quels ont ete les motifs majeurs des departs individuels ou collectifs, des grandes vagues d'emigration ?
La litterature rabbinique locale et les evenements recents nous fournissent, sur l'"extraordinaire mobilite" des Juifs marocains et ses motivations, bien des details interessants. Individuellement ou par ses groupes compacts, les Juifs marocains ont toujours quitte le pays dans le passe, se dirigeant surtout vers l'Orient ; et les migratins internes elles-memes n'ont pas ete determinees seulement par les inexorables lois sociales et economiques qui gouvernent les deplacements de populations dans les societes developpees ou en voie de developpement.
Le courant d'emigration vers la Palestine ne s'est jamais interrompu au cours des siecles, alimente par le mouvement des etudiants qu'on envoyait dans les Yeshivots ou par celui des pelerins qui allaient finir leurs jours en Terre Sainte. La course a la fortune, l'aspiration a plus de securite et a l'emancipation sociale et juridique conduisaient, au xixe siecle, des centaines de Juifs marocains a s'expatrier, inscrivant sur les cartes de leurs peregrinations - a cote des destinations traditionnelles qui se nommaient Jerusalem, Safed et Tiberiade - des lieux aussi lointains que les Etats-Unis, l'Argentine, le Bresil ou le Perou.
A la creation de l'Etat d'Israel, en 1949, des differents mouvements kibboutziques et les partis politiques israeliens sont representes dans le pays par des emissaires qui apportent avec eux leurs rivalites et leurs luttes d'influences. Casablanca est le siege de la Kadima, le bureau qui organise, quasi-officiellement, l'emigration.
De gros contingents sont fournis par des masses desheritees des villes ; mais on marque une nette preference pour la "montee des jeunes" (l'Alyat hano'ar) et pour celle des populations du Sud marocain et des montagnes de l'Atlas, ces dernieres jugees plus aptes que les citadins a fonder des colonies agricoles.
En outre la solidarite du Maroc avec les autres pays Arabes et l'hostilite declaree qui en resulte a l'egard d'Israel d'une part, et d'autre part la sympathie naturelle du Juif pour ce meme pays dont il est citoyen en puissance, creent un climat de suspicion et de mefiance qui ne facilitent pas les rapports normaux entre les deux elements de la pupulations, Juifs et Musulmans.
Par ailleurs, le Maroc s'installent petit a petit dans une economie de pays sous-developpe (ou en voie de developpement) a laquelle le Juif s'accommode mal, et ou il est appele a jouer de moins en moins son role traditionnel d'agent intermediaire. Son dynamisme l'appelle ailleurs, d'autant que les risques de fluctuations politiques internationales et la crainte d'un eventuel changement d'attitude des pouvoirs a son egard ne sont guere favorables a son enracinement, a une stabilite a laquelle il aspire avec tant de force. Il est donc condamner a chercher des cieux plus clements.
Le mouvement d'emigration qui, durant les premieres annees de l'independance, a affecte particulierement les couches desheritees de la population juive, s'etend progressivement par contagion pour ainsi dire, aux classes dont le niveau de vie est relativement plus eleve, pour atteindre, insensiblement, les familles les plus fortunees."
"L'emigration vers Israel semble devoir etre d'abord un phenomene naturel. Les Juifs marocains, comme leurs freres des autres pays de la Diaspora, ont afflue vers Israel des la creation de l'Etat. Le mouvement s'est poursuivi durent les dernieres annees du Protectorat, son rythme etant regler uniquement par les organisations qui representaient, sur place, l'Agence Juive, notamment le bureau de la Kadima. Quand le Maroc, a recouvre son independance, le mouvement s'est accelere durant pres de six mois, puis fut freine en raison de l'installation de l'ordre nouveau et plus encore des pressions excercees sur les autorites cherifiennes par la Ligue Arabe a laquelle le Maroc devaient par la suite adherer et fournir des gages de solidarite. Neanmoins, les deplacements Maroc-Israel et vice-versa (le mouvement Israel-Maroc concerne quelques retours definitifs, mais il interesse surtout le tourisme et les visites familiales), par des voies diverses, n'ont jamais cesse. Les membres d'une meme famille, les voisins d'une meme maison ou d'une meme rue etaient necessairement appeles a se retrouver, quels que fussent les obstacles."
""L'integration de la Communaute juive dans la grande famille marocaine, integration que l'on croyait possible et meme souhaitable dans le climat de confiance et d'euphorie cree, aux premiers jours de l'independance, par des declarations d'egalite et de liberte maintes fois reiterees par S>M>Mohanned V et par les leaders des partis politiques, cette integration ne s'est pas inscrite dans les faits ; elle est devenue un mythe, malgre les efforts de quelques bonnes volontes qui ont tente un rapprochement des deux elements marocains de la population ausein d'une association denomme "Wifaq" - entente - qui n'a pas tarde a se dissoudre. La vie seculaire sur un meme sol, les affinites de langue et de coutume ne sont pas arrivees a contrebalancer les mefiances, les incompatibilites de toutes sortes, les interets, et par-dessus tout les problemes crees par l'existence de l'Etat Juif et l'hostilite unanime des Etats Arabes solidaires a l'egard d'Israel, hostilite entretenue par la propagande des Ambassades orientales installees au Maroc et par la radio nationale elle-meme.
Par ailleurs, a l'egard du probleme pose par la liberte de deplacement auquel la communaute juive est sensibilisee au plus haut point, il faut avouer que l'attitude du Palais, et plus encore celle des autorites locales chargees de la delivrance des titres de voyage, n'a pas toujours ete egale : les periodes de restriction alternent avec les periodes de grand liberalisme. Ce mouvement fluctuant, qui repond a des considerations de politique generale, se repercute sur l'etat d'esprit de la population juive : a l'inquietude succede l'espoir et vice-versa. Ce regime finit par desorienter et decevoir les individus les moins mefiants qui en viennent a envisager un projet de depart."