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Chypre
Posté par: Bravo (IP enregistrè)
Date: 22 janvier 2012 : 02:10

Des avions israéliens basés à Chypre ?
Par Jean Tsadik

Le 16 février prochain, le 1er ministre israélien, M. Benyamin Netanyahu, se rendra en visite officielle dans la République de Chypre, à l’invitation du Président Dimîtris Khristòfias. Ce sera la première visite d’un premier ministre israélien sur l’île d’Aphrodite ; elle fait suite à celle du Président Pérès, à l’automne dernier, venu y parapher des accords de coopération dans les domaines de l’énergie, de la recherche et du développement industriel, des télécommunications, ainsi que de l’archéologie.

S’ensuivit, le 9 janvier dernier, la venue importante à Jérusalem du ministre cypriote de la Défense, M. Demetris Eliades, qui signa deux traités avec Ehud Barak, dans les domaines de la défense et de l’échange d’informations sensibles.

Jusqu’à présent, l’Etat hébreu gardait ses distances avec le pays de l’UE le plus proche de ses frontières afin de ne pas indisposer les Turcs, qui entretiennent un différend ouvert avec Nicosie depuis de très nombreuses années.

Deux facteurs ont principalement contribué au rapprochement entre les deux Etats : la rupture de l’alliance stratégique Ankara-Jérusalem, voulue par le 1er ministre islamiste Tayyip Erdogan, d’une part, et la découverte d’importants gisements sous-marins de gaz naturel, dans la portion de Méditerranée située entre Chypre et l’Etat hébreu, de l’autre.


La plateforme gazière israélienne "Tamar", en Méditerranée orientale

Ces réserves, donnant lieu à d’importants forages, sont situées dans les Zones d’Exclusivité Economique, ZEE [1], appartenant aux deux Etats, et qu’ils explorent en étroite collaboration, scientifique, technique et sécuritaire.

Selon les estimations fiables, leur exploitation va rapporter annuellement des dizaines de milliards de dollars aux deux économies, des sommes à même de les modifier en profondeur. Personne, d’ailleurs, n’en fait mystère, à l’image de Demetris Eliades, qui a déclaré, lors de son récent séjour parmi nous, que "l’existence de gaz dans les ZEE des deux pays ouvre un nouveau chapitre dans les relations entre Chypre et Israël".

Un point de vue largement partagé par Ehud Barak, qui lui a ajouté une dimension stratégique, annonçant une "coopération pour la paix dans une région plus étendue", le ministre de la Défense précisant que "2012 serait une année historique au niveau des décisions stratégiques".

A ce propos, des confrères cypriotes, d’habitude très bien renseignés, nous ont informés que la visite de Netanyahu aurait pour objectif pratique de finaliser un nouvel accord secret, aux conséquences capitales, au sujet de la protection des sites de forages en mer, ainsi que du stationnement permanent d’avions de guerre frappés de l’étoile de David dans des aéroports cypriotes.

Un autre accord, économique celui-ci, prévoirait la coopération de Chypre pour la livraison, à des clients européens, du gaz israélien pompé en Méditerranée. Même ce volet de la coopération Nicosie-Jérusalem a le don d’irriter Erdogan au plus haut point, en ce qu’il contournera le pipeline Nabucco, sensé relier l’Azerbaïdjan et d’autres puits de la même région, au Vieux continent, en traversant la Turquie.

Officiellement, Ankara soutient le programme Nabucco, mais, dans les faits, elle traîne les pieds, faisant le jeu du géant russe Gazprom, bien décidé à conserver et à amplifier sa mainmise sur la vente de gaz naturel à l’Europe par pipeline. Le projet Nabucco comptabilise ainsi déjà plusieurs années de retard, et sa réalisation même est remise en question.

Quant au projet d’installer des appareils israéliens sur l’île, il viendrait contrecarrer les nombreuses menaces brandies par Erdogan contre Chypre, Israël, et même la Grèce, partie prenante par proxys des tous les traités entre Jérusalem et Nicosie. Les Turcs contestent, en particulier, la délimitation de la ZEE de la République cypriote ; à plusieurs reprises, des navires de guerre ainsi que des chasseurs-bombardiers ottomans se sont dangereusement approchés des plateformes plantées dans l’est du bassin méditerranéen.

Depuis ces provocations, la marine israélienne assure la protection permanente des installations de forage, qu’elles soient domestiques ou cypriotes.

On sait Ankara terriblement sensible aux efforts entrepris par Nicosie pour renforcer les capacités de sa petite armée, forte d’environ dix mille hommes ; c’est ainsi que, lorsque les Cypriotes envisagèrent de déployer des missiles antiaériens, ou d’acquérir des avions de chasse, la Turquie réagit de manière extrêmement musclée, menaçant le régime du sud de l’île d’une intervention militaire.

C’est à l’aune de ces incidents passés, qu’il convient d’évaluer l’impact du dessein de baser une escadrille de la Kh’el Avir (probablement) sur l’aéroport de Paphos. A la différence de taille, que si l’armée turque pouvait, jusqu’alors, aisément écraser dans l’œuf les velléités des Cypriotes grecs de se renforcer, toute opération lancée contre les aviateurs hébreux se solderait, pour l’agresseur, par une débâcle annoncée par avance.

Tayyip Erdogan ne se contente pas de menacer les plateformes de forage, il vitupère également, en montrant le poing, contre le fait, qu’en juillet prochain, ce sera la République de Chypre qui assurera la présidence de l’Union Européenne.

Les relations entre les insulaires grecs et les Hébreux sont, en revanche, au beau fixe. Comme en témoigne la décision du Président Khristòfias d’interdire aux flottilles anti-blocus d’appareiller en direction de Gaza à partir de son territoire. Des flottilles largement financées et organisées par Ankara, comme de bien entendu.

Sur l’île d’Aphrodite, les responsables politiques, les confrères et les simples citoyens que nous avons interpelés se montrent euphoriques à l’idée du stationnement des F-16 hébreux chez eux. Eux qui, en juillet 74, avaient fait les frais de l’agression turque, baptisée Attila, qui allait amputer leur territoire de 40% de sa surface, sans que la garnison britannique, cantonnée dans deux bases représentant 10% de l’île, n’intervienne aux côtés des victimes.

La grande sœur grecque, à l’époque, ne se jugeant pas de taille à affronter les Ottomans, s’abstint également d’intervenir, ce qui, d’ailleurs, précipita la fin du régime des colonels à Athènes.

"Tout le monde saisit, à Chypre comme dans toute la Grèce", me confie l’un des analystes stratégiques cypriotes les plus connus, "qu’une alliance stratégique avec vous inverse le rapport de force [face à la Turquie] en notre faveur, et garantit notre indépendance et notre liberté une fois pour toutes. Dans ces conditions", me demande Agis, "pourquoi voudriez-vous que nous ne soyons pas contents ?".

Mon confrère et ami partage mon opinion, selon laquelle le déploiement d’appareils israéliens à Chypre constituerait, de facto, un pacte militaire obligeant Israël à intervenir en cas de nouvelle agression turque. "Cela irait même au-delà de ce que vous dites", renchérit Agis, "si ce projet se réalise, au plan stratégique, une attaque [des Turcs] contre notre république équivaudrait à une attaque contre vous. Bref", conclut-il, "si vous venez, c’est pour longtemps, mais vous n’avez pas d’autre choix, si vous comptez sérieusement pomper le gaz de la Méditerranée".

La manœuvre stratégique qu’entreprend le gouvernement israélien est intéressante à bien d’autres égards. Les Hébreux, de par le simple déplacement de Netanyahu à Nicosie et l’ordre du jour des discussions, démontreront à Erdogan et à son parti islamiste, que Jérusalem ne les craint pas, et que, quand on n’a pas les moyens de remporter une victoire militaire contre quelqu’un, à moins de vouloir se couvrir de ridicule, on n’en parle pas.

La démonstration attirera, à n’en point douter, l’attention des islamistes égyptiens, palestiniens, tunisiens et libyens, auprès de qui il était allé vanter l’islamisme à la turque et la capacité de son pays à tenir tête aux militaires israéliens. Ca va faire jaser dans les casbahs.

L’entente cordiale entre Nicosie et Jérusalem ne manquera pas non plus de rapprocher un peu plus encore Israël de l’Europe ; car, qu’elle le dissimule ou le concède, la défense des plateformes, de l’espace aérien et du territoire cypriote incombe à l’UE et non à Israël. Mais l’Union Européenne est par trop engoncée dans ses difficultés économiques, ses périodes préélectorales, ses relations compliquées avec la Turquie et le monde arabe, sa non-existence militaire, et son absence de gouvernement central pour tenir son rôle dans la partie orientale de la Méditerranée. A Bruxelles et dans les chancelleries, on ne va pas tarder à comprendre que les Hébreux rendent un grand service à la communauté, et on s’en souviendra.



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