Nous passons de l'ère du livre à l'ère de l' Internet. Nicolas Carr nous apprend dans son livre "The Shallows" comment et pourquoi l'Internet nous transforme.
Les biologistes et les neurologistes avaient pensé pendant longtemps que la structure du cerveau adulte ne bougeait plus. A la fin des années 1960, Michael Merzenich découvrit qu'un singe pouvait re-câbler son cerveau -un résultat qui fut plus tard confirmé chez les humains. La théorie actuelle soutient que notre cerveau est en constante évolution, s'adaptant tous les jours à nos expériences et à notre environnement. Notre cerveau est «
massivement plastique»
«Quand nous surfons», écrit Carr, «nous entrons dans un environnement qui pousse à la lecture en diagonale, à une pensée pressée et distraite, et à un apprentissage superficiel».
Un gros problème semble venir des
hyperliens. Un lien nous pousse à arrêter notre lecture et à évaluer le bienfondé d'un clic, ou pas -activant les zones de prise de décision de notre esprit.
Les livres nous présentent un environnement plus passif,
permettant à l'esprit de se concentrer sur les mots, au lieu de voir constamment ailleurs pour chercher s'il y a en a de nouveaux, et peut-être meilleurs. Carr le résume en ces termes : «Essayez de lire un livre tout en faisant des mots-croisés; voici l'environnement intellectuel d'Internet».
Ce n'est pas que nous n'apprenons rien quand nous surfons sur nos sites et nos flux d'actualité, dit-il ; c'est que nous ne sommes plus capables de faire les connexions minutieuses que nous faisions avant. Nous pataugeons dans des eaux peu profondes.
Le problème ne vient pas forcément d'une information en ligne qui serait d'une qualité moindre que celle des livres ou des conversations. Le problème, c'est que nous la consommons dans un état de distraction. Carr cite le neuroscientifique Jordan Grafman : «L'optimisation pour le multitâche produit-elle un meilleur fonctionnement -c'est-à-dire plus de créativité, d'inventivité et de productivité? » Les études montrent que
lorsque nous essayons de faire deux choses en même temps, l'attention portée aux deux activités diminue, et nous les faisons chacune plus négligemment. Faire plus de multitâche ne nous rendra pas meilleurs à faire deux choses à la fois; cela signifiera continuer à faire plusieurs choses de moins en moins bien.
Si nous ne faisons preuve que d'une moitié d'attention, si nous sommes distraits par tous les signaux et les alarmes de nos ordinateurs, ou si nous ne nous tracassons plus à être attentifs parce qu'on pourra toujours aller sur Google plus tard,
nous perdons l'occasion de construire des connexions durables dans nos cerveaux. Des connexions qui pourraient un jour se mêler d'une façon inédite, des connexions qui nous permettront de voir le monde sous un autre angle et de trouver de nouvelles solutions.