Maroc: Judaïsme - un shabbat dans une famille rbatie
Philippe Picard
Un trait de culture sépharade
La petite communauté israélite de Rabat, forte de 200 âmes, illustre tout un pan de ce que fut la société juive marocaine à l'aube de l'indépendance. Le shabbat, véritable communion spirituelle et moment de célébration unique dans le judaïsme, a constitué pendant des siècles une fête religieuse d'une importante incontournable dans la vie juive du Royaume.
«S'il existe un principe fondamental dans notre religion, c'est bien celui du repos hebdomadaire du shabbat, célébré le vendredi à partir de la tombée du jour, et ce, jusqu'au samedi soir», annonce d'emblée M. Tobaly, juif rbati.
La liturgie de chabbat obéit à un rituel très précis. L'allumage des bougies du chandelier à 7 branches, appelé ménorah, annonce l'ouverture du shabbat.
La journée hébraïque commençant au crépuscule, les fidèles se couvrent les yeux à cette heure avec leur main droite en récitant les dernières bénédictions, et lorsqu'ils se découvrent, la vision du nouveau jour commence. A partir de ce moment, tout travail devient strictement prohibé.
La préparation des aliments doit se prévoir la veille, ainsi que l'allumage des fourneaux et des lumières. Conduire la voiture, écrire ou composer un numéro de téléphone sont donc des activités interdites chez les tenants de la stricte orthodoxie.
Toutefois, qui dit fête, dit aussi plaisir. Et celui réservé pour l'occasion réside dans la cuisine sépharade très élaborée pour la circonstance. «Après la récitation du kiddoush, bénédiction traditionnelle du vin prononcée par le maître de la maison, le repas peut débuter», continue M. Tobaly.
«Dans la culture juive, le vin et les breuvages alcoolisés constituent des boissons tout à fait permises, et demeurent les symboles de joie et de réjouissance nécessaires aux fêtes religieuses», affirme-t-il.
Le plat national des juifs, très prisé à shabbat, est la @#$%&. Mets composé de morceaux de boeufs, d'oeufs et de pommes de terre, cette recette se prépare le vendredi et mijote pendant une vingtaine d'heures sur une plaque électrique.
L'entrée classique, composée de la salade de betteraves suivie de poivrons grillés, s'accompagne aussi des béranias, sorte de beignets d'aubergine frits dans l'huile, sans oublier les halots préalablement bénis (pains pour la prière de shabbat).
Le dessert se compose généralement d'un gâteau ou d'une pâtisserie assortie de fruits.
Que reste-t-il des quelque 500.000 juifs du Maroc d'avant l'indépendance ?
«La communauté juive ayant pratiquement disparu au Maroc, la plupart des juifs marocains ont immigré, soit en France, au Canada ou en Israël, il n'en reste plus qu'environ 2500 danstout le pays», déplore Mme Tobaly.
Plusieurs familles juives rbaties ont été tentées à une certaine époque par l'exil. «Pendant la guerre des Six jours, plusieurs ont dû fuir ne serais-ce que quelques mois, suite au climat de vive tension qui régnait au Maroc», évoque M. Tobaly.
«Mais aujourd'hui, malgré les évènements de la politique internationale, je garde confiance en ce pays, qui est le mien», confie-t-il, ajoutant : «Je ne peux que souligner la sagesse des Rois Alaouites, en particulier depuis l'indépendance, qui ont su protéger leurs citoyens juifs, car un Marocain reste toujours un Marocain».
Les juifs marocains expatriés, à l'instar de leurs compatriotes musulmans, éparpillés un peu partout autour du bassin méditerranéen ou en Amérique, constituent des ambassadeurs de choix de la culture marocaine, dont la gastronomie n'est qu'un aspect.
Article publie le 8 mai 2007
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