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Hassan II, Dieu sur terre
La décennie commence en fanfare, réunissant le peuple autour de son monarque au nom de l'unité nationale. La suite, faite de déceptions et de révoltes, sera moins glorieuse.
L'année 1975 est indéniablement marquée par la Marche verte. 350.000 Marocains marchent sur le Sahara, seulement armés du Coran et du drapeau national. Le peuple est subjugué. En 1975, les deux tentatives de coups d'Etat (1971-1972) sont encore dans les esprits et l'opposition est forte. Avec la marche verte, Hassan II reprend la situation en main et réunit toutes les forces politiques du pays autour de lui. 1975 est aussi marquée par la tenue du Congrès extraordinaire de l'USFP. Un tournant historique pour la gauche qui va passer d'une ligne révolutionnaire à une approche sociale-démocrate. C'est aussi en cette année, le 18 décembre, qu'Omar Benjelloun, grand stratège de l'USFP, est assassiné devant chez lui. Quelques jours plus tard, naît la Chabiba Ittihadia.
En 1976, les élections communales ont lieu. Ce sont les premières après le boycott de celles de 1969 et les partis voient dans ces consultations un pas en avant pour le début d'une démocratie locale au Maroc. Mais ce ne sera que de la poudre aux yeux. Craignant de perdre le contrôle devant des partis forts de l'opposition, le Pouvoir met en place des SAP, des candidats sans appartenance politique, les forme et leur donne les moyens pour se présenter aux élections. La bataille commence entre le dispositif étatique d'un côté et l'USFP essentiellement de l'autre. Discours, moyens financiers, télé et radio contre presse écrite partisane. A gauche, la campagne est assurée par les jeunes de la Chabiba qui subissent une répression bien calculée sous prétexte de grèves dans les lycées. Pour la démocratie, ces élections communales sont catastrophiques. L'USFP remporte plusieurs grandes villes, mais la machine du Pouvoir les reprend aussitôt. Rabat fait partie des quelques villes qui y ont échappé.
Nous sommes en 1977, un an après les communales. C'est au tour des législatives. La gauche, n'ayant toujours pas oublié le mauvais tour que le Pouvoir lui a joué, demande des garanties. Hassan II les leur donne : Il nomme les chefs de partis ministres sans portefeuille afin qu'ils puissent contribuer à superviser le déroulement des élections. Le résultat des urnes se résume en un seul mot : mascarade. Selon les observateurs, la couleur jaune, à l'époque celle de l'USFP, décroche environ 80 sièges. Au final, ils ne seront que 15 à siéger au Parlement. Une conférence de presse est organisée, l'USFP présente des preuves de falsification des résultats et Abderrahim Bouabid annonce sa démission du poste de ministre d'Etat. 1978 voit la naissance du RNI (Rassemblement National des Indépendants) d'Ahmed Osman, Premier ministre à l'époque, et de la CDT. Hassan II appelle à la paix sociale et décide d'un budget pour une « phase de réflexion ». La guerre dans le Sud coûte cher et la présence du Makhzen économique accroît l'hémorragie. En 1979, l'interdiction de l'UNEM (janvier 1973) est levée et l'Union Nationale des Etudiants Marocains tient son XVIème Congrès. Cette année voit la récupération de Oued Eddahab par le Maroc et la création de l'AMDH (Association Marocaine des Droits de l'Homme). Le 30 mars, la CDT organise sa première grève nationale en solidarité avec le peuple palestinien qui célèbre la Journée de la Terre. Dans les commissariats d'Agadir, le jeune Mohamed Grina est torturé. Il n'en sortira pas vivant. En 1980, a lieu le référendum sur l'âge de la majorité du roi, ramené à 16 ans au lieu de 18.
En 1981, le gouvernement décide d'augmenter le prix des denrées alimentaires de base. La CDT appelle à une grève générale. Les forces de l'ordre interviennent et Casablanca s'enflamme. Les locaux de la CDT et de l'USFP sont assiégés, les responsables des deux organisations arrêtés et « Al Mouharir » ainsi que « Libération », les deux organes de presse de l'USFP, sont interdits. La même année, à Nairobi, le roi accepte l'organisation d'un référendum au Sahara. L'USFP s'y oppose et sa direction est arrêtée. L'année suivante, Abderrahim Bouabid est libéré.
La première partie du mur de défense se construit au Sahara… Alors que l'USFP n'a toujours pas pansé ses plaies de 1981, c'est un raz-de-marée mauve (la nouvelle couleur des socialistes) qui s'abat sur les urnes lors des élections communales de 1983. Là encore, on assiste aux mêmes falsifications qu'en 1976. Un nouveau parti est créé par Maâti Bouabid, l'UC (Union Constitutionnelle). La troisième version du FDIC, un nouveau parti du roi voit le jour. La même année, survient le décès de Moulay Abdellah, frère de Hassan II. Loin de la politique, le prince était aimé et son décès va, sentimentalement, ressouder tout le monde au Palais.
En 1984, Marrakech, Fès, AL-Hoceima et Tétouan, entre autres, se soulèvent. Hassan II accuse les khomeynistes et les membres d'Ila Al Amam. D'anciens membres de l'organisation sont arrêtés bien qu'ils aient cessé toute activité politique depuis de nombreuses années. A la même période, le Maroc se retire de l'OUA et, pour la première fois, à l'occasion des législatives, l'USFP se sent affaibli. Lui reproche-t-on les nombreuses concessions faites au Pouvoir ou son manque d'initiatives lors des événements récents ? Toujours est-il que la gauche s'essouffle et qu'au sein du parti, le compte à rebours commence dès 1984.
En juillet 1986, Hassan II reçoit Shimon Pérès à Ifrane. La visite de Pérès crispe les Marocains, mais aucun parti ne riposte. Hassan II vient de démontrer, une fois de plus, que les Affaires étrangères sont du domaine du roi. En 1988, le rapprochement avec l'Algérie s'amorce. Il se concrétise l'année suivante par la création de l'UMA (Union du Maghreb Arabe). La même année, Driss Basri orchestre une campagne de « collecte » pour la construction de la mosquée Hassan II. Curieusement, on signale sur le tableau des résultats de la collecte que la ville de Settat arrive en tête... L'année 1989 est l'année des surprises. L'UMA est créée et Hassan II accueille le Polisario à Marrakech. Au sein de l'USFP, lors de son Vème congrès, l'Intifada vient de la base. La direction ne contrôle plus ses troupes. Pour la gauche Marocaine et pour tous les démocrates, il est urgent de ressusciter une nouvelle époque : la Réforme.
JUILLET 1986 SHIMON PERES CHEZ HASSAN 2 A IFRANE
BEAUCOUP D ENCRE A COULE SUR CETTE RENCONTRE