LES JUIFS PERDUS DE PALESTINE
David Ben Gourion croyait à cette idée. Aujourd'hui, l'historien Tsvi Misinaï dépoussière une thèse controversée : 9 Palestiniens sur 10 auraient des origines juives.
"Nous sommes de la même race et du même sang et une coopération entre nous amènera une grande prospérité dans le pays", écrivait l'émir Faiçal à Felix Frankfurter en 1917. Faiçal ne cachait pas ses affinités avec les sionistes qui avaient commencé à affluer en Terre sainte. En 1919, il signait un accord de coopération avec Haïm Weizmann, à qui il écrivait être conscient "de la parenté raciale et des liens très anciens qui unissent les Arabes au peuple juif".
Faiçal ne faisait pas qu'énoncer un lieu commun, il savait de quoi il parlait, soutient Tsvi Misinaï. Ce passionné d'histoire en sait sans doute plus long que quiconque sur les origines des Palestiniens d'aujourd'hui.
"Faiçal était hachémite par son père", explique-t-il, "ce qui signifie qu'il descendait directement de Mahomet. En revanche, la mère de son grand-père maternel, King On, était issue d'une famille de Juifs forcés de se convertir à l'islam et qui avaient dû émigrer à l'est du Jourdain. Ils ont réintégré plus tard leur village. A l'époque de l'enfance de Faiçal, ces origines juives étaient connues de tous et l'on ne cherchait pas à les dissimuler. Et ce que Faiçal savait alors, beaucoup de Palestiniens d'aujourd'hui le savent aussi."
90 % des Palestiniens ont des ancêtres juifs
Voici le récit de ce qui pourrait bien être l'un des secrets les mieux gardés de l'histoire. Une découverte susceptible, à terme, d'apaiser les terribles tensions qui déchirent la terre d'Israël. Des années de recherches permettent à Tsvi Misinaï d'affirmer aujourd'hui, avec la plus grande certitude : près de 90 % des Palestiniens ont des ancêtres juifs. "Et environ la moitié d'entre eux le savent", précise-t-il.
Ils ont en effet conservé certaines coutumes juives, dont les rituels de deuil, l'allumage des bougies le Shabbat ou en commémoration de proches disparus, et même le port des téfilines. Et pourtant, en Israël, on est convaincu que le groupe qui se fait appeler "les Palestiniens" se compose d'Arabes venus de diverses régions du Moyen-Orient pour profiter des opportunités d'emplois fournies par les Juifs. Tsvi Misinaï, lui, ne partage pas cette opinion. Selon lui, la vaste majorité des Palestiniens d'aujourd'hui descendent de familles juives qui ont réussi à éviter l'exil tout au long des 2 000 dernières années, ou qui sont revenus dans leurs villages après en avoir été chassés. Ils ont, eux aussi, été les victimes des nombreuses souffrances endurées par les Juifs de Terre sainte : de la destruction du Temple par les Romains aux Croisades, en passant par les famines, la pauvreté et les guerres du Moyen Age.
Impossible à cette époque d'éviter la conversion à l'islam, une démarche forcée consentie par crainte plutôt que par conviction. Tsvi Misinaï s'est donné comme mission de répandre ce message parmi les Palestiniens, leur offrant la possibilité de récupérer leur héritage perdu. Et son objectif ne se limite pas à les réconcilier avec leurs racines : selon lui, la réintégration de ce qu'il appelle les "descendants d'Israël" au sein du peuple juif est le meilleur moyen - sinon l'unique - de résoudre la crise du Proche-Orient.
Non, Tsvi Misinaï n'est pas un illuminé. Ce spécialiste du high-tech, est peut-être le premier concepteur israélien d'un produit informatique désormais mondialement connu. A l'époque où les enfants de la génération ICQ et Google étaient encore en couches-culottes, au début des années 1980, Misinaï créait Sapiens, un lanceur d'applications de renommée internationale, surtout dédié au domaine des assurances, qui a reçu le prix Rothschild du développement industriel en 1992.
Quelques années plus tard, Tsvi Misinaï opère un virage à 180°. Il abandonne l'informatique pour retourner à ses premières amours : l'histoire de la terre d'Israël. "C'est mon père qui m'a transmis cette passion . Il collectionnait tous les objets liés à notre terre." En digne fils, il reprend le flambeau. Toutefois, en plus des objets, Tsvi Misinaï collectionne les histoires : légendes et folklore, qu'il recueille de la bouche même des moukhtars, les anciens, mémoire vivante des villages de la terre d'Israël . "Il existe de grands clans, dans les collines de Hébron, en Samarie et parmi les Bédouins du Néguev, qui connaissent leur héritage et ont même élaboré des arbres généalogiques qui prouvent leurs racines. Et ce n'est pas tout : beaucoup d'entre eux pratiquent encore certaines coutumes spécifiquement juives. Il n'y a pas si longtemps, leurs voisins les appelaient 'les Juifs', alors que, techniquement, ils étaient aussi musulmans que les autres." Selon Tsvi Misinaï, près de 9 Palestiniens sur 10, sur la terre d'Israël (y compris la Judée-Samarie et Gaza) ont des racines juives. "Et ce pourcentage est encore plus élevé à Gaza", insiste-t-il.
Une théorie qui date de Ben Gourion
Tsvi Misinaï est loin d'être le pionnier de cette ironie historique. Avant lui, le deuxième président d'Israël, Itzhak Ben Zvi, et le premier Premier ministre David Ben Gourion, ont consacré plusieurs livres et articles au sujet. Ben Gourion croyait tant à cette idée qu'en 1956, il a mis sur pied une équipe dirigée par Moshé Dayan et Haïm Levkov (envoyé du Palmah parmi les Arabes d'Israël, ce dernier a travaillé avec Ygal Allon à la constitution d'une unité de traqueurs, domaine traditionnellement réservé aux Bédouins du Néguev). Leur mission : parvenir à "judaïser" les Bédouins, en leur expliquant le mode de vie et les coutumes juives. Les intégrer aux Israéliens sur le plan ethnique, sinon religieux.
Les Bédouins s'étaient alors montrés assez réceptifs, mais les conditions de vie trop difficiles avaient poussé leurs professeurs, censés partager leur quotidien, hors des villages. Le programme est abandonné. En fin de compte Moshé Dayan convainc Ben Gourion que l'idée risque de mécontenter le monde musulman. Le projet s'est arrêté là .
Pour Tsvi Misinaï, il s'agit d'un point important : "Je ne pense pas que la plupart des Palestiniens, ni même une minorité d'entre eux, auraient nécessairement envie de se convertir au judaïsme, du moins à l'heure actuelle. Ce n'est pas, de toute façon, un impératif pour les réintégrer au peuple juif, mais j'imagine aisément la réticence des rabbins face à une telle perspective !"
Par ailleurs, d'autres considérations entrent en ligne de compte. Pour Tsvi Misinaï, on pourrait craindre, côté israélien, que les Palestiniens n'acceptent leur "identité juive" que pour obtenir la carte d'identité israélienne, bénéficier de la sécurité sociale, voire réaliser plus facilement des attentats terroristes.
"Quelques Palestiniens ont entrepris de se convertir dans les règles, mais j'en connais un certain nombre qui pratiquent le judaïsme en estimant qu'ils n'ont pas besoin de passer par là , puisqu'ils se savent déjà juifs."
Les preuves de l'ascendance juive des Palestiniens se révèlent, en fait, très convaincantes. Premier indice, les noms : ceux des lieux, mais également les patronymes. "Beaucoup de villages, ici, n'ont pas de racines étymologiques arabes. Un fait très rare dans d'autres pays arabes. Parmi eux : Kafr Yassif, Kafr Kana, Kafr Yatta, Kafr Manda, Kafr Samia et beaucoup d'autres encore", révèle Tsvi Misinaï. Dans son livre écrit en 1932, Les Populations dans notre pays, Itzhak Ben Zvi établissait qu'à l'ouest du Jourdain, 277 villages et sites - presque les deux-tiers ! - portaient des noms très similaires ou identiques à ceux des villages juifs établis aux mêmes endroits à l'époque du Second Temple.
"C'est en soi la preuve que les habitants de ces villages étaient des Juifs restés là après la destruction", écrit Ben Zvi dans son livre. "Si des populations étrangères avaient pris possession de ces villages, elles auraient modifié les noms hébraïques (c'est ce qui s'est passé dans la majorité des zones où la population a bel et bien changé, comme à l'est du Jourdain). Ce ne fut pas le cas dans la partie occidentale d'Israël, où les anciennes appellations ont subsisté Elles prouvent une continuité historique sur ce territoire."
Par ailleurs, dans la population palestinienne,de nombreux noms de famille semblent dérivés de l'hébreu eux aussi. Dans les années 1860 déjà , explique Tsvi Misinaï, "le colonel Condor, de l'Institut pour la Recherche sur Israël, a découvert que certains fallahin (paysans) palestiniens portaient des noms bibliques, sans aucun lien avec le vocabulaire arabe. De grandes familles très honorables vivant dans diverses régions du pays ont conservé des noms hébreux."
Parmi les principaux clans de cette catégorie, figurent les Abou Khatsira, qui contrôlent presque toute l'activité de pêche à Gaza, les Elbaz, famille de Juifs immigrés du Maroc, les Aboulafia, propriétaires de la célèbre boulangerie de Jaffa, qui descendent de Rabbi Abraham Aboulafia, kabbaliste espagnol du XIIIe siècle, les Almog, de Djénine, les Dawouda (David), de Hébron, et même, croyez-le ou non, 4 000 convertis de force à l'islam appelés Cohen, qui vivent en Jordanie.
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