PUBLICATIONS DIVERSES :  DARNNA.COM
Publications, etudes ou articles divers concernant les religions, la litterature, la psychologie, la philosophie, les Arts, etc... 
La judeophobie des modernes - Pierre-Andre Taguieff
Posté par: darlett (IP enregistrè)
Date: 31 mai 2008 : 22:47

La Judeophobie des Modernes

par Pierre-Andre Taguieff





Présentation du livre par l'éditeur (Odile Jacob) :


"S’appuyant sur une documentation considérable, Pierre-André Taguieff nous montre ici comment la judéophobie, quelle que soit sa forme historique, fonctionne sur la base de récits d’accusation, organisés comme des mythes, par lesquels les Juifs sont déshumanisés de diverses façons. L’histoire globale de la judéophobie, qu’il nous livre, permet de saisir la permanence, la récurrence des stéréotypes antijuifs, mais aussi leur surprenante capacité d’adaptation et de diffusion planétaire, depuis l’antijudaïsme antique jusqu’à l’antisionisme radical qui s’est internationalisé depuis la fin du XXe siècle. Si les Juifs ont longtemps été mis en accusation par l’Occident chrétien, c’est, en effet, l’Occident judéo-chrétien qui se trouve désormais mis en accusation par ses ennemis, tant intérieurs qu’extérieurs."




La judeophobie des modernes - Pierre-Andre Taguieff
Posté par: darlett (IP enregistrè)
Date: 31 mai 2008 : 22:55



Pierre-Andre Taguieff




Historien des idées, philosophe et politologue, Pierre-André Taguieff est directeur de recherche au CNRS. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, dont La Force du préjugé, Les Fins de l’antiracisme ou, plus récemment, Prêcheurs de haine.

La Judéophobie des Modernes

Des Lumières au Jihad mondial



Quoi de commun entre Voltaire et l’islamisme radical ?

Quoi de commun entre Marx et l’antisémitisme nazi ? La haine des Juifs, une haine qui, au regard de l’histoire, apparaît comme la plus longue, la plus intense et la plus délirante ayant jamais visé un groupe humain.

S’appuyant sur une documentation considérable, Pierre-André Taguieff nous montre ici comment la judéophobie, quelle que soit sa forme historique, fonctionne sur la base de récits d’accusation, organisés comme des mythes, par lesquels les Juifs sont déshumanisés de diverses façons. L’histoire globale de la judéophobie qu’il nous livre permet de saisir la permanence, la récurrence des stéréotypes antijuifs, mais aussi leur surprenante capacité d’adaptation et de diffusion planétaire, depuis l’antijudaïsme antique jusqu’à l’antisionisme radical qui s’est internationalisé depuis la fin du XXe siècle. Si les Juifs ont longtemps été mis en accusation par l’Occident chrétien, c’est, en effet, l’Occident judéochrétien qui se trouve désormais mis en accusation par ses ennemis, tant intérieurs qu’extérieurs.

Comme le montre, jusqu’à la caricature, le discours des islamistes radicaux, aujourd’hui, la haine des Juifs va, sans conteste, de pair avec celle de l’Occident.

© Odile Jacob




La judeophobie des modernes - Pierre-Andre Taguieff
Posté par: darlett (IP enregistrè)
Date: 31 mai 2008 : 23:05

Le multiculturalisme, ou le cheval de Troie de l'islamisme
par Pierre-André Taguieff (directeur de recherche au CNRS, Paris)


La Judéophobie des Modernes. Des Lumières au Jihad mondial, Pierre-André Taguieff, Odile Jacob, mai 2008


Il faut s'interroger sur un paradoxe dont les conséquences géopolitiques peuvent être considérables : un pourcentage significatif des populations de culture musulmane installées dans les pays occidentaux et désireuses d'y rester se montre hostile à la civilisation occidentale et manifeste une certaine empathie à l'égard des milieux jihadistes. C'est dans les pays qui ont institutionnalisé le multiculturalisme, donc inscrit dans la loi le principe du respect inconditionnel des « identités culturelles », que l'opinion musulmane s'aligne le plus sur les positions islamistes. Les promoteurs de l'idée d'une « citoyenneté postnationale » ont par ailleurs fortement contribué à légitimer le multiculturalisme comme forme de « politique de la reconnaissance ». La version la plus radicale du multiculturalisme est illustrée par la politique néerlandaise de « pilarisation », présentée comme un moyen de garantir la tolérance à l'égard des religions, en accordant un système éducatif séparé, des services sociaux distincts, des médias et des syndicats différents aux catholiques, aux protestants et aux communautés sécularisées. Jusqu'au début des années 2000, les gouvernements néerlandais successifs ont fait leur la doctrine selon laquelle le meilleur moyen de favoriser l'intégration des populations issues de l'immigration était d'encourager les immigrés à « maintenir leur propre culture » (1). Ils ont facilité ce « maintien » des identités culturelles d'origine par tout un arsenal de politiques de redistribution visant les « minorités culturelles » reconnues (2). Même si la question de savoir si les musulmans constituent un « pilier » séparé est restée controversée, c'est un fait que les Pays-Bas se sont montrés plus volontaristes que d'autres pays pour accorder aux musulmans des écoles distinctes (3). Le choc provoqué par l'assassinat du leader politique Pim Fortuyn (6 mai 2002) (4), suivi par celui du cinéaste Théo Van Gogh (1er novembre 2004) (5), l'un et l'autre engagés dans un combat contre ce qu'ils pensaient être « l'islamisation » de leur pays, a fait prendre conscience aux Néerlandais des limites et surtout des effets pervers du multiculturalisme, terrain privilégié pour la propagande islamiste.

La Grande-Bretagne, les Pays-Bas et le Canada sont parmi les pays occidentaux les plus touchés par une islamisation fondamentaliste intense. Le multiculturalisme modéré existant en Grande-Bretagne a été défini en 1966, non sans un certain angélisme, par Roy Jenkins, alors secrétaire du Home Office, comme « la diversité culturelle, couplée à l'égalité des chances, dans une atmosphère de tolérance mutuelle » (6). Après les attentats islamistes de Londres (juillet 2005), les Britanniques ont à leur tour pris conscience des dangers présentés par le multiculturalisme à l'époque du terrorisme jihadiste gobal. L'angélisme différentialiste ne devrait plus être à l'ordre du jour en Grande-Bretagne (7). Dans une étude d'une exceptionnelle lucidité, « Atmosphère suffocante dans le Londonistan », publiée en juin 2006, le politologue Ernst Hillebrand montre non seulement que le multiculturalisme britannique a totalement échoué, mais encore qu'il a favorisé l'emprise islamiste sur les musulmans vivant en Grande-Bretagne. Le constat est saisissant :

« 40 % des musulmans vivant en Grande-Bretagne souhaitent l'application de la Chari'a dans certaines parties du pays. 32 % pensent que les musulmans devraient s'engager pour mettre fin à la civilisation occidentale, “décadente et amorale”. 20 % disent comprendre les motivations des responsables des attentats du métro de Londres le 7 juillet 2005. Dans le même temps, seuls 17 % des non-musulmans pensent que musulmans et non-musulmans peuvent vivrent ensemble pacifiquement de façon durable. Et un quart de l'électorat peut s'imaginer votant un jour pour un parti d'extrême droite ; bienvenue en Grande-Bretagne, dans une société qualifiée par le British Council de “riche d'une grande diversité, ouverte, multiculturelle”. Alors que les autorités persistent à diffuser des messages glorieux, les attentats de Londres ont crûment révélé une réalité qui n'avait pu échapper, auparavant déjà, à tout observateur attentif : le vaste échec du multiculturalisme britannique, du moins en ce qui concerne l'intégration des musulmans. » (8)

Les défenseurs d'un multiculturalisme institutionnel, lorsqu'ils professent un relativisme culturel radical, sont le plus souvent des ennemis déclarés de l'Occident, dénoncé comme incarnation d'un judéo-christianisme qui, par son intolérance et son « impérialisme », serait une machine à détruire les « cultures ». Comme l'a justement remarqué Élie Barnavi, « le multiculturalisme est un leurre », qui continue cependant de séduire nombre d'intellectuels et d'homme politiques en Europe. Le multiculturalisme se fonde implicitement sur un essentialisme culturel qui mine les fondements de tout ordre politique : « On ne bâtit pas une société digne de ce nom, ce qui implique une langue dans laquelle on puisse se comprendre, un minimum de culture commune, une mesure de mémoire partagée, en enfermant les gens dans leur propre langue, leur propre culture et leur propre mémoire » (9). Le multiculturalisme institutionnel, c'est-à-dire le multicommunautarisme, revient à transformer le droit à la différence en un devoir d'appartenance ordonné à une identité d'origine supposée et imposée (10). Ses défenseurs ont contribué à jeter la confusion dans les milieux antiracistes en définissant le racisme par le rejet du multiculturalisme. Dès lors, toute critique du projet multicommunautariste est soupçonnée d'exprimer une vision raciste, alors même que le multiculturalisme, quelles que soient les bonnes intentions de ses partisans, ressemble fort à ce monstre que serait un « multiracisme ». Les illusions pseudo-antiracistes suscitées par cette absolutisation de la différence culturelle et ce culte de la diversité culturelle en dissimulent mal les effets pervers : la fragmentation conflictuelle de l'espace public, l'ethno-racialisation des rapports sociaux, l'individualisation négative, la généralisation normative des ségrégations, l'accroissement de la défiance entre les groupes séparés et, pour finir, la destruction de la vie civique, mettant en danger le régime démocratique.

Cette pathologie sociale peut être analysée sur la base du modèle d'intelligibilité construit par Robert Putnam dans les années 1990 et mis à l'épreuve au cours des années 2000, selon lequel le « capital social », soit « les réseaux qui relient entre eux les membres d'une société et les normes de réciprocité et de confiance qui en découlent » (11), tend à décliner lorsque s'accroît la diversité ethnique et culturelle. Putnam a étudié ce qu'il appelle la « diversité ethnique » aux États-Unis en référence aux quatre groupes retenus par le recensement nord-américain : les Hispaniques, les Blancs non-hispaniques, les Noirs non-hispaniques et les Asiatiques. Ces catégories dites « ethniques » ou « raciales » sont en fait tout autant culturelles. Dans un article retentissant publié en juin 2007 (12), le sociologue et politiste en arrive à formuler un certain nombre de conclusions inattendues de la part d'un « progressiste », et qu'on peut réduire à quatre thèses : 1° Plus la diversité ethnique grandit, plus la confiance entre les individus s'affaiblit ; 2° dans les communautés les plus diversifiées, les individus ont moins confiance en leurs voisins ; 3° dans ces mêmes communautés, non seulement la confiance inter-ethnique est plus faible qu'ailleurs, mais la confiance intra-ethnique l'est aussi ; 4° la diversité ethnique conduit à l'anomie et à l'isolement social. Il va de soi que de telles conclusions, établies à partir d'une enquête conduite d'une manière exemplairement scientifique sur un échantillon d'environ 30 000 individus, ne peuvent qu'affoler les adeptes du « politiquement correct » en matière d'immigration (célébrée comme une « richesse ») et les partisans du multiculturalisme (présentée comme la voie unique vers le nouvel avenir radieux). À la fin de son article, l'universitaire réputé « progressiste » qu'est Putnam définit sa position « politique » par un double rejet : « Il serait dommage qu'un progressisme politiquement correct nie la réalité du défi que constitue la diversité pour la solidarité sociale. Et il serait également regrettable qu'un conservatisme anhistorique et ethnocentrique refuse d'admettre que relever ce défi est à la fois souhaitable et possible ».

Il reste à étudier d'une façon comparative d'autres sociétés démocratiques travaillées par les effets négatifs d'un excès de diversité interne, qu'il s'agisse des Pays-Bas, de la Belgique, des pays scandinaves, de l'Allemagne ou de la Grande-Bretagne, sans oublier certains pays d'Europe méditerranéenne. L'horizon ainsi dessiné est plutôt sombre : si les thèses de Putnam sont fondées, universalisables et ainsi dotées d'une valeur prévisionnelle, alors le surgissement de sociétés multi-raciales et multiculturelles que favorise l'ouverture démocratique aura pour conséquences majeures le déclin de l'engagement civique et le délitement du lien social, remplacé par la défiance ou l'indifférence. Trop de diversité, en provoquant l'érosion de la confiance, tuerait la tolérance et ruinerait la solidarité sociale comme l'esprit civique. Dès lors, l'offre islamiste, centrée sur l'identité et la solidarité de groupe, deviendrait particulièrement attractive aux yeux des « communautés » diverses de culture musulmane. C'est dans ce contexte convulsif qui s'annonce, à l'heure du Jihad mondial, que les réseaux islamistes risquent de prendre leur essor en tout territoire situé hors de la « demeure de l'islam » (dar al-islam).

--------
Cet article est extrait du livre de Pierre-André Taguieff, La Judéophobie des Modernes. Des Lumières au Jihad mondial, Paris, Odile Jacob, en librairie le 25 août 2008.

1) Voir Yasemin Soysal, Limits of Citizenship : Migrants and Postnational Membership in Europe, Chicago, University of Chicago Press, 1994.
2) Voir Frank de Zwart, « Politiques ciblées dans les sociétés multiculturelles : acceptation, négation et substitution », Revue internationale des sciences sociales, LVII (1), n° 183, 2005, p. 164.
3) Voir John Rex, Ethnicité et citoyenneté. La sociologie des sociétés multiculturelles, textes sélectionnés, traduits de l'anglais et introduits par Christophe Bertossi, préface de Michel Wieviorka, Paris, L'Harmattan, 2006, p. 76. Le sociologue britannique John Rex est l'un des principaux théoriciens de l'ethnicité et un défenseur du multiculturalisme. Voir John Rex, Race and Ethnicity, Buckingham, Open University Press, 1986, pp. 119-135 (chap. 7 : « The Concept of a Multi-Cultural Society »).
4) Voir Pierre-André Taguieff, L'Illusion populiste. Essai sur les démagogies de l'âge démocratique, nouvelle édition refondue et considérablement augmentée, Paris, Flammarion, coll. « Champs », 2007, pp. 147-149.
5) Voir Ian Buruma, On a tué Theo Van Gogh. Enquête sur la fin de l'Europe des Lumières, tr. fr. Jean Vaché, Paris, Flammarion, 2006.
6) Cité par John Rex, Ethnicité et citoyenneté, op. cit., p. 135. Pour une présentation positive de ce modèle d'intégration visant à protéger la diversité culturelle, voir John Rex and Sally Tomlinson, Colonial Immigrants in a British City : A Class Analysis, Londres, Routledge & Kegan Paul, 1979.
7) Voir Gilles Kepel, Terreur et Martyre. Relever le défi de civilisation, Paris, Flammarion, 2008, pp. 206-224.
8) Ernst Hillebrand, « Atmosphère suffocante dans le Londonistan », Friedrich-Ebert-Stiftung, Analyses et Documents, juin 2006, p. 1. Ernst Hillebrand était alors directeur du bureau londonien de la Friedrich-Ebert-Stiftung. Il en dirige le bureau de Paris depuis juillet 2007. Voir aussi Paul Landau, Le Sabre et le Coran. Tariq Ramadan et les Frères musulmans à la conquête de l'Europe, Monaco, Éditions du Rocher, 2005, pp. 89-95. Ce spécialiste de l'islamisme analyse le multiculturalisme, notamment aux Royaume-Uni, comme le « cheval de Troie des islamistes » (op. cit., p. 93), image symbolique que je lui emprunte ici.
9) Élie Barnavi, Les Religions meurtrières, Paris, Flammarion, 2006, p. 129.
10) Pour une analyse critique approfondie, voir Pierre-André Taguieff, La République enlisée. Pluralisme, « communautarisme » et citoyenneté, Paris, Éditions des Syrtes, 2005, pp. 12-184, 273-346.
11) Voir l'article séminal de Robert D. Putnam, « Bowling Alone : America's Declining Social Capital », The Journal of Democracy, 6 (1), 1995, pp. 65-78 ; ainsi que l'ouvrage qui a suivi : Bowling Alone : The Collapse and Revival of American Community, New York, Simon and Schuster, 2000. Voir Jean-Louis Thiébault, « Les travaux de Robert D. Putnam sur la confiance, le capital social, l'engagement civique et la politique comparée », Revue internationale de politique comparée, 10 (3), 2003, pp. 341-355.
12) Robert D. Putnam, « E Pluribus Unum : Diversity and Community in the Twenty-first Century », Scandinavian Political Studies, 30 (2), juin 2007, pp. 137-174. Pour une analyse critique, voir Éloi Laurent, « Robert Putnam et la nouvelle indifférence américaine », 24 octobre 2007.

Lundi 05 Mai 2008
[www.communautarisme.net]




La judeophobie des modernes - Pierre-Andre Taguieff
Posté par: darlett (IP enregistrè)
Date: 01 juin 2008 : 01:30

A ce sujet justement et toujours de Pierre-Andre Taguieff sur le lien :

[www.phdn.org]

La judeophobie des modernes - Pierre-Andre Taguieff
Posté par: darlett (IP enregistrè)
Date: 01 juin 2008 : 01:53

Un extrait de ce livre de Taguieff au sujet de l'Affaire Al-Dura publie sur le site

[www.m-r.fr]


Imposture médiatique et propagande « antisioniste » :
une adaptation contemporaine de la légende du « crime rituel juif » -
Pierre-André Taguieff (directeur de recherche au CNRS, Paris)


Au début du XXIe siècle, c’est un fait que la vieille et triste histoire de la légende du « crime rituel juif » n’est pas terminée. On connaît le principal motif de l’accusation de « crime rituel », forgée par l’antijudaïsme chrétien médiéval : l’affirmation qu’existe une coutume juive consistant à sacrifier chaque année un chrétien, un enfant de préférence, pour en recueillir le sang, qui doit servir à fabriquer la matza, le pain azyme consommé pendant la fête de Pâques . Le « crime rituel » par excellence, c’est l’infanticide rituel. L’abbé Henri Desportes, en 1889, dans son livre intitulé Le Mystère du Sang chez les Juifs de tous les temps, décrit ainsi un meurtre rituel ordinaire, illustration par excellence des « turpitudes talmudiques » : « Un pauvre petit enfant chrétien se débat dans les affres d’une mort horrible, entouré des instruments de la passion, au milieu du ricanement des bourreaux ! » Et de s’indigner devant « cet immense rouleau d’horreurs, engendrées par la haine judaïque » . Plus tard, en 1914, Édouard Drumont avancera une explication racialiste de cette forme spécifique de criminalité : « L’existence du peuple d’Israël n’est qu’une lutte constante contre l’instinct de la race, l’instinct sémitique qui attire les Hébreux vers Moloch, le dieu mangeur d’enfants, vers les monstrueuses idoles phéniciennes. » La question est ainsi réglée : chez les Juifs, le crime rituel est dans la race – dans le « sang de la race ». L’infanticide rituel, chez les Juifs, n’est pour Drumont que la manifestation périodique d’un instinct racial irrépressible.

Cette accusation antijuive, d’origine européenne et chrétienne, a largement été acclimatée au XIXe siècle au Moyen-Orient. Dans ce nouveau contexte culturel, les enfants chrétiens ont été concurrencés puis remplacés par les enfants musulmans. On trouvait une récente mise en scène du stéréotype du Juif cruel et sanguinaire, criminel rituel, dans les caricatures, courantes dans les pays arabes jusqu’aux derniers mois de 2004, qui représentaient Ariel Sharon en vampire, les yeux injectés de sang, buvant du sang arabe, ou en ogre dévorant un ou plusieurs enfant(s) Palestinien(s) . La représentation répulsive du « sioniste » en tant que criminel-né a été recyclée par le discours de propagande « antisioniste » présentant l’armée israélienne comme une bande de tueurs assoiffés de « sang palestinien », et plus particulièrement de tueurs d’enfants palestiniens, prenant plaisir à les tirer « comme des lapins ». De l’amalgame polémique « sionisme = racisme », on est passé au stade suprême de la propagande antijuive, fondé sur l’équation « sionisme = palestinocide », le « palestinocide » étant présenté de préférence comme un infanticide. Dans la construction du « sionisme » comme une entreprise génocidaire, les propagandistes font feu de tout bois : après avoir transformé les Palestiniens en symboles des pauvres, des humiliés et des offensés, puis en victimes de « l’impérialisme d’Israël » ou plus largement d’un « complot américano-sioniste » mondial, ils les transforment en enfants « martyrs ». Car c’est également par assimilation avec la légende du « crime rituel juif » que s’est opérée l’exploitation internationale, par toutes les propagandes « antisionistes », du prétendu assassinat par l’armée israélienne au cours d’une fusillade au carrefour de Netzarim (bande de Gaza), le 30 septembre 2000 (alors que commençait la deuxième Intifada), du jeune Palestinien Mohammed al-Dura .

Le cameraman palestinien Talal Abu Rahma, travaillant pour France 2 en collaboration avec le journaliste Charles Enderlin - qui n’était pas présent à Netzarim sur le lieu de la fusillade -, avait filmé environ vingt-sept minutes de l’incident (constituant les rushes). La chaîne publique France 2 a diffusé le jour même, dans son Journal, l’image-choc du jeune Palestinien de 12 ans qui aurait été « tué de sang-froid » par des soldats israéliens. Cette image de l’enfant inerte, présentée par Charles Enderlin comme la preuve de la mort de l’enfant, a été diffusée et rediffusée par tous les médias de la planète, véhiculant et renforçant le stéréotype du Juif criminel et pervers, assassin d’enfants. Les effets d’incitation au meurtre de la diffusion de ces images ont été immédiats : le 12 octobre 2000, aux cris de « vengeance pour le sang de Mohammed al-Dura ! », des Palestiniens déchaînés ont mis en pièces les corps de deux réservistes israéliens. La haine et la violence meurtrière contre les Juifs paraissaient justifiées. C’est pourquoi la Seconde Intifada, avec ses effets d’imitation hors des lieux du conflit, a été lancée sur le marché médiatique mondial d’un façon particulièrement efficace par ce montage d’images destiné à provoquer l’indignation. Dans l’opinion occidentale, on a pu observer des réactions semblables à celle d’une journaliste fort estimable par ailleurs, Catherine Nay : « La mort de Mohammed annule, efface celle de l’enfant juif, les mains en l’air devant les SS, dans le Ghetto de Varsovie. » La suggestion est claire, et illustre parfaitement l’idéologie de la substitution : le « racisme anti-arabe » aurait remplacé le « racisme antijuif », l’arabophobie et l’islamophobie représenteraient la forme contemporaine de la judéophobie. Dans la société de communication planétaire, les images peuvent constituer des armes redoutables, dès lors qu’elle inspirent des désirs de vengeance et alimentent la propagande en faveur du Jihad mondial .

L’historien américain Richard Landes voit à juste titre dans cette affaire de « martyr » ultramédiatisée, rejouant contre Israël l’accusation d’infanticide rituel, le « premier “meurtre rituel” du XXIe siècle » . À la suite de nombreuses contre-enquêtes mettant en cause la chaîne publique de télévision française, France 2, qui avait diffusé le court montage d’images (50 secondes) qui a fait le tour du monde, alimentant la haine à l’égard d’Israël et des Juifs, la mystification a commencé, à l’automne 2007, à être reconnue. À une mise en scène organisée par des palestiniens sur place se serait ajoutée la sélection d’images due à Charles Enderlin et aux responsables de France 2 . Fin septembre 2007, le directeur du Bureau de presse gouvernemental israélien, Danny Seaman, a estimé publiquement que les images ont fait l’objet d’une manipulation de la part du caméraman Talal Abu Rahma. Cette intervention significative est le résultat d’initiatives individuelles qui, en dépit des sarcasmes, se sont poursuivies en vue de d’établir les faits, indépendamment des rumeurs. Outre les universitaires Richard Landes et Gérard Huber, les journalistes Denis Jeambar, Daniel Leconte et Luc Rosenszweig ont contribué à mettre en doute la conformité du reportage avec la réalité des événements . Mais c’est surtout grâce aux efforts de Philippe Karsenty que l’icône victimaire al-Dura s’est transformée en « affaire al-Dura ». Après avoir visionné et analysé, avec d’autres observateurs, les rushes de France 2, Philippe Karsenty, jeune chef d’entreprise français qui dirige une agence de notation des médias, Media Ratings, s’est engagé dans un combat difficile en diffusant sur son site, le 22 novembre 2004, les conclusions de son examen critique, qualifiant de « supercherie » sur la base d’une « série de scènes jouées » le reportage du correspondant permanent en Israël, Charles Enderlin, responsable du montage et du commentaire des images. Philippe Karsenty n’a pas hésité à affirmer qu’il s’agissait d’un « faux reportage » et d’une « imposture médiatique », bref d’un reportage truqué. La direction de France 2 et son journaliste Charles Enderlin ont engagé des poursuites contre Philippe Karsenty qui, après avoir été jugé coupable de diffamation en première instance, le 19 octobre 2006, par la 17e chambre correctionnelle de Paris, a fait appel. À la demande de la 11e chambre de la Cour d’appel de Paris, les rushes filmés par le cameraman palestinien ont été visionnés et commentés par les deux parties au cours de l’audience du 14 novembre 2007. Mais, sur les 27 minutes de rushes qui avaient été annoncées, France 2 n’en a présenté que 18, lesquelles donnent à voir notamment des répétitions de mise en scène de fausses fusillades, avec de faux blessés, ce qui suffit à jeter le doute sur le sérieux du reportage. Ce qui est sûr, c’est qu’il y avait un dispositif de mise en scène chez les Palestiniens présents sur les lieux. L’examen du fond de l’affaire a été fixé au 27 février 2008. Selon plusieurs articles de presse, le soupçon de truquage a été renforcé par le visionnage des rushes . La dépêche de l’AFP du 14 novembre 2007 a fort bien caractérisé le point en litige : « Alors que le reportage se terminait sur une image de l’enfant inerte, laissant à penser qu’il était mort à la suite des tirs, dans les rushes, on voit, dans les secondes qui suivent, l’enfant relever un bras. C’est un des éléments qui poussent M. Karsenty à affirmer qu’il y a eu mise en scène. » En déclarant que l’agonie de l’enfant avait été filmée, Charles Enderlin a menti. Rien de tel n’avait été filmé. Le « mort en direct » de l’enfant n’a pas eu lieu. Si ces rushs n’ont pas été présentés lors de l’audience du 14 novembre 2007, c’est tout simplement parce qu’ils n’existent pas. Il s’ensuit qu’il n’y a aucune preuve que l’enfant a été tué. Ce qui n’exclut pas bien sûr que l’enfant, au cas où il aurait été touché, soit décédé à la suite de ses éventuelles blessures. Mais nous ne disposons d’aucune preuve de ce décès.

Il reste à s’interroger sur les raisons qui ont conduit le professionnel aguerri qu’est Charles Enderlin à sombrer dans la faute professionnelle. Il faut tout d’abord tenir compte de la forte pression idéologique qui s’exerçait au début de l’Intifada Al-Aqsa. En février 2005, s’interrogeant sur le fait que les soldats israéliens avaient été si facilement accusés, sans la moindre preuve, d’avoir tiré sur l’enfant, le journaliste Daniel Leconte avait justement relevé qu’il existait une « grille de lecture de ce qui se passe au Proche-Orient » , et que les commentateurs avaient une forte tendance à y adapter les événements relatés, moyennent quelques « corrections » et accommodations. Telle est la tyrannie de l’idéologiquement correct, fondé sur un sommaire manichéisme : d’une part, les méchants agresseurs, incarnés par les soldats israéliens ; d’autre part, les innocentes victimes, représentées par les enfants palestiniens. C’est ainsi que l’idéologiquement vraisemblable se transforme magiquement en réalité. En outre, n’étant pas présent à Netzarim sur le lieu de la fusillade supposée, le journaliste Charles Enderlin, vraisemblablement saisi par le désir du scoop, a pu être manipulé par son caméraman palestinien qui, membre du Fatah, n’a jamais caché son engagement politique. Quand Talal Abu Rahma a reçu un prix, au Maroc, en 2001, pour sa vidéo sur al-Dura, il a déclaré à un journaliste : « Je suis venu au journalisme afin de poursuivre la lutte en faveur de mon peuple. » Quoi qu’il en soit, Richard Landes, présent lors de cette audience, a relevé le fait qu’il manquait dans les rushes présentés le 14 novembre par France 2 et Charles Enderlin à la Cour d’appel de Paris « les scènes les plus embarrassantes pour eux, notamment la scène du jeune au cocktail Molotov avec une tache rouge au front », avant d’ajouter : « Aux États-Unis, la présidente de la Cour aurait dit : “Comment osez-vous nous dire que vous avez enlevé les passages qui vous semblaient sans rapport ? C’est à nous de décider” » .

Mais le mal a été fait, et la rumeur criminalisante lancée. Innocente de ce dont on l’accusait, l’armée israélienne est devenue la cible de campagnes de diffamation destinées à ternir l’image d’Israël. En outre, exploitée par la propagande des islamistes radicaux, l’image du « petit Mohammed »-martyr a « sonné l’heure du Jihad mondial dans le monde musulman » , un an avant les attentats antiaméricains du 11 septembre 2001. Cette image a paru confirmer l’une des affirmations récurrentes des hauts dirigeants d’Al-Qaida, selon laquelle les Juifs et leurs alliés américains « tuent les musulmans », ce qui justifiait le déclenchement du « Jihad défensif », impliquant l’obligation pour tout musulman de combattre les agresseurs des musulmans ou les envahisseurs des « terres musulmanes », bref tous les « ennemis de l’Islam » .

Les islamistes palestiniens n’ont pas manqué d’instrumentaliser dans la guerre politico-culturelle qu’ils mènent contre « l’ennemi sioniste » ou plus simplement « les Juifs ». Le Hamas s’est ainsi lancé dans une opération d’endoctrinement des jeunes enfants palestiniens dans la perspective du Jihad, en sloganisant l’accusation visant les Juifs comme « tueurs d’enfants ». Chaque vendredi après-midi, sur la chaîne satellitaire du Hamas, Al-Aqsa TV, est diffusée une émission pour enfants intitulée « Les Pionniers de demain ». La star de cette émission, très regardée par les enfants de tout le monde arabe, est une abeille géante nommée Nahoul. Le journaliste du Monde Benjamin Barthe présente ainsi cette émission de propagande : « Durant une demi-heure, Nahoul et la jeune présentatrice Saraa interprètent une série de sketchs entrecoupés d’interventions de spectateurs par téléphone. Les scénarios mêlent devinettes, conseils pratiques (“Les bienfaits de l’ananas”) et morale familiale (“Pourquoi il faut aimer sa mère”) à une forte dose de propagande islamiste, truffée d’apologie du “martyre” et d’incitation à la haine des “Juifs”. »

L’abeille Nahoul a remplacé la souris Farfour, personnage ressemblant à Mickey Mouse, dont l’un des messages, au printemps 2007, avait été un appel à libérer « les pays musulmans envahis par les assassins ». Réagissant à une menace de procès par la compagnie Disney, Al-Aqsa TV a décidé de sacrifier Farfour, non sans une ultime provocation, qui a consisté à mettre en scène la mort de la souris islamiste, victime de l’extrême violence d’un interrogateur israélien, désireux de lui voler sa propriété . Le mot de la fin a été prononcé par la présentatrice Saraa : « Farfour est mort en martyr en protégeant sa terre, il a été tué par les tueurs d’enfants. » L’intention directrice de l’émission est parfaitement exprimée dans le charmant dialogue destiné à présenter le nouveau personnage :

« - Saraa : Qui es-tu ? D’ou viens-tu ?


- Nahoul : Je suis Nahoul l’abeille, le cousin de Farfour. 


- Saraa : Qu’est-ce que tu veux ?


- Nahoul : Je veux suivre les pas de Farfour
.

- Saraa : Ah ? Comment ça ?

- 
Nahoul : Oui, le chemin de l’Islam, de l’héroïsme, du martyr et des Moudjahidines. Nous prendrons notre revanche sur les ennemis d’Allah, les assassins d’enfants innocents, les tueurs de prophètes, jusqu’à ce que nous libérions Al-Aqsa de leur impureté…

- 
Saraa : Bienvenue, Nahoul. »

L’objectif d’une telle émission est clair : conduire les jeunes téléspectateurs à intérioriser cette représentation du Juif comme criminel et infanticide afin de les disposer à devenir des combattants fanatiques. La légende du « crime rituel juif », réactivée par l’exploitation symbolique de la « mort en direct » du jeune al-Dura, est devenue une source d’inspiration pour toutes les formes culturelles de la propagande antijuive contemporaine, des timbres-poste et des affiches à l’effigie d’al-Dura aux émissions interactives de télévision. Il est hautement significatif que, face aux critiques, Hazem Sharawi, le jeune concepteur des « Pionniers de demain », ait ainsi défendu son émission : « Nous ne faisons que refléter la réalité. Regardez ce qui est arrivé à Mohammed al-Dura… ». Pour les professionnels de la criminalisation des Juifs, l’absence de preuve de la mort d’al-Dura est devenue la preuve par al-Dura. La poupée engagée a donc continué à prêcher le Jihad. Le journaliste du Monde souligne l’association récurrente entre l’appel au Jihad et le thème répulsif du « Juif tueur d’enfants » : « Dans un épisode diffusé fin juillet [2007], l’abeille islamiste parle de libérer la mosquée Al-Aqsa, dans la Vieille Ville de Jérusalem, des “impuretés des Juifs criminels”. À une petite spectatrice qui explique par téléphone vouloir devenir “journaliste”, Nahoul conseille de “photographier les Juifs quand ils tuent les enfants”. Puis une autre fillette appelle et clame que, une fois grande, elle sera une “combattante du Jihad”. “Si Dieu le veut”, répond Saraa, comblée par la ferveur islamiste de son très jeune public. »

On ne saurait sous-estimer ni l’importance, ni la gravité des conséquences de cette opération de propagande, qui a touché le public planétaire. Elles ne pourront jamais être totalement effacées, quels que soient les résultats de la contre-offensive intellectuelle récemment lancée par des universitaires et des journalistes soucieux de rétablir la vérité. Le pseudo-reportage de France 2, qui a puissamment servi à diaboliser et à criminaliser Israël, tout en alimentant le discours des partisans du « Jihad défensif » mondial, aura produit une « affaire al-Dura » qui ne fait vraisemblablement que commencer. On attend avec autant d’impatience que de scepticisme l’intervention, sur cette abominable affaire, des professionnels de « l’éthique des médias », trop souvent abonnés aux colloques ronronnants dont l’une des fonctions est précisément d’écarter toutes les « questions qui fâchent ». L’affaire Dreyfus pourrait être à cet égard exemplaire. Lorsque Lucien Herr et Bernard Lazare se lancèrent dans le combat, ils paraissaient isolés autant que vulnérables en leur quête de justice et de vérité. Et pourtant, le courage et la lucidité militante d’un petit groupe de citoyens déterminés ont fini par vaincre toutes les puissances sociales coalisées, l’état-major, l’armée et l’Église. Un contre-pouvoir animé par des idéaux a détruit le système bâti par les faussaires et leurs complices, les fanatiques et les conformistes. La démocratie véritable n’est pas faite pour les endormis ni pour les pusillanimes.

En



Dèsolè, vous n'avez pas d'autorisation poste/rèponse dans ce forum.

   Rechercher sur
 

  Web    
Darnna

� 2008 Darnna.com - All rights reserved.

'