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Exposition de photos au Musee du Judaisme a Casablanca
Posté par: darlett (IP enregistrè)
Date: 12 décembre 2006 : 07:30

Pour souligner cette exposition de photos qui se tient actuellement au Musee du Judaisme a Casablanca, il y a quelques articles parus ici et la dont voici un.

Je le retranscris entierement car il donne des details importants sur notre vecu commun au Maroc des annees 50, Juifs et musulmans.


Je precise que les 2 photographes sont Gabriel Axel Soussan et Claude Sitbon


Photo ethnographique: Tranches de vie juives


Le Mus?e du juda?sme marocain pr?sente, jusqu?au 31 janvier, une collection de photos sur les Casablancais juifs dans les ann?es 1960.

- ?Beret, feutre et casquettes,
- ?on ne marchait pas nu-tete?,
- ?Si jeune et si savant !?,
- ?Un Juif, un Musulman et quelques cageots de legumes?,
- ?Que ferait-il sans elle ??...


Les 34 photos expos?es au Mus?e du juda?sme marocain sont ?loquentes, tout autant que leurs titres. Portraits, sc?nes de rue, c?r?monies ? la synagogue, elles racontent, avec les nuances ?mouvantes du noir et blanc, ce qu?a ?t? la vie de la communaut? juive de Casablanca dans les ann?es 1960.

Les deux photographes, Claude Sitbon et Gabriel-Axel Soussan, sont deux enfants de la ville. ?Deux copains, fous de photo et du Maroc?, se souvient ce dernier, ?voquant la m?moire de son ami et mentor. Claude Sitbon, n? en 1929, ?tait p?diatre ? Casablanca avant de partir pour Paris o? il est d?c?d? en 1995. Gabriel-Axel Soussan, n? en 1938, est parti lui aussi pour Paris. Ces photos, fruit de leurs recherches communes, m?me si chacune est sign?e de son auteur, sont pour lui ?un acte de m?moire et un t?moignage sur la communaut? juive du Maroc contemporain?. L?exposition a circul? ? New York, Bruxelles, Amsterdam et Londres, et partira bient?t pour Paris, mais il en a fait don au Mus?e du juda?sme marocain de Casablanca, ?le seul mus?e d?art juif dans le monde arabe?, insiste la conservatrice Zhor Rehihil, une des premi?res Marocaines musulmanes ? avoir travaill? sur la communaut? juive. ?Ces photos viennent compl?ter la collection du mus?e, qui est surtout ethnographique et pr?sente le patrimoine marocain dans sa composante juive, surtout ? travers des objets de culte, des costumes, des bijoux?, pr?cise-t-elle.


T?moignage

Et c?est ? cette dimension de t?moignage que tient la valeur de ces photos. Pourtant, leur valeur esth?tique est ind?niable, par la beaut? de leur construction et l??motion qu?elles d?gagent. Le Dr. Claude Sitbon ?tait attentif aux visages en ce qu?ils refl?tent la spiritualit? des gens, il s?attachait ? saisir les individus dans leur activit? quotidienne. Cette sensibilit?, il l?a ?galement d?velopp?e dans le Marais ? Paris, notamment rue des Rosiers. ?Si jeune et si savant? montre un jeune ?tudiant ab?m? dans l??tude de la Thora ; ?Sa lumi?re est en lui-m?me? pr?sente le visage p?m? et couvert de rides d?un vieillard ? la barbe chenue. Gabriel-Axel Soussan, lui aussi, aimait particuli?rement faire des portraits pour ce qu?ils r?v?lent de la nature humaine. Sa photo ?Quatre femmes, quatre g?n?rations? lui a d?ailleurs valu le grand Prix international Nikon. Un tableau de famille dans la synagogue de la rue Lusitania, o? quatre femmes, de l?a?eule ? la jeune fille, posent ? la mani?re des tableaux du XVIII?me si?cle autour d?une tenture de velours brod?e au fil d?or de caract?res h?breux.

Si l?on est toujours sensible ? l?esth?tique qui ?mane de ces photos, le temps qui a pass? et les bouleversements qu?a connus la soci?t? marocaine ces cinquante derni?res ann?es nous am?nent ? les regarder avec l??motion qu?on ressent face ? un t?moignage d?un pass?, certes proche, mais r?volu. Il n?est pourtant pas loin le temps o?, dans les ann?es 1960, plus pr?cis?ment entre 1963 et 1965, les photographes ont op?r?, ?un Casablancais sur cinq ou six ?tait juif?, comme le souligne Simon L?vy, secr?taire g?n?ral de la Fondation du patrimoine culturel jud?o-marocain et directeur du mus?e, qui d?nombre entre 75 000 et 80 000 Casablancais juifs. Cette communaut? ?tait ? l?image de la ville, illustrant toutes les classes sociales, du bourgeois jusqu?au mendiant : ?Il y avait un grand sous-prol?tariat, des ch?meurs, m?me des putes et des voleurs? D?ailleurs, il y avait beaucoup d?institutions de charit? qui s??taient d?velopp?es pour faire face ? la pauvret?. Ceux qui allaient ? l??cole parlaient fran?ais, les autres parlaient l?arabe marocain avec quelques particularit?s?. A ce sujet, on trouve dans le mus?e une affiche sign?e du militant nationaliste marocain juif Azouz Cohen qui appelle en 1931 ses cor?ligionnaires ? ne pas n?gliger l?apprentissage de l?arabe : ?Le Maroc qui vous a vu na?tre et auquel vous rattachent tant de liens a pour langue officielle l?ARABE. C?est non seulement la langue officielle mais c?est aussi la langue de vos p?res ; c?est la langue v?hiculaire de tant de nos compatriotes?. Et de demander l?adjonction de professeurs d?arabe dans les ?coles franco-isra?lites et l?attribution de bourses pour les ?tudiants brillants. Comme les autres Casablancais, ?les Juifs venaient de toutes les villes du Maroc?, rappelle Simon L?vy. Zhor Rehihil explique que dans les quartiers qu?ils occupaient, on d?signait ?la maison des Chleuh, des Souassa, des Aarobi, des Doukkala, des Fassis, des Jbala??. Ils occupaient les rues autour de la place Verdun (rue Lac?p?de, rue Lusitania), le mellah ? Bab Marrakech (rue des Anglais). ?On appelait mellah, ? tort, toute l?ancienne m?dina alors qu?elle n??tait pas enti?rement le mellah, qu?il y avait des rues m?lang?es?, se souvient Simon L?vy. Le premier habitat moderne occup? par la communaut? juive a ?t? le quartier d?El Hank.


Derniers clich?s

C?est vers cette communaut? vari?e et multiple que Claude Sitbon et Gabriel-Axel Soussan ont tourn? leurs objectifs. D?abord int?ress?s par le ?juda?sme du petit peuple?, celui des artisans, des petits vendeurs, ils ont aussi saisi quelques bourgeois, surtout dans les c?r?monies religieuses et les mariages ? la synagogue. ?On avait une triple pr?occupation?, explique le photographe : ?une pr?occupation humaines car il y avait une humanit? tr?s belle ? regarder et ? photographier?. Et ? voir ce marchand d??pices v?tu de guenilles, ce joueur de dames, cette femme d??ge m?r posant dans sa keswa lkbira, sa tenue de mari?e dans laquelle elle avait re?u la c?r?monie du henn?, ou encore le tenancier de bouiboui annon?ant le menu de Yom Kippour sur une ardoise marqu?e Pepsi-Cola, on veut bien le croire. ?L?exposition est tr?s expressive?, insiste Simon L?vy. ?Elle montre des v?tements qu?on ne voit plus, comme les djellabas noires ou les fichus?. ?Notre seconde pr?occupation ?tait politique?, poursuit Gabriel-Axel Soussan. ?Nous avions sous les yeux la cohabitation des juifs et des musulmans. Ils travaillaient ensemble, se touchaient, ?changeaient??, tels ces deux propri?taires d?une m?me ?choppe de l?gumes. ?Si on entre dans les photographies, on se rend compte que les personnages sont compl?tement semblables. On sait en m?me temps qui est musulman et qui est juif. Les deux appartiennent ? la m?me terre, ont les m?mes gestes, la m?me proximit??. Il y avait enfin un int?r?t pour la spiritualit?, montr?e dans son aspect esth?tique : la for?t de kissane, les bourgeoises en grande toilette r?unies ? la synagogue pour un mariage? Une spiritualit? ?proche de celle des musulmans, avec les hiloulat, ?quivalents des marabouts?. Une tr?s belle photo montre un musulman entretenant la tombe d?un saint juif.

Ces photos sont parmi les derni?res de cette union des Casablancais quelle que soit leur confession. ?Deux ? trois ans plus tard, vers 1964-1965, beaucoup sont partis. ?a s?est acc?l?r? apr?s la guerre des Six Jours?, explique Simon L?vy. Gabriel-Axel Soussan, lui, insiste sur ?le d?part messianique, apr?s la cr?ation de l?Etat d?Isra?l, renforc? par les tensions au Proche-Orient?. Zhor Rehihil, elle, souligne le fait que les premiers ? partir ?taient les classes pauvres?
Cette exposition est rendue vraiment n?cessaire car cette image du pass? casablancais est un important enjeu de m?moire et d?identit?, pas seulement pour les quelque 2000 Casablancais juifs qui sont rest?s mais pour tous les Marocains.

Kenza Sefrioui
Source : [www.lejournal-hebdo.com]




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