"Palais et Jardins" de David Elmoznino
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david elmoznino (IP enregistrè)
Date: 21 septembre 2009 : 13:54
David Elmoznino
d’Eilat Israël
Palais et Jardins
En hébreu: Armonot Ve Boustanim
Traduit par Rony Ruimy (Suisse)
"Palais et Jardins”, (en hébreu: “Armonot Ve Boustanim”), est un recueil de récits consacré au Maroc, aux juifs du Maroc, à la culture et à la tradition partagées, issu de la main de David Elmoznino, né à Essaouira-Mogador en 1944, qui a émigré vers Israël à l'âge de 10 ans, et qui réside actuellement à Eilat, au bord de la mer rouge.
Au fil de ces récits différents et variés, l'auteur nous raconte la grande communauté juive du Maroc au milieu du siècle passé, au sein d'une civilisation en amont des grandes vagues d'émigration (Aliyah) qui allaient suivre, à travers les yeux d'un enfant qui a grandi au Maroc et qui est revenu quelques dizaines d'années plus tard sur les lieux de son enfance, dans un élan irrésistible poussant nombre de nouveaux immigrants à une sorte de pèlerinage aux sources. Ce sont des récits hauts en couleur, chaleureux, brossant des tableaux ou s'entremêlent images et souvenirs, us et coutumes, spécialités et cuisine locale, des fresques de lieux enchantés et enchanteurs, de particularismes et de tissus de relations intra et intercommunautaires.
David se consacre à l'écriture de ses chroniques dès son retour du Maroc. Au delà des narrations colorées, des évènements puisés dans la maison du père, David Elmoznino a réussi à faire revivre la culture marocaine dans toute son authenticité et retrace par là, la vie de l'importante communauté juive qui en était imprégnée. Une âme d'artiste était cachée en lui, attendant le moment de s'exprimer, patientant durant toutes ces années durant lesquelles la priorité était accordée aux besoins de sa famille, et à sa subsistance. Il devait ronger son frein lors de ses études, cherchant en vain dans les livres scolaires, toute allusion ou référence à cette culture juive nord-africaine, à cette richesse immense, à cette mémoire menacée d'ores et déjà de disparaître dans les méandres de l'oubli, dès lors que la majorité des juifs du Maroc avaient quittés le pays après des millénaires de présence. Devant ce vide historique et culturel, un immense besoin de pallier à ce manque se fit en lui.
Mais il devait encore patienter. L'opportunité ne se présentât qu'après son dernier périple au Maroc, après avoir revu les lieux de son enfance, auxquels il vouait de longues années durant, une nostalgie profonde, lorsqu'il vit la place de Djama'-El-Fna du point de vue d'un touriste cette fois-ci, et non de celui d'un enfant dont elle représentait tout l'univers d'alors, après avoir accumulé et absorbé toutes ses visions lors de cette tournée émouvante, ce retour aux sources, aux origines. Les souvenirs se rapportant à son enfance à Marrakech et à d'autres lieux chers se brouillaient, se mêlaient, devenaient confus. Lorsqu'il a quitté son ancienne patrie en compagnie de ses parents, la coupure fut subite, fulgurante, figeant images et souvenirs dans un contexte précis. Toute cette époque est remontée à la surface, émergeant lentement des profondeurs oú elle était enfouie, et trouve son expression sous forme de courtes nouvelles évocatrices.
Cet ouvrage nous livre également un message d'amour et de paix, celui d'une vie communautaire intime, d'une coexistence fraternelle et pacifique, un message de passion aussi, tel ce récit relatant l'amour merveilleux naissant, jaillissant entre une jeune fille musulmane et un jeune berbère, un récit inséré parmi d'autres histoires se nourrissant du quotidien juif marocain, et des modes de vie locaux.
Une réaction particulièrement touchante provient de l'historien marocain bien connu, Betzalel Dahan:
"David fait partie de ceux qui considèrent l'écriture comme une mission auprès du public, et auprès de la communauté, comme un moyen de transmettre l'héritage de la maison du père. David ne se trouve pas dans le besoin de tirer sa subsistance de l'écriture. Il nous rappelle ce rabbin juif marocain qui a toujours prôné une foi désintéressée, et qui, dans sa Tébah1 en tant qu'officiant (Shaliyah Tzibour2), se refusait de voir dans la prière la source de sa subsistance. David exerça un autre métier, ce qui lui permît de subvenir en tout honneur aux besoins de sa famille, et, pour la communauté qui en est fière, il représente le modèle à suivre et à imiter. Son ouvrage, qui est sorti dernièrement, est un véritable document d'authenticité, il y raconte, avec une grande sobriété littéraire, et c'est là toute la valeur et la grandeur du livre, des histoires courtes qui se lisent d'une traite, et qui mettent le lecteur en appétit, à la manière de cette daffina servie après la prière du matin (Shahrit3) dans le prolongement d'un Samedi sacré. Pour toutes ses raisons, il faut encourager l'auteur et faire connaître son livre, c'est en quelque sorte la Dafina4 de notre mère, accompagnée des poésies et des chants de notre père de famille”.
Le livre “Palais et Jardins” est sorti à la veille du Nouvel An Juif5, il a été chaleureusement accueilli par des dizaines de foyers marocains, mais aussi non marocains en Israël. Le livre est écrit dans un style fluide et attachant, il est difficile de s'en séparer, d'en interrompre la lecture et de le quitter des yeux. Ces courts récits nous captivent, leurs descriptions envoûtantes nous entraînent au delà du présent, et nous rappellent ça et là, d'antiques légendes, des contes et narrations dans le style de l'éternel Mille et une Nuits.
"Palais Et Jardins” a sans aucun doute révélé au grand public l'Eilatien David Elmoznino, policier retraité et écrivain à l'aube de son oeuvre, de sa création et de sa réalisation. Ses talents de conteur le mettent sous les feux de la rampe, il nous dévoile à travers ce parcours et son aboutissement, la nature profonde de ses voeux simples et secrets, nichés au fond du coeur, des années durant.
Chaudement recommandé.
Rony Ruimy