L'Histoire n'étant pas une scicence sûre, celle des juifs dépendra d'abord de son historien, et surtout de l'époque et du lieu. La mienne, celle d'un itinirant, est centrée surtout sur:
LES LETTRES DE MON MELLAH
Raphael Ohayon
Les années 1930, sont celle de ma vie de garçonnet (8 ans).
Occultant la vie dans ma famille dans une grande maison, avec un père, "chef de tribu" d'un rayonnement ineffaçable dans nos mémoires, je ne garde comme trace que la vie de nos frères juifs vivant -si l'on peut appeler cela une vie- dans ce quartier n'enviant en rien celles vécues dans les Ghettos du moyen âge.
Subissant encore les retombées de la crise de 1929, la nouvelle concurrence des produits japonais, les années de sécheresse suivies d'épidémies de typhus, ce qui accélérait le chômage et la misères. La plupart de nos juifs, dans ce Mellah, étaient des artisans et, comme les modes et les produits d'importation évoluaient, ils se trouvaient dans un chômage irrémédiable.
Les chaleurs torrides de l'été s'ajoutant à ces situations, l'entassement d'une "densité" indescriptible dans des chambres sombres et humides qu'habitaient des familles de plusieurs âmes..... Au milieu de tout cela, contrairement aux mois de Adar et Nissan, les rappels de tous les deuils subis par nos frères, une ambiance de désespoir planait dans cet air étouffant.
Si Irmiahou a employé l'expression:
"Imm yèch makh'ob qemakh'obi" (s'l y a une douleur comme ma douleur), c'est parce qu'aucun peuple n'a eu à souffrir comme nous. En effet, les luttes en toutes époques et en tous lieux pour nous anéantir, n'ont eu de semblables nulle part ailleurs.
Rappelons nous: les invasions tant chrétiennes que musulmanes, soumettant à la conversion forcée,..... l'Espagne catholique laquelle, pour raison de mariage royal, obligeait la monarchie portugaise à pratiquer l'inquisition. Plus proche de nous, les Nazis, à chaque occupation, ne procédant avant tout qu'à l'arrestations et à la déportation des juifs: Salonique, Tunis, la "France libre", l'Italie, et tous les Pays de l'Europe envahis par eux.
A cette douleur, y en a-t-il de comparable ?
Le nombre inimaginable de nos frères égorgés à Jérusalem, tant par les babyloniens que par les Romains ceci lors des destructions des deux Temples: Pour le seul motif d'être juifs. De nos jours, Papon, Xavier Walas, Pierre Laval, dans l'indifférence totale des "braves citoyens qui n'étaient pas au courant", raflant sans distinction, jeunes, vieillards, femmes, enfants, bien portants, malades, entassés dans ces wagons sans nourriture, dans la soif des chaleurs de juillet, traînant de gare en gare pendant de très longues journées.
Dans pareil désespoir, comme lors de tous les massacres, dans ces maudits wagon, ou bien dans les mellah perdus au cours de ces années trente, le soupir exprimé dans nos "kinot" était:
"hatta cammett nichcah'ti, véénene dorech lénafchi". (*)
C'est pour ces massacres que je rappelle les paroles de Jérémy.
Dans notre Mellah, déjà , au cours des années 30, nous avions les bruits qui couraient venant d'Allemagne, alors que nous n'avions, ni radios, ni transistors, ni journaux, sauf quelques un en hébreux venant de Jérusalem.
Et pourtant, l’illustre défenseur du bien être social, de sa justice, déclare haut et fort, qu'il n'était pas au courant "des affaires juives" en France, en 1942, alors qu'il faisait partie du gouvernement de Vichy. Je parle de M. François Mitterrand.
Ces semaines qui précédaient le 9 Av, nous les vivions dans une ambiance de deuil. Pas de vêtements neufs, pas de musique, ni aucune réjouissance. Un régime alimentaire des plus minables. Des pleureuses, dans les rues, le soir sous un éclairage des plus sombres, s'arrachant les joues en scandant des chants de malheur.
Plusieurs lieux et circonstances concernant la même époque, ont marqué mon enfance et, chaque année au cours de ces semaines je ne peux me retenir de les ressentir au fond de mon âme.
Mais, dès la prière de Minh'a du 9 av, l'espoir renaît. Cette atmosphère de tristesse, se métamorphose en une miraculeuse note d'espoir.
On commence déjà à verser des seaux d'eau par terre, à allumer le feu, à faire de la pâtisserie. Les marchands de limonades, sortent leurs barres de glace. Les cadeaux au fiancé de la part de la famille de la fiancée, en préparation dans la maison de celle-ci. Par la suite, pour Chabat Nahamou, ce sont les vêtements neufs. Le lendemain, les préparatifs pour le mois des fêtes de Tichri.
La misère est oubliée. La vie juive recommence dans son inexplicable miracle.
Enfin, réjouissons nous du privilège vécu par notre génération: Les juifs ont leur Etat, leur ARMEE, leurs centres de recherches scientifiques, un niveau de vie "miraculeusement" élevé, sans pétrole, avec une agriculture des plus performantes et prospères malgré le manque d'eau. Des frontières où s'accumulent et se
dressent des millions d'ennemis, armés "jusqu'aux dents", et pleins de -milliard de petro dollars et surtout de la haine du juif, soutenue par d'autres milliards de nos ennemis.
Rendons grâce à Dieu qu'aucun de nos frères ne réside plus dans aucun des pays arabo-islamiques. Exception faite pour les quelques milliers d'âme restant encore au Maroc et en Tunisie, Pays méritant notre reconnaissance.
En effet, pour ceux qui y ont vécu dans les territoires intérieurs, s'ils étaient vivants de nos jours, ils pourraient témoigner comme le rappelle les quelques lignes qui suivent:
A de rares exceptions, des familles que l'on pouvait qualifier d'aisées, vivant surtout dans les grandes villes et côtoyant les autorités à coup de corruption et de favoritisme, la plupart de la population juive vivant sur les montagnes ou des les campagnes, survivait par protection dans des mellah, tout ce que l'on pouvait imaginer de misérables. L'humiliation du juif face aux yeux des musulmans et considéré par celui-ci comme impure et répugnant, c'était le plus de dégoût que cela inspirait.
Pendant des siècles, si les massacres n'étaient pas du genre armé des cosaques et des barbares d'Europe, c'était grâce à une protection charitable de la part des monarques de l'époque, se référant aux quelques recommandations du Prophète glanées par ci par là .
A l'heure actuelle, nous assistons à l'éclosion de ces enfants juifs dégagées du joug des pays qu'ils ont quittés, émancipés, libérés et vivant à égalité avec les autres citoyens. En effet, dans les technologies d'avant garde, la médecine, le droit, le commerce et la finance, dès qu'ils peuvent à accéder, ils y réussissent avec succès.
Ces mêmes petits juifs sortis des Mellah moyenâgeux tant du Maroc que de l'ensemble des pays arabo islamiques, grâce à leur fécondité, peuvent rivaliser avec leurs nouveaux concitoyens, sans aucune complexe.
Mais Dieu (B.H.O.B.Ch), cette fois-ci, a le regard tourné vers nous. Alors nous pourrons répéter:
"Gamm qi élèkh bégué tsalmavett, lo ira rah' qi atta himmadi". (Même si je vais dans les abîmes de la mort, je ne craindrai aucun mal, car tu es avec moi)**
Raphaël Ohayon de Marrakech. Le Cap d'Agde 18 juillet 2007. 3 Av 5767.
* Actuellement tel un mort, je suis oublié, et nul ne s'inquiète de mon âme.
**Psaume 23 ?. (Voir la fin de Harbitt du vendredi soir).