c est les vacances les papys et mamys sont plus sollicites
un article sur l art d etre grand parent
L'art d'être grand-père
Famille
Il y a un « art d’être grand-père », comme l’avait bien expliqué Victor Hugo. Mais le grand-père d’aujourd’hui fait oublier peu à peu la figure du patriarche à barbe blanche. Il devient plus proche de ses petits-enfants, qu’il aime écouter, accompagner, initier. Le chemin n’est pas balisé, mais les grands-pères adorent ça !
Bien des grands-pères pourront se reconnaître dans cette définition : « Quand un enfant est heureux de venir chez vous, c’est gagné… vous êtes un bon grand-père. » (photo ci-jointe)
Qu’est-ce qu’un grand-père aujourd’hui ?
La question est peu débattue : « Dans les ouvrages consacrés aux grands-parents, le grand-père n’a guère de place. Il semble suivre la manière de faire de la grand-mère », constate le sociologue Henri-Pierre Jeudy (1). Serait-il réduit au rôle de figurant ? Devrait-il se contenter de rester à sa place, sans jamais en demander davantage ?
Absolument pas. Car même si la figure du patriarche tout puissant a vécu, le grand-père reste aux yeux de ses petits-enfants un repère très important. André, 64 ans, expert-comptable encore en activité, ne renoncerait pour rien au monde à son rôle : « J’ai tous les avantages du père sans en avoir les inconvénients, observe-t-il. Je n’ai pas à éduquer mes petites-filles, j’ai à les encadrer. » André a deux filles de 38 et 39 ans, qui sont mères d’Antonia, 7 ans et demi, de Léa, 6 ans et demi et de Margot, 5 ans. Il était plus sévère avec ses filles. Avec ses petites-filles, il va jusqu’à transgresser quelques interdits : « Ce sont de bien petits interdits. Je donne quelquefois des bonbons en cachette et je fais des zigzags en voiture. Dès que je peux, je les fais rire. Contrairement aux parents, qui en ont la charge permanente, je ne vois mes petites-filles que temporairement. La relation est donc de pur plaisir. »
Tout le monde n’accepte pas aussi facilement de se délester de sa position d’autorité. Père de six enfants, Jean – 75 ans – a quinze petits-enfants. Le plus âgé a 28 ans, les derniers, des jumeaux, ont 3 ans. Jean a une idée précise de ce que doit être l’éducation, et le père qu’il a été a du mal à céder la place au grand-père. « J’aimerais être plus souple, mais je ne supporte pas le laxisme de mes propres enfants. Je n’aime pas que mes petits-fils passent à table torse nu, ni qu’ils soient insolents avec leurs parents. J’ai beaucoup de choses à dire, et je les dis. Pour moi, l’éducation doit être prise en charge par tous les adultes, mais je ne suis pas certain que les parents d’aujourd’hui soient toujours des “adultes”… »
Des grands-pères qui s’autorisent l’émotion
Jacques, au contraire, est resté longtemps en retrait par rapport à ses petits-enfants. Dérouté par l’énorme différence entre l’éducation qu’il avait reçue et la leur, il ne savait comment s’y prendre. C’est un ancien agriculteur. Il a 75 ans, quatre enfants, sept petits-enfants. Comme beaucoup d’hommes de sa génération, il a vécu dans la même maison que ses parents jusqu’à leur mort. Ses frères et sœurs habitaient les fermes voisines. La famil-le était donc omniprésente. « Mon grand-père régissait tout, y compris la vie de ses petits-enfants, explique Véronique, la fille de Jacques, qui a aujourd’hui 40 ans.
C’était un patriarche. Il savait avec qui je devais me marier, ce que je devais faire de ma vie. Je lui appartenais, à lui plus qu’à mes parents ! Un jour où je n’en pouvais plus, j’ai dit à papa : “Tu es encore dépendant de ton père pour m’élever.” Il en est resté bouche bée. » Depuis, la remarque a fait son chemin. « A 70 ans, mon père a vécu son adolescence. Il a osé déménager pour aller s’installer dans un autre village, avec ma mère. Ce qui l’a rapproché de ses petits-enfants. Récemment, nous avons passé une semaine ensemble, les trois générations réunies, et c’était formidable. Mes pa-rents, qui ont souffert de l’ingérence du grand- père, sont très respectueux de notre autonomie. »
Il ya un “nouveau grand-père” comme il ya eu un “nouveau père”
Il est beaucoup demandé au grand-père moderne. Il doit être proche de ses petits-enfants, mais pas envahissant ; compréhensif, tout en se faisant respecter ; à l’écoute, mais pas interventionniste. « Il doit aussi savoir arrondir les angles entre la belle- fille et la belle-mère. Son rôle de médiateur est capital dans la famille », ajoute Marie-Françoise Fuchs, créatrice de L’Ecole des grands-parents (2). La fonction est ingrate parfois, et surtout mal balisée, mais les grands-pères jouent le jeu à fond. « Il y a des moments de tension avec les adolescents, mais on arrive à parler de beaucoup de choses. Il faut saisir l’occasion pour donner son point de vue », dit Jean l’interventionniste, qui fait feu de tous bois pour lancer des débats philosophiques sur le sens de la vie, la première rencontre amoureuse, la prière… « C’est parfois difficile, mais il y aussi de très beaux moments, raconte-t-il. A Noël, par exemple, nos petits-enfants nous ont écrit une chanson dans laquelle, c’est vrai, ils épinglaient nos défauts. Mais nous étions très touchés, ma femme et moi. »
Le grand-père a ainsi gagné une liberté affective qui n’existait pas for-cément auparavant. « Il y a actuellement un “nouveau grand- père” comme il y
a eu un “nouveau père”, constate Marie-Françoise Fuchs. Depuis une dizaine d’années, l’évolution est remarquable. Les grands-pères osent laisser parler leurs émotions. Ils sont aussi beaucoup plus proches des tout-petits, voire des nourrissons. Autrefois, ils disaient : “Les choses sont comme elles sont.” Aujourd’hui, ils sont plus sensibles à ce que représente une jeune vie. »
Le grand-père peut être très utile auprès des adolescents
« J’ai eu peu de contact avec mes enfants. Je travaillais, et ma femme les élevait. Je faisais “les gros yeux”, et c’est tout, regrette Guy, quatorze fois grand-père. Aujourd’hui, j’ai le temps de jouer ou de bricoler avec mes petits-enfants. J’aime cette vie de grand-père. » Pierre, lui, a transmis sa passion du foot à son petit-fils. « Il m’appelle avant chaque début de match et nous allons au stade ensemble. Grâce aux jeux sur son ordinateur, il connaît par cœur les joueurs et la composition des équipes, il étonne mes amis ! raconte-t-il avec fierté. Cette passion partagée nous rapproche énormément. »
Le grand-père est le grand initiateur. Il montre le monde, les étoiles, le ciel, fait partager sa passion pour la pêche, l’ordinateur… (photo ci-contre)
André, le grand-père aux trois petites-filles, est également un excellent compagnon de jeu. Pour Antonia, Léa et Margot, il déploie des trésors d’imagination et d’humour : « Je détourne les gros mots, ou plutôt j’en invente de nouveaux, comme : “T’es une bouteille d’eau !” Pour ma petite-fille de 4 ans, c’est la suprême insulte », raconte-il en riant. Cette complicité nouvelle n’est pas sans étonner les grands-mères, qui découvrent leur mari sous un jour nouveau. « Pierre a pris tout de suite ses petits-enfants “aux bras”, ce qu’il n’avait pas osé faire avec ses enfants quand ils étaient nourrissons », re-marque son épouse, Simone. Paul et Dany ont deux petits-fils de 2 et 4 ans, Noah et Lucas. Paul a 72 ans. « Mon mari a plus de patience que moi avec ses petits-enfants, il joue beaucoup avec eux », avoue Dany. « Je traverse tout Lyon pour les emmener au zoo, raconte Paul. Je leur vante les girafes et les éléphants et, à l’arrivée, ce sont les canards qu’ils regardent ! Je suis là pour leur apporter du bonheur : nous parlons, nous jouons et nous “grabouillons”, comme ils disent. Ce sont des joies simples. »
Dégagé de la solennité imposée aux aïeuls des générations précédentes – tout comme de l’intendance que les grands-mères, en règle générale, continuent à assumer –, le grand-père se retrouve face à des plages de liberté inédites. De quoi se tailler une place de choix auprès de ses petits-enfants : complice, compagnon de jeu, partenaire, médiateur, initiateur, défricheur… « A lui d’inventer sa propre partition », conseille Henri-Pierre Jeudy. Avec honnêteté, ce dernier confesse cependant que le grand-père n’en est pas tout à fait quitte avec « la tentation de prendre la pose pour l’éternité » !
Le temps pour faire partager ses passions
Quand ça bloque avec les parents, le grand-père peut également venir à la rescousse, mais en se situant toujours sur un autre registre. « Antonia, la plus grande, ne comprenait toujours pas les unités de mesure, raconte André. J’ai donc profité d’un voyage en voiture pour lui demander, au fil de la route, de me traduire en mètres ou décamètres le nombre de kilomètres parcourus. C’est rentré tout seul ! » « Ma petite-fille m’a appelé pour me demander ce que je pensais du piercing. Et elle m’a écouté ! » témoigne de son côté Jean, encore étonné. « Le grand-père peut être très utile auprès des adolescents, confirme Marie-Françoise Fuchs. Moins pris dans la relation d’autorité, il peut remettre les choses en perspective. »
Un peu comme dans un tableau impressionniste, le grand-père agit par petites touches : il montre le monde, les étoiles, le ciel, fait partager sa passion pour la pêche, la randonnée, l’ordinateur, le potager, la littérature, le bricolage… « Il est le grand initiateur », approuve Marie-Françoise Fuchs. « Un geste, un regard, un bisou, c’est ce qui restera de moi dans le souvenir de mes petits-fils, remarque, songeur, Paul, le grand-père aux canards. Tout comme je me souviens de mon grand-père à la barbe blanche et aux doigts jaunis par la cigarette qui m’em-menait voir les bateaux au jardin du Luxembourg… » « Quand un enfant est heureux de venir chez vous, c’est gagné. Vous êtes un bon grand-père. Je ne vois pas d’autre définition », tranche, pragmatique, André.
« Le grand-père d’aujourd’hui est donc une figure libre, qui peut à sa guise vivre une seconde enfance avec ses petits-enfants. Dégagé des contraintes de l’éducation pure et dure, il est dans le “gai savoir” », résume Henri-Pierre Jeudy, le grand-père sociologue – qui a la barbe blanche comme Victor Hugo, et les yeux qui brillent… comme un enfant.
Texte de : Hélène Molière
Crédit photo : R. Kaufman/Corbis
avec mon petit fils kamy a marrakech 46 degres a l ombre
on se rafraichit comme on peut
hassan